Envoyé par
Fred Audin
les "personnalités" attribuées aux tonalités résultent je pense de la subsistance dans le système tonal des modes anciens et de la rencontre entre certaines gammes et leurs correspondants antiques, le tout influencé par les modes du grégorien et la différence faite avant la polyphonie entre modalité d'église et modalité mondaine (les demi-ton chromatiques étant proscrits dans la musique religieuse en raison de leur supposée sensualité). En ce qui concerne ré mineur, le sentiment "tragique et sombre" est dû à la parenté avec le mode de ré (dorien pour la renaissance, phrygien pour les grecs). le dies irae grégorien est lui-même noté dans un mode qui ressemble à la tonalité de ré mineur.
Au contraire ré majeur se rapprocherait du mode de sol (myxolydien pour le moyen-âge, hypophrygien pour les grecs).
La perception des sensations liées aux tonalités est peu à peu perturbée par les correspondances entre relatives majeures et mineures: ré majeur est la relative de si mineur alors que ré mineur est la relative de fa majeur.
Les modes de do et de la qui sont la base du système tonal n'apparaissent que très tardivement dans la musique, à la fin du moyen-âge.
L'impossibilité de réaliser certaines modulations sans contredire les règles de l'harmonie tonale classique (impossibilité d'avancer ou de reculer d'un demi-ton, de passer d'ut majeur à si majeur par exemple) doit aussi jouer sur la "personnalité" de certaines tonalités.
Je ne suis pas sûr que ces remarques fassent avancer le schmilblick.
Dans l'opéra comme dans la musique d'église il y a certains tics ou automatismes qui imposent le lien entre entre des sentiments et des tonalités fixes (ils sont aussi dus sans doute aux limitations de la voix humaine et des instruments, voire à l'impossibilité de faire sonner juste certains registres d'orgue). La chose se complique sans doute avec l'intervention de la symbolique des armatures (les trois altérations de la trinité (ut mineur, la majeur etc) ou la désignation par lettres des tonalités D, ré et G sol qui sont les initiales de la divinité, et celle du diabolus in musica, interdit dans la musique d'église baroque (triton, quinte diminuée) et utilisé à profusion pour l'effet de déstabilisation qu'il induit.