+ Répondre à la discussion
Affichage des résultats 1 à 2 sur 2

Discussion: Arno est mort aujourd'hui

  1. #1
    Administrateur Avatar de Philippe
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Jemappes / Valencia
    Messages
    8 842

    Arno est mort aujourd'hui

    Arno est mort aujourd'hui, à l'âge de 72 ans.
    J'ignore s'il était connu en France, en Suisse, au Canada ... mais en Belgique c'était un symbole culte, de notre culture, de notre belgitude ... Il fut parfois surnommé le « Gainsbourg belge » - un surnom auquel je n'ai jamais vraiment adhéré, même si des points communs unissent les deux artistes, en particulier leurs goûts pour les excès en tous genres et pour l'alcool, sans parler de leur sensibilité à tous deux.

    Pour qui le connaîtrait peu et souhaiterait le découvrir voici pour commencer trois titres de lui que j'apprécie tout particulièrement :

    Les Yeux de ma mère

    Dancing Like A Goose

    Help Me Mary


    Je ferai suivre ceci d'un aricle que j'ai piqué dans la presse, et qui (me semblant en fait) en appendra peut-être davantage sur ce personnage hors-normes ...

  2. #2
    Administrateur Avatar de Philippe
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Jemappes / Valencia
    Messages
    8 842
    Et Hintjens… créa Arno : retour sur la vie du chanteur belge
    ©AFP
    Dominique Simonet
    Publié le 23-04-2022 à 17h36 - Mis à jour le 23-04-2022 à 18h39

    Et Hintjens … créa Arno : retour sur la vie du chanteur belge

    Disparu ce samedi 23 avril, Arno Hintjens aura été, d’un bout à l’autre, l’acteur de sa propre vie. La liberté qu’il chérissait tant, il l’a sentie gravement menacée, et en broyait du noir. Fidèle à lui-même et à son public, il était un grand interprète doté d’une voix pas possible.



    En quarante ans, il a créé un personnage incontournable. Hors normes, aussi rabelaisien que breughelien, éclaté autant qu’éclatant, insaisissable voire hors de contrôle. Arno était un personnage rock’n’roll. Dans l’attitude – blouson ou veste, chemise ou T-shirt, bottes, jeans noirs, il était le “man in black” belge. Dans le langage et sa façon très personnelle de le (mal) traiter. Dans, et c’est là l’essentiel, l’inlassable quête de liberté.

    La seule geôle dans laquelle il a pu s’enfermer, c’est ce personnage, avec des tics, des effets de langage ou des provocations à répétition. La séduction pouvait laisser place à une certaine lassitude avant que, un peu plus tard, le charme n’agisse à nouveau.

    Arno est décédé
    Le feu aux scènes

    Il y avait un terrain où le charme ne cessait d’opérer : la scène, les planches qu’Arno le chanteur incendiait à chaque coup. “Arno fait ce qu’il veut de la marée humaine, l’emmène jusqu’au bord de mer revoir les filles, ‘en douceur et profondeur’. Avec lui, le rock est un art populaire”, écrivions-nous en 2005, lors de son premier passage au festival Couleur Café, à Bruxelles. Mais c’était comme ça partout, à l’Ancienne Belgique, son fief bruxellois, au Casino d’Ostende, sa ville natale où, en 2019, il a tenu à fêter son septantième anniversaire en rock, au Bataclan, sa salle préférée à Paris.

    C’est la scène, encore et toujours elle, qui a porté Arno jusqu’au bout, en février: trois concerts à l’Ancienne Belgique à Bruxelles, deux aux Casino d’Ostende. Le 13 février, il a fait la paire avec Stromae en invité surprise, pour un “Putain, Putain” d’anthologie. Stromae-Arno, deux générations, deux légendes belges, chacun à sa manière. “La musique, c’est ma thérapie”, disait-il. Raison pour laquelle on eut tout lieu de s’inquiéter lorsque son dernier concert prévu à l’AB, le 15 mars, a été annulé deux jours plus tôt…

    Lulu et “La mer”
    Chez Arno, musique et public ont toujours constitué une thérapie de choc. Musique dans laquelle il est tombé tout petit, puisqu’il se souvient que sa mère, Lucrèce van den Kieboom, dite Lulu, fredonnait souvent des chansons françaises comme “La mer”, de Trenet, à la maison. Lulu qui était secrétaire, d’abord à la Ville d’Ostende, ensuite chez un poissonnier à la minque.

    Mais c’est surtout à sa grand-mère maternelle, Marie-Louise Philips, que le petit Arno doit sa fascination pour la musique. Elle qui l’a en partie élevé, chantait au Théâtre d’Ostende et dans les cinémas projetant des films muets. Espiègle, fantasque, déjà un peu rebelle, l’enfant s’est très vite donné en spectacle, à 5 ou 6 ans.

    Du côté des Hintjens, on n’a pas trop la fibre artistique. Comme son grand-père Charles, Maurice, son père, était ingénieur technicien et travaillait à la Compagnie internationale des Wagons-Lits. Durant la Deuxième Guerre mondiale, Maurice Hintjens est allé en Angleterre, où il a rempli ses obligations militaires à la Royal Air Force, en pilotant notamment l’un des plus célèbres avions de chasse de l’époque, le Spitfire.

    La Résistance en commun
    La lutte contre le nazisme est d’ailleurs un point commun entre les deux familles, Ernest van den Kieboom, grand-père maternel d’Arno, ayant été résistant, membre de l’Armée secrète, et communiste. Élevé dans un environnement socialiste, Maurice Hintjens était, quant à lui, militant syndical. Des deux côtés, paternel et maternel, le cœur des familles penche à gauche.

    Le samedi 21 mai 1949, vers 15 heures, naît donc, à Ostende, le petit Arnold Charles Ernest Hintjens. Oui, Arnold, car l’état-civil ne retient pas Arno, encore l’un de ces prénoms fantasques imaginés par grand-mère Marie-Louise, celle qui avait prénommé l’une de ses filles Lucrèce. N’en déplaise au fonctionnaire communal, c’est Arno qui restera, et qui rentre à l’école primaire le 1er septembre 1955. C’est là que le petit garçon connaît son premier problème avec la société, car il ne croit pas à saint Nicolas ! Mais bien à la fille du Père Noël, comme on le verra plus tard…

    Arno aux fourneaux
    Pas à l’aise à l’athénée francophone, parmi les bourgeois catholiques qui ne sont pas son monde, en 1961, il se réoriente vers l’Institut technique communal d’Ostende (STIO), section hôtelière. Son père n’a pas voulu qu’il fasse une école d’art, mais qu’il apprenne un “vrai métier”. C’est ainsi qu’Arno deviendra chef adjoint faisant fonction dans le réputé restaurant La Renommée. S’il n’en fait pas carrière, il appréciera toujours cuisiner.

    Timide et renfermé, ayant hérité du bégaiement de sa grand-mère Marie-Louise, il prend rapidement une direction artistique : “Quand j’étais petit, je dessinais et je peignais beaucoup. Mon style est surréaliste, belge-flamand. Je suis un grand fan de Léon Spilliaert : ces couleurs, cette atmosphère !”, confie-t-il au journal De Morgen le 10 avril dernier.

    Rayon musique, il découvre Elvis Presley au début des années soixante, chez un ami où il y avait un pick-up et des disques. Mais c’est l’un de ses professeurs à l’école technique qui aura une influence décisive : lors de l’écoute d’un disque de Big Bill Broonzy en classe, Hubert Decleer raconte le blues et ses origines. “C’est ce qu’il veut faire dans la vie”, rapporte l’ancien prof, qui donne le 33 tours au jeune garçon. Arno a 13 ans.

    Comme une pierre qui roule
    Et c’est ce qu’il fera. “Like a Rolling Stone”, de Bob Dylan, est une autre révélation. Lui a-t-elle donné le goût de l’harmonica ? D’occasionnelle pendant ses études, la musique devient occupation principale après la rencontre avec le guitariste Paul “Couter” Decoutere (1949-2021), né à Izegem, ayant grandi à Knokke et à Zeebruges. Après un premier groupe, Freckle Face, qui se produira notamment au vélodrome d’Ostende en août 1971, les deux font la paire Tjens Couter, d’après leurs noms respectifs, avec deux albums à leur actif et déjà une réputation internationale via les tournées des collèges anglais.

    Le succès flamand, belge, français, européen vient avec TC Matic, formé en 1980 d’après les initiales de Tjens et Couter, en l’honneur du poète surréaliste serbe Dušan Matic qui vient de mourir. Déconcerté par l’abandon du blues au profit d’un rock carré, Paul Couter laisse la place à Jean-Marie Aerts. Quatre albums de 1981 à 1985, des hits avec “Oh La La La”, “Putain, Putain”, “Elle adore le noir”, Arno connaît le succès à 30 ans passés.

    Commence alors une carrière solo, riche en albums, tournées, rebondissements, incarnations diverses. Arno est signé chez Virgin Benelux par un Marc Thonon que la chanson “Jive to the Beat” éblouit. Avec l’album Charlatan (1988), il impose un personnage de dandy décadent, une voix rocailleuse de “Tom Waits à la belge” pour nos amis français, un style diversifié chanson rock blues, une puissance scénique atomique.

    Le fils du Père Fouettard
    Charlatan est fait de chansons personnelles (“Jive to the Beat”, “Bathroom Singer”, “Tango de la peau”), et d’une reprise phénoménale (“Le Bon Dieu”, du dernier album de Jacques Brel, le plus poignant). Il en sera ainsi toute sa carrière, émaillée de succès tels que “Vive la liberté” sous forme de slogan, “Les yeux de ma mère”, “Chic et pas cher”… Via ses grandes reprises, il s’approprie sans coup férir les plus grands, Adamo (“ Les filles du bord de mer”), Brel encore (“ Voir un ami pleurer”, toujours du dernier album), Jean-Roger Caussimon mis en musique par Léo Ferré (“ Comme à Ostende”), Julio Iglesias (“ Pauvres diables”, “Vous les femmes…”) Dutronc fondu enchaîné avec Bowie (“Jean Baltazaarrr”, avec Berverly Jo Scott, où l’on retrouve “La fille du Père Noël” fricotant avec “Jean Genie”).


    D’un bout à l’autre, Arno aura puisé son inspiration dans l’observation de l’être humain et du monde qui l’entoure : ce qu’il peignait et dessinait étant jeune, il l’a mis en mots, souvent fleuris, par la suite. Arno l’“ Ostendu”, tel qu’il s’est qualifié, a inventé un langage personnel, surréaliste, où les jeux de mots glissants, les allitérations, les sonorités sont source de créativité :

    “Donne-moi ta main
    Donne-moi du pain
    À demain Julien”
    (“ Ha ha”, TC Matic, Choco, 1983).

    Pas à l’abri de néologismes dérapants (“ Mon sissoyen”), l’homme s’invente aussi toute une série de personnages, comme autant de groupes, d’orientations musicales, souvent avec des références personnelles et familiales : Charles et les Lulus, Arno&the Subrovniks, Charles and the White Trash European Blues Connection, Roger, le chanteur de charme qu’il aurait aimé être et qu’en fait, il était… Cette multiplicité n’a pas empêché Arno de s’enfermer dans son personnage, souvent répétitif, régulièrement régressif. L’insatiable quête de liberté passait parfois par des détours déconcertants…

    Au-delà du plaisir qu’il eut à le triturer comme un poète décalé, pourquoi Arno a-t-il tant chanté en français ? Succès garanti à Paris et dans l’Hexagone bien évidemment. Mais aussi, vivant à Bruxelles, il a toujours défendu l’idée que, dans son enfance et sa jeunesse, Ostende était une ville bilingue français flamand, trilingue avec le dialecte local, plurilingue avec l’anglais, l’allemand et le reste. Quand on a la chance d’avoir 16 ans en 1965, les oreilles tournées vers la mer du Nord, d’où émet Radio Caroline, ça vous forge non seulement une personnalité, mais aussi des exigences. Dans sa jeunesse, Ostende était une ville portuaire libre, ouverte sur le monde.

    Où es-tu, Liberté ?
    Au fil du temps, pour lui, Ostende a perdu ce statut de symbole de la liberté. Il en est devenu nostalgique. Amusé et fier de passer pour “le Belge de service”, il était choqué qu’on lui demande si l’on parle encore français à Ostende. S’il ne laissait que rarement apparaître ses émotions, il a exprimé ses colères jusqu’au bout. Lors de la série de concerts donnnés à l’AB, fin janvier 2020, il s’est plu à mettre dans le même sac Jan Jambon, Donald Trump et Boris Johnson. Ses rêves d’adolescent épris de liberté brisés, Arno avait beau être devenu pessimiste, il n’a jamais baissé les bras, porté jusqu’au bout par la musique.

    Cette musique qui l’a libéré du bégaiement, cette musique qui est devenue, avec le public, son addiction, son adrénaline : “J’ai eu une vie heureuse, dit-il en avril 2021 au Morgen, grâce à la musique, j’ai vu le monde. Oui, je suis content.”

    La seule geôle dans laquelle il a pu s’enfermer, c’est son personnage.

+ Répondre à la discussion

Informations de la discussion

Utilisateur(s) sur cette discussion

Il y a actuellement 1 utilisateur(s) naviguant sur cette discussion. (0 utilisateur(s) et 1 invité(s))

     

Règles de messages

  • Vous ne pouvez pas créer de nouvelles discussions
  • Vous ne pouvez pas envoyer des réponses
  • Vous ne pouvez pas envoyer des pièces jointes
  • Vous ne pouvez pas modifier vos messages