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Discussion: Les musiques qui font peur

  1. #41
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    Citation Envoyé par Brouken Air Voir le message
    Kubrick était avant tout un grand technicien qui maitrisait autant la direction photographique, que la prise de son, le montage, etc... Le cinéma lui doit pas mal de gadgets, qu'il a développé et mis au point avec ses opérateurs. Il faut dire qu'il était bien entouré et qu'il savait tirer la substantifique moëlle de chacun de ses opérateurs... En plus de ses extraordinaires qualités de technicien, il possédait une vaste culture... On ne peut en dire autant de ses collègues actuels...
    C'est parfaitement juste .

    À propos de la minutie de Kubrick, de son perfectionnisme appliqué à tous les aspects de sa production, j'ai appris à l'occasion des séances que j'ai évoquées (The Shining au ciné-club) une chose qui m'avait beaucoup frappé...

    Je voulais qu'aux deux séances le film fût projeté dans sa version en langue originale avec sous-titres en français. Mais beaucoup d'invités, ne comprenant pas l'anglais mais détestant les sous-titres, ont insisté plusieurs jours à l'avance pour qu'à l'une de ces séances fût projetée la version doublée en français. J'ai donc dû m'y résoudre.

    Avec une petite "consolation" cependant : Kubrick avait exercé son contrôle jusqu'au doublage, imposant les voix dont les timbres lui semblaient convenir le mieux. C'est ainsi que pour le rôle de "Jack Torrance", c'est la voix de Jean-Louis Trintignant qui, dans cette version parlée en français, remplace celle de Jack Nicholson ()...

    Cela dit, le seul documentaire existant qui permet de voir Kubrick au travail, c'est justement le "Making of The Shining", réalisé pendant le tournage du film par Vivian Kubrick, fille cadette du réalisateur.

    Il s'agit donc d'un document extrêmement précieux, qu'une vidéo sur YouTube permet de voir avec des sous-titres en français.

    Voici cette vidéo (ne la ratez surtout pas si vous ne l'avez encore jamais vue) :

    [/URL]

    Jacques
    Dernière modification par Jacques ; 03/10/2013 à 21h09.

  2. #42
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    Kubrick a songé un temps, avant d'y renoncer, utiliser un extrait du Sacre du printemps (Stravinsky) pour la scène de la "poursuite dans le labyrinthe enneigé". Le documentaire de sa fille Vivian – c'est à 20:20 sur la vidéo du post précédent – en apporte indirectement la preuve ().

    À propos de Ligeti, l'article que Wikipédia consacre à ce compositeur indique ceci sous la rubrique "Au cinéma" : "Le réalisateur Stanley Kubrick utilisa plusieurs fois la musique de György Ligeti dans ses films, en particulier Atmosphères, Requiem, et Lux Æterna dans 2001, l'Odyssée de l'espace («le monolithe noir») et Musica Ricercata dans Eyes Wide Shut (le thème au piano, «comme un coup de poignard dans le cœur de Staline», d’après Ligeti). Kubrick a également utilisé Lontano de Ligeti dans The Shining."

    Une remarque personnelle, bien sûr hors sujet "musiques qui font peur" : sans Barry Lyndon de Kubrick, il n'est pas certain que mon attention eût été attirée irrésistiblement dès la sortie de ce film sur le chef-d'œuvre qu'est le Trio No 2 Op. 100 de Schubert.

    Jacques

  3. #43
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    Citation Envoyé par lebewohl Voir le message
    RIen à voir avec Kubrick, en tout cas pas que je sache, mais, je trouve, avec la peur :

    [/URL]

    Je trouve que ce passage fait vraiment peur, mais est-ce que c'est parce que je sais ce qui va se passer (enfin à peu près, quoi, avec ce livret un peu compliqué on ne sait jamais en détail)?
    Dans ce passage, je ressens plus du drame et de l’ardeur, de l’exaltation, que de la peur à proprement parler. Par rapport à vous j’ai l’avantage de ne pas savoir ce qui va se passer après (ayant horreur de l’opéra, je suis au regret de ne pas m’être beaucoup intéressé à ceux de Wagner), et aussi de ne pas comprendre les paroles. Et d’ailleurs, à ce sujet je voudrais dire que les émotions exprimées dans les paroles ne sont pas forcément les émotions exprimées par la musique. Il ne faut pas confondre les deux. C’est tout à fait le droit du compositeur de faire exprimer les émotions dans des paroles, mais en toute rigueur on ne parle plus alors d’émotions véhiculées par la musique. Pour moi, la musique reste un langage abstrait impuissant à transmettre du sens. Il n’a que le pouvoir de produire des émotions, ou plus exactement de faire percevoir des émotions (on ne les ressent pas vraiment en soi, on les reçoit comme par empathie). En même temps, je dis ça sans en être tout à fait convaincu, car par association d’idées (musicales), je ne peux m’empêcher de repenser à ce que je ressens à chaque fois que j’écoute un certain passage de la musique du film Ivan le Terrible par Prokofiev où le chanteur qui interprète Ivan (c’est dans l’extrait "Ivan supplie les boyards") fait passer des accents déchirants dans sa voix durant un long monologue qui se termine par une sorte de sanglot de colère qui me fout des frissons à chaque fois. Mais est-on encore dans la musique ou dans une interprétation d’acteur ? Quelle est la frontière entre les deux ? Et quelle est la différence fondamentale entre une émotion ressentie (par soi-même donc, et pour des raisons qui touchent à notre vie personnelle) et une émotion vécue, exprimée par une autre personne, et perçue par nous par empathie ?

  4. #44
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    ah... vastes questions!

    J'ai peur dès les premiers mots, qui sont "Hoi ho!", je crois (en français :" Hoi ho!"). C'est l'orchestre et les notes chantées (et dans le cas particulier, en plus, le timbre du chanteur) qui me font cet effet. Alors évidemment, je n'ai pas peur en ce sens que j'aurais envie de m'enfuir ou de me cacher sous mon lit ; je ne me suis pas enfui non plus en lisant la fin du Silence des Agneaux ni du Seigneur des Anneaux (sans tout mettre exactement sur le même plan, hein, entendons-nous). Disons que j'ai perçu l'expression de la peur, ou sa manifestation, enfin je suppose que des tas de théoriciens de l'esthétique ont déjà trouvé le mot exact.
    Sinon vous dites la même chose que Stravinsky : "la musique est, par son essence, impuissante à exprimer quoi que ce soit". Il ne faut pas surinterpréter cette phrase (je l'ai fait trop longtemps, je sais de quoi je parle), mais en effet un accord mineur ne "signifie" pas la tristesse, mais une musique peut provoquer des émotions extrêmement fortes. Mais pas du genre "là c'est triste parce que le compositeur venait d'être plaqué par sa copine", comme on le raconte parfois, ce qui est propre à dégoûter des légions entières de la musique, notamment romantique.
    Dernière modification par lebewohl ; 04/10/2013 à 09h38.
    Il s'engendre beaucoup d'abus au monde ou, pour le dire plus hardiment, tous les abus du monde s'engendrent de ce qu'on nous apprend à craindre de faire profession de notre ignorance.

    Montaigne

  5. #45
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    Quand j'étais gosse, et même plus tard un ado, beaucoup de musiques classiques me faisaient peur – ou du moins me mettaient très mal à l'aise - par la tension et la force suggestive (dans un registre que je qualifierai de "sombre") qui les caractérisent. Et ça a laisé des traces, même s'il ne s'agit plus de peur à proprement parler aujourd'hui.

    Mon père écoutait beaucoup de musiques enregistrées, mais je ne crois pas avoir entendu, à l'époque, l' "Appel de Hagen" du Crépuscule des Dieux. Il ne fait toutefois aucun doute que ça m'aurait fait terriblement peur. À d'autant plus forte raison que maints passages d'une œuvre (radicalement différente s'il en est mais que mon père passait souvent quant à elle) comme El amor brujo de Manuel de Falla suffisaient à m'effrayer.

    J'ai maintenant cinq versions complètes du Ring et au moins autant d'El amor brujo, signe que les choses se sont quand même un peu arrangées depuis ().

    Mais c'est dans la nature de bien des gens (dont moi), je crois, "d'aimer se faire peur" tout en étant confortablement assis dans un fauteuil et ne risquant absolument rien.

    Jacques

  6. #46
    En attente de confirmation
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    Citation Envoyé par Kullervo Voir le message
    la musique du film Ivan le Terrible par Prokofiev où le chanteur qui interprète Ivan
    Nikolaï Tcherkassov était chanteur, et chante dans le film ?
    Diable ; il va falloir que je regarde à nouveau.

  7. #47
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    Citation Envoyé par Kullervo Voir le message
    Dans ce passage, je ressens plus du drame et de l’ardeur, de l’exaltation, que de la peur à proprement parler. Par rapport à vous j’ai l’avantage de ne pas savoir ce qui va se passer après (ayant horreur de l’opéra, je suis au regret de ne pas m’être beaucoup intéressé à ceux de Wagner), et aussi de ne pas comprendre les paroles. Et d’ailleurs, à ce sujet je voudrais dire que les émotions exprimées dans les paroles ne sont pas forcément les émotions exprimées par la musique. Il ne faut pas confondre les deux. C’est tout à fait le droit du compositeur de faire exprimer les émotions dans des paroles, mais en toute rigueur on ne parle plus alors d’émotions véhiculées par la musique. Pour moi, la musique reste un langage abstrait impuissant à transmettre du sens. Il n’a que le pouvoir de produire des émotions, ou plus exactement de faire percevoir des émotions (on ne les ressent pas vraiment en soi, on les reçoit comme par empathie). En même temps, je dis ça sans en être tout à fait convaincu, car par association d’idées (musicales), je ne peux m’empêcher de repenser à ce que je ressens à chaque fois que j’écoute un certain passage de la musique du film Ivan le Terrible par Prokofiev où le chanteur qui interprète Ivan (c’est dans l’extrait "Ivan supplie les boyards") fait passer des accents déchirants dans sa voix durant un long monologue qui se termine par une sorte de sanglot de colère qui me fout des frissons à chaque fois. Mais est-on encore dans la musique ou dans une interprétation d’acteur ? Quelle est la frontière entre les deux ? Et quelle est la différence fondamentale entre une émotion ressentie (par soi-même donc, et pour des raisons qui touchent à notre vie personnelle) et une émotion vécue, exprimée par une autre personne, et perçue par nous par empathie ?
    Ce que vous avancez est paradoxal, d'un coté vous dissociez la musique du livret (du texte) pour l'opéra concernant la génération d'émotion, de l'autre pour Ivan vous ne savez plus si c'est la musique (la voix) ou le jeu d'acteur ou une combinaison qui génère l'émotion.
    Je pense qu'il existe des émotions fondamentales que l'on peut transmettre par différents vecteurs (jeu d'acteur, musique, texte, combinaison). Dans le cas de Wagner, il me semble impensable d'écouter tout un opéra sans comprendre quoi que ce soit à l'histoire. Ce serait comme écouter un opéra uniquement sur base de la déclamation du texte sans musique... je comprends pourquoi vous n'aimez ni l'opéra, ni Wagner. Pour moi, l'opéra est quelque chose que l'on doit voir et entendre sur une scène. A la limite, on peut regarder et écouter un opéra sur son poste de télé. Ecouter un opéra sans image m'est bien souvent insupportable, alors que sur une scène j'adore. Je vous suggère d'aller voir un opéra, de ressentir physiquement les chanteurs et l'orchestre, muni d'un livret... et je pense que vous aurez peut-être une autre vue de l'opéra.
    Vous dites vous-même, quand je regarde le film d'Ivan le Terrible, je ne sais plus... tout simplement parce que voyez et entendez un spectacle tel qu'il a été concu (image, jeu d'acteur, musique). Auriez-vous la même émotion si vous écoutiez la musique d'Ivan pour la première fois sans voir l'image?
    De plus concernant le pouvoir de la musique de véhiculer des émotions, je ne vois pas quelle est la différence entre une émotion ressentie musicalement, par empathie et une émotion vécue. Ces émotions fondamentales telles que (l'amour, la haine, la douleur, la perte, l'absence...) font toutes partie de notre vécu, peu importe que ce vécu soit imaginaire ou pas... L'homme a cette capacité extraordinaire de pouvoir se transposer et donc de ressentir les effets de quelque chose qui n'est pas 'réel'. Par exemple, les états d'âme de Schubert ne sont-ils pas des transpositions? Leurs effets sur Schubert n'en est pas moins réel et il nous transmet ces émotions au travers de la musique, d'autres au travers d'un opéra ou d'un film.
    Pour revenir au fil de départ, oui la musique peut transmettre la peur et l'effroi, écoutez certains lieders de Schubert pour vous en assurer (Doppelgänger , Die Stadt , Winterreise ...) ou certaines symphonies de Chostakovich ou certains passages de Alpensinfonie de Strauss ou tous les exemples que nous a donnés Jacques).

    Ben tiens, ceci m'a ouvert l'appétit, je m'en vais écouter Schwanngesang par Mathias Goerne et Eschenbach...

    Bonne journée

  8. #48
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    (cela n'a rien à voir avec le coeur du débat, mais je pense qu'il existe certains opéras où la musique est suffisante, même si c'est encore plus mieux avec le texte, et avec la mise en scène - enfin... ça, ça dépend... - , et bien sûr avec le réel laïve en direct sur le vif pour de vrai) (je citerai "les Noces de Figaro", par exemple)
    Il s'engendre beaucoup d'abus au monde ou, pour le dire plus hardiment, tous les abus du monde s'engendrent de ce qu'on nous apprend à craindre de faire profession de notre ignorance.

    Montaigne

  9. #49
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    Citation Envoyé par lebewohl Voir le message
    (cela n'a rien à voir avec le coeur du débat, mais je pense qu'il existe certains opéras où la musique est suffisante, même si c'est encore plus mieux avec le texte, et avec la mise en scène - enfin... ça, ça dépend... - , et bien sûr avec le réel laïve en direct sur le vif pour de vrai) (je citerai "les Noces de Figaro", par exemple)
    Vous avez parfaitement raison, j'y rajouterai même Don Giovanni, dont l'avant-ultime scène, me terrifiait quand j'étais petit... Mais j'allais l'écouter quand même tout seul avec ce délicieux frisson....

  10. #50
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    (cela n'a rien à voir avec le coeur du débat, mais je pense qu'il existe certains opéras où la musique est suffisante, même si c'est encore plus mieux avec le texte, et avec la mise en scène - enfin... ça, ça dépend... - , et bien sûr avec le réel laïve en direct sur le vif pour de vrai) (je citerai "les Noces de Figaro", par exemple)
    Vous avez parfaitement raison, j'y rajouterai même Don Giovanni, dont l'avant-ultime scène, me terrifiait quand j'étais petit... Mais j'allais l'écouter quand même tout seul avec ce délicieux frisson....

  11. #51
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    Réponse à Lebewohl

    Non, non, je ne dis pas comme Stravinsky que “la musique est impuissante à exprimer quoi que ce soit”. Elle est tout à fait capable d’exprimer des émotions. C’est même l’une des raisons essentielles de son existence. Je pense en revanche qu’elle n’exprime aucun sens. Que la musique soit capable d’évocation, j’en suis le premier convaincu, mais elle ne peut avoir un sens aussi précis que celui des mots. Les compositeurs utilisent délibérément les capacités narratives et picturales de la musique, j’en suis parfaitement d’accord, puisque pour moi la musique est avant tout un “paysage sonore”. Mais pour l’aspect narratif, il ne joue à mon avis que si l’on sait a priori ce que la musique est censée, selon le compositeur, nous raconter. C’est comme cela que fonctionnent les musiques de film. Quand on regarde un film, on “sent” que la musique colle bien avec les images. En revanche, lorsqu’on écoute une musique de film sans rien connaître de celui-ci et sans le voir en même temps, on peut ressentir une certaine ambiance, une certaine émotion, qui seront sans doute en accord avec celles du film, mais s’il nous arrive de plaquer dessus des images issues de notre esprit en fonction de la musique, il y a peu de chances qu’elles correspondent, même de loin, avec celles du film. Du coup, lorsqu’on écoute une musique en en sachant le moins possible sur ce qu’elle est censée “dire”, le sens qu’on aura tendance à coller dessus restera très subjectif. Il ne sera pas totalement arbitraire car la musique ne tombe pas du ciel et on peut assez facilement assigner à un morceau une époque et un lieu de composition, avec toutes les connotations historiques, sociologiques, culturelles et artistiques qui vont avec. Ces connotations “spatio-temporelles”, auxquelles il faut ajouter les connotations spécifiques au langage musical, vont induire inconsciemment une certaine direction au sens que nous allons attribuer à la musique entendue, mais c’est à peu près tout ce qui a des chances de tomber juste. Le reste nous appartient en totalité. D’ailleurs, je pense que, comme toute oeuvre d’art, la musique, une fois qu’elle est jouée et entendue, n’appartient plus à son auteur mais à l’auditeur. C’est en lui qu’elle vit, et peu importe ce que le compositeur a “voulu dire”, si tant est qu’il ait voulu dire quelque chose. Et bien sûr, comme il y a autant d’interprétations que d’auditeurs, il est finalement assez difficile de se mettre d’accord sur le “sens” d’une musique. Lorsque Kubrick “détourne” telle ou telle musique, comme quelqu’un l’a souligné (est-ce vous ?), il fait bien la démonstration que la musique, maintenant, lui appartient et que le “sens” éventuel que lui a donné son auteur n’a aucune importance pour lui. C’est le sens qu’il lui donne, lui, qui compte et qui est “vrai”. Et il a tellement raison que, pour moi, la musique de Ligeti, par exemple, est définitivement liée à une signification “cosmique”, qui était probablement à mille lieues (ou mille années lumières) des pensées de son auteur lorsqu’il l’a composée.


    A Jacques.

    Moi aussi, quand j’étais gosse, mon père écoutait de la musique classique, et je ne dirais pas qu’elle me faisait peur, mais elle me mettait mal à l’aise, elle m’intimidait. Elle me faisait un peu le même effet que les choses de la religion, la messe, ces choses solennelles et sacrées. Oui, finalement ça faisait un peu peur quelque part.


    A Brooken Air

    Je n’ai pas dis que je n’aimais pas Wagner. Les quelques musiques symphoniques qu’on connaît de lui (une symphonie et demi et des extraits orchestrés d’opéras) me plaisent bien. Non, je n’aime pas l’opéra essentiellement parce que je ne supporte pas le chant lyrique. C’est physique, presque. Et aussi j’ai toujours trouvé "tartes" les dialogues chantés, qu’il s’agisse d’opéra ou de comédie musicale. Je suis allé voir un seul opéra dans ma vie, c’est Le prince Igor de Borodine. Mais c’est parce qu’il y a beaucoup de chœurs (ça, j’aime bien), et de musique non chantée (avec les danses polovtsiennes notamment – que j’ai connues grâce à mon père d’ailleurs). Ça, ça ne me faisait pas peur, c’était enlevé, c’était enthousiasmant, excitant.

    Sinon, je n’ai jamais vu le film Ivan le Terrible, je ne connais que la musique. C’est dans celle-ci que le chanteur met ces accents d’émotion qui me donnent le frisson. Ce qui sans doute arrive aussi dans les opéras.

    Je ne sais pas non plus quelle est la différence entre émotions vécues (qui sont des réactions à des événements qui nous touchent personnellement) et émotions ressenties musicalement, mais il y en a forcément une. Ne serait-ce que parce que les deuxièmes disparaissent "comme par magie" dès que la musique est finie, alors que les premières nous poursuivent parfois pendant des jours. C’est pour cela que je préfère parler d’émotions "perçues" à travers la musique, parce qu’elles ne nous appartiennent pas en propre mais que nous les percevons comme par empathie, de la même manière que nous percevons l’émotion d’une autre personne sans que nous la ressentions comme étant personnelle.

  12. #52
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    À d'autant plus forte raison que maints passages d'une œuvre (...) comme El amor brujo de Manuel de Falla suffisaient à m'effrayer.
    Pas étonnant, quand j'y pense, que la vidéo ci-dessous (trois versions de "Canción del amor dolido" par des chanteuses espagnoles aux voix de plus en plus rauques) ait été l'une des premières que j'ai mises en ligne sur YouTube ()...

    Le gamin impressionnable que j'étais ne pouvait qu'être terrifié () en entendant cette sorcière gitane qui, la nuit devant un grand feu, jette un mauvais sort aux protagonistes de l'histoire et concocte un poison.





    Jacques

  13. #53
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    Pas étonnant, quand j'y pense, que la vidéo ci-dessous (trois versions de "Canción del amor dolido" par des chanteuses espagnoles aux voix de plus en plus rauques) ait été l'une des premières que j'ai mises en ligne sur YouTube ()...

    Le gamin impressionnable que j'étais ne pouvait qu'être terrifié () en entendant cette sorcière gitane qui, la nuit devant un grand feu, jette un mauvais sort aux protagonistes de l'histoire et concocte un poison.


    Jacques
    En aparté et en vitesse, je viens d'écouter le 'de Falla' d'Esteban Sanchez, suivi de Turina et terminé par du Fauré par le même Sanchez.... C'est vraiment du tout, tout bon

    Bonne soirée

  14. #54
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    Je suis très content que ces enregistrements d'Esteban Sánchez vous aient plu ().

    Ça me fait regretter de ne plus avoir son Fauré, car ce pianiste était aussi très bon dans cette musique. Je l'avais en fait sur un disque vinyle qu'avait possédé mon père, mais je l'ai ensuite égaré sans espoir de le retrouver.

    Je vais toutefois le remplacer à la plus prochaine occasion ().

    Au fait, savez-vous qui était au piano à la création d'El amor brujo à Madrid le 15 avril 1915, dans sa version première avec orchestre de chambre ? C'était Joaquín Turina, rentré en Espagne en même temps que son ami de Falla ().

    Jacques

  15. #55
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    Au fait, savez-vous qui était au piano à la création d'El amor brujo à Madrid le 15 avril 1915, dans sa version première avec orchestre de chambre ? C'était Joaquín Turina, rentré en Espagne en même temps que son ami de Falla ().

    Jacques
    En parlant de Turina, il y a ce disque dont j'ai pu n'écouter que des extraits d'une minute...


    Peut-être le connaissez-vous? Il m'a l'air très intéressant... Merci de soumettre votre avis, si vous le connaissez ou proposer des alternatives...

    Il faudrait peut-être changer de fil???

  16. #56
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    Citation Envoyé par Brouken Air Voir le message
    En parlant de Turina, il y a ce disque dont j'ai pu n'écouter que des extraits d'une minute...


    Peut-être le connaissez-vous? Il m'a l'air très intéressant... Merci de soumettre votre avis, si vous le connaissez ou proposer des alternatives...
    Je ne connais malheureusement pas encore ce disque. Mais vu les interprètes (The Nash Ensemble), je présume qu'il est excellent .

    Pour des alternatives (trios, sonates pour violon et piano, etc., composés par Turina), je me permettrai d'en proposer demain : je dois d'abord faire certaines recherches un peu compliquées dans ma collection, qui est assez "bord***que" () en ce moment ().

    En attendant, voici une intéressante photo prise lors d'une réception organisée à Madrid le 15 janvier 1915 en l'honneur de Joaquín Turina (debout au milieu) et de Manuel de Falla (debout à droite), soit exactement trois mois avant la mémorable création d'El amor brujo :



    Légende de la photo en espagnol () : "Miguel Salvador, Joaquín Turina, Manuel de Falla y Luisa Vela tras el homenaje a Falla y Turina celebrado en el Ateneo de Madrid el 15 de enero de 1915".

    Miguel Salvador (l'homme debout à gauche) était un pianiste. Quant à Luisa Vela (la dame assise), c'était à l'époque une soprano espagnole célèbre.

    Bonne nuit .

    Jacques
    Dernière modification par Jacques ; 04/10/2013 à 23h47.

  17. #57
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    J'écoute les nocturnes de chopin par Moravec, en regardant la photographie, j'ai été saisi d'une nostalgie douce et profonde, en rêvant à ces hommes aux destins si différents avec ces grandes moustaches presque identiques, mais avec un regard très différent... Merci Jacques

  18. #58
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    À d'autant plus forte raison que maints passages d'une œuvre (radicalement différente s'il en est mais que mon père passait souvent quant à elle) comme El amor brujo de Manuel de Falla suffisaient à m'effrayer.
    Etonnant comme les mêmes choses peuvent nous faire des effets différents. Parmi les disques que mon père écoutait, La Danse du feu était sur le même que les Danses polovtsiennes, avec également quelques danses du ballet Gayaneh de Katchatourian, et ni les unes ni les autres ne m'effrayaient. Elles faisaient partie bien au contraire des musiques que j'aimais entendre. Parce que c'était rythmé, endiablé, entraînant.

  19. #59
    Membre Avatar de Jacques
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    Pour des alternatives (trios, sonates pour violon et piano, etc., composés par Turina), je me permettrai d'en proposer demain : je dois d'abord faire certaines recherches un peu compliquées dans ma collection.
    Pour la suite de cette "digression Turina", merci d'aller dans la section "Musique de chambre", où je viens de créer un petit fil intitulé "Turina - Musique de chambre" ().

    Jacques

  20. #60
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    Citation Envoyé par Brouken Air Voir le message
    En aparté et en vitesse, je viens d'écouter le 'de Falla' d'Esteban Sanchez, suivi de Turina et terminé par du Fauré par le même Sanchez.... C'est vraiment du tout, tout bon
    Connaissez-vous le Falla de Javier Perianes ?
    Et pour lui aussi, ses autres champs d'exploration ?
    Passionnant (enfin je trouve)

    http://www.javierperianes.com/en/disco

    Connaissez-vous Luis Fernando Perez ?
    Passionnant aussi (enfin ...)

    http://www.luisfernandoperez.com/dis...ia_iberia.html

    Le piano ibérique se porte bien.

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