Qui va écouter, le 9 novembre prochain à Pleyel, la création (française ?) du Mystère de Scriabine sous la direction de Laurent Petitgirard?
Moi, j'y serai. Je suis très curieux de découvrir cette dernière oeuvre de Scriabine inachevée.
Qui va écouter, le 9 novembre prochain à Pleyel, la création (française ?) du Mystère de Scriabine sous la direction de Laurent Petitgirard?
Moi, j'y serai. Je suis très curieux de découvrir cette dernière oeuvre de Scriabine inachevée.
Je crois qu'il y a confusion avec "L'acte préalable". Je n'ai jamais entendu parler du Mystère de Scriabine !
Gabriel.
Oh la la, désolé effectivement c'est Tabachnik qui dirige. La confusion vient du fait que j'avais voulu une fois écouter du Scriabine dirigé par Petitgirard (la saison dernière ?) et que comme ces places ont été prises à l'avance, mon Alzheimer s'est déclenché...
Sinon, quelle différence entre l'Acte prélable et le Mystère ?
Voilà la réponse donnée sur le site de Pleyel
PROGRAMME DU CONCERTL'Acte préalable (création)"Mystère" d'Alexandre Scriabine resté inachevé en 1914.Restitution de la partition par Alexandre Nemtine1er mouvement Entracte2ème mouvement Entracte3ème mouvement
Alexandre Nicolaievitch Scriabine meurt le 27 avril 1915 sans achever sa dernière œuvre : un projet monumental d’art total, retraçant l’histoire de l’univers et de l’humanité, symbolisant le processus du devenir et de la disparition du cosmos. Cette œuvre devait faire appel à toutes les perceptions sensorielles à la fois : poésie, danse, musique, arts plastiques, architecture, symphonie de lumières et de couleurs, caresses et parfums.
Au cours de l’été 1914 Scriabine achève la première version du texte de l’Acte Préalable, un poème de plus de 1 000 vers. Cette œuvre est un condensé du « Mystère », une sorte de rituel préparatoire. Scriabine n’a pas eu le temps d’en composer la musique, mais il laisse 53 pages d’esquisses musicales à partir desquelles Alexandre Nemtine (1936-1999) a pu mener son travail de composition-reconstitution. Dans le cadre du cycle Visions wagnériennes, le chef Michel Tabachnik et le Noord Nederlands Orkest et Concertkoor donneront en création française et en version de concert cette partition si originale.
Entre la personnalité du chef et le côté rituel mystique de l'oeuvre, vous ne trouvez pas que ça fait un mélange un petit peu trouble, non?
Apparemment, le concert est un tel fiasco que la salle pleyel OFFRE des places pour le concert de ce soir... ca parait assez hallucinant, mais c'est apparemment vrai.
Pour ceux qui n'ont rien à faire ce soir... il vous suffit de téléphoner pour réserver.
Pas encore de compte-rendu?
La salle était en effet au deux tiers vides... le second balcon fermé, des sièges vides aux autres niveaux. Après des concerts de Salonen à moitié vide en dehors du dernier, c'était vraiment déprimant de voir ca, même si l'orchestre a été très applaudi (à raison). Ca ne va pas inciter les orchestres à programmer des oeuvres originales, c'est vraiment dommage.
"Monumental" est un adjectif sans doute inventé pour cette oeuvre... 8 cors, 8 trompettes, vents par 4, un choeur, une oeuvre de 2 heures 40. Je l'avais entendue au disque, c'était assez imbuvable sur la longueur, en concert c'est tout à fait autre chose.
La première partie est la plus proche du Scriabin que l'on connait, souvent proche de Prométhée. Les deux autres parties utilisent une pulsation plus marquée, avec pas mal d'ostinatos qui lorgnent parfois vers Shostakovich, voire Stravinsky à certains moments de l'énorme danse du deuxième mouvement, mais l'univers harmonique est parfaitement Scriabinien tout le long. C'est rythmiquement que l'écriture s'éloigne le plus du Scriabin que l'on connait, avec des rythmes plus simples et moins "fluides" que dans Prométhée ou le Poème de l'extase, mais un côté obsédant différent (bien qu'on puisse l'entendre dans certaines des dernières pièces de Scriabin). L'orchestration utilise tout le temps ou presque la majorité de l'orchestre, avec des cuivres monumentaux, une masse orchestrale énorme, une texture qui fourmille... La tension est maintenue tout le long de l'oeuvre, c'est très impressionant.
En tout cas, malgré l'emploi d'anciennes pièces de Scriabin, ca ne fait jamais patchwork, et l'oeuvre ne parait pas longue, malgré ses 156 climax, à condition d'entrer dedans et d'aimer le style harmonique qui manque un peu de variété sur la longueur. La forme n'est pas toujours tenue, ca ne respire pas beaucoup, mais on est pas très loin de la troisième symphonie de ce côté là. La première partie notamment passe comme une lettre à la poste, elle m'a semblé très courte... Seule la dernière partie me semble un peu longue, moins inspirée, un peu répétitive, malgré le beau climax central.
Dans l'ensemble, l'oeuvre est imparfaite mais vraiment unique. Je ne sais pas s'il existe une seule oeuvre comparable dans le répertoire et c'est souvent d'une intensité rare. J'ai l'impression de dire des banalités tout le long, mais c'est sans doute avant tout une oeuvre à vivre, une expérience comme le voulait Scriabin.
En tout cas, pour ceux qui regrettaient le manque d'engagement de Salonen et LA, j'espère qu'ils étaient là ce soir! Il y avait bien quelques problèmes aux cuivres (pardonnables étant donné la durée et la difficulté de l'oeuvre), des problèmes d'équilibre dû au gigantisme de l'orchestration (piano difficile à entendre, choeur un peu noyé), mais l'orchestre s'est réfvélé avec un chef qui connaissait son affaire. J'avais beaucoup aimé Muti le mois dernier, mais ici c'était bien plus dans le style. On ne peut que les féliciter... ca sonnait vraiment bien. Dommage pour ces applaudissements enthousiastes mais clairsemés... ca méritait vraiment mieux.
En bref, un concert exceptionnel, dans tous les sens du terme étant donné qu'on est pas prêt de revoir ça en France.
Dernière modification par Kilgore Trout ; 10/11/2007 à 14h16.
Merci pour ce compte-rendu fidèle et détaillé.
J'étais moi aussi bien étonnée et déçue de voir la salle Pleyel aussi vide...et le public pas si chaleureux que ça, remettant déjà son manteau alors que les musiciens saluaient encore...
J'ai beaucoup aimé cette pièce, je regrette seulement une orchestration un peu épaisse, pas très originale, avec certains passages grandioses, un peu trop proches des Carmina Burana à mon goût.
Je ne connais pas la musique symphonique de Scriabine, en plus des influences que vous citez, j'ai pensé à Szymanowsky ou au Ravel de Daphnis (à cause des choeurs sans doute).
Mais on reconnaissait bien Scriabine dans les solos du piano, plus fluides, souvent impulsifs, comme improvisés.
Le style harmonique... oui, il se répète un peu, mais il est toujours en mouvance :disons qu'il se résume à un chromatisme exacerbé et à des intervalles toujours augmentés ou diminués !
Ce qui donne une musique hyper expressive et lyrique, très habitée, descriptive, souvent torturée, parfois étrange, que j'ai écoutée sans aucune lassitude malgré la durée.
Je pense que les indications de la partition sont de Scriabine, je les copie, car je les trouve très éloquentes :
Première partie : Univers
Lent, impérieux
Douloureux, déchirant
Étrange, charme
Flamboyant
Ondoyant – le rêve prend forme
Doux, frémissant
Volando
Più mosso – de plus en plus triomphant
Deuxième partie : Humanité
Giubiloso, extatique
Grandiose et énigmatique
Solennemente, Rituale
Déchirant – dedicazione
Religioso – mystérieusement – fermamente luminoso
Con timidezza – misterioso, concentré – avec une volupté radieuse – très dansant
Troisième partie : Transfiguration
Allegro con collera – lento timidamente – febbrilmente
Lent, vague, indécis
Très lent, contemplatif
Avec un intense désir
Infernale
Sublime
Con timidezza – con agitazione – con ira – con rabbia
Per enigmi, inafferrando
Contemplatif – supplicare – con lagrime – devoto
Misterioso, avec une ardeur profonde et voilée
Calme – extatique
Je crois que le concert a été enregistré ?..
Je crois que ca tenait aussi à la longue durée du concert... mais il y avait des fans qui ont tenu à faire durer les applaudissements . On ne peut que les en remercier!
J'avoue que le langage harmonique tellement différent m'empêche de penser à Carmina Burana. C'est certainement une orchestration superlative mais je trouve qu'elle s'accorde avec le propos et qu'elle n'est jamais de mauvais gout.
J'ai oublié de citer Szymanowski oui, notamment dans le solo de soprano de la dernière partie qui rapelle son Stabat Mater. Mais Szymanowski était lui-même très influencé par Scriabin alors...
Dodécaphonisme, mais pas tant de chromatisme que ca, il y a beaucoup de modes encore. Avec le recul, tenir ce style harmonique sur une si longue période sans ennuyer relève quand même du tour de force. Les oeuvres tonales non-dramatiques aussi longues sont déjà rares, alors une oeuvre atonale ou presque...
Etant donné que Scriabin n'a laissé aucune indication de forme en dehors du poème, je pense que ces indications sont de Nemtin. Mais il s'est certainement inspiré des indications des partitions de Scriabin...
Il y avait aussi des caméras (peu, c'était peut être pour un documentaire?). L'orchestre tourne avec cette pièce, on peut peut être espérer un disque d'un des concerts? Ca ne serait pas pour me déplaire.
Quand vous employez le terme "dommage" pour décrire la partie de votre message que j'ai citée, et - en particulier - les passages que j'ai mis en gras, vous donnez la preuve que vous êtes un garçon bien élevé, qui a le sens de l'understatement: et je le dis vraiment sans ironie et au premier degré.
J'aurais plutôt tendance à utiliser le même genre de propos, quant à moi, que ceux de Barthez sur les costards-cravates à la coupe du monde de football 1998, et ceux de Bernard Laporte (qui n'est pourtant pas mon pote, non plus ) sur les gens qui sifflaient Fred Michalak au Stade de France en 2005.
Il y a bien une tendance mortifère et malthusienne du public des so called "grandes salles de concert " à radoter toujours les mêmes choses.
Qu'est ce qui justifie que les trois premiers concerts de l'intégrale des symphonies de Sibelius soient à moitié vides?
La première symphonie a quand même été écrite en 1899: techniquement, il y a deux siècles !!!!
Une partie du public du TCE ou de Pleyel ou des salles équivalentes dans les "grandes" capitales musicales, j'ai envie de leur dire la même chose que ce que je réponds aux charmants créationnistes qui veulent que l'intelligent design soit enseigné dans les cours de science dans mes contrées: evolve !
Dernière modification par Tahar Mouslim ; 10/11/2007 à 16h30.
Je trouve que Kilogore Trout exagère en ce qui concerne l'affluence des concerts Salonen. Les premier et dernier étaient quasiment pleins. Ceux de lundi et mardi étaient un peu plus clairsemés mais pas à moitié vides.
Sur le fond, Tahar, vous avez raison: on ne programme pas assez souvent certaines oeuvres, trop souvent d'autres, que ce soit en symphonique ou en musique de chambre.
Cependant, permettez moi de vous dire que votre position pleine de bonnes intentions fait complètement abstraction de la réalité du public, et que si vous étiez programmateur avec l'obligation de remplir une salle sous peine de ne plus pouvoir programmer du tout faute de gens pour venir écouter et donc de subsides pour financer tout ça, vous vous renderiez très **** compte qu'il faut composer avec cette réalité. Pour l'avoir pratiqué pendant de nombreuses années, je peux vous dire que la seule manière de faire entendre des choses peu connues et sortant des sentiers battus, c'est de les programmer dans les mêmes concerts que les oeuvres qu'on "radote"... les mettre en sandwich entre deux desserts... Ou alors d'avoir un public 100% d'abonnés qui vous font une confiance aveugle parce que vous les avez déjà éduqués, et que vous connaissez aussi les limites de leurs attentes.
Bref, c'est beaucoup plus subtil que vous semblez l'imaginer.
Eh bien voilà qui change tout
Si on cherche à être moins négatif, on peut aussi se réjouir que cette oeuvre "hasardeuse" de Scriabine, qui nécessite un énorme effectif, soit programmée dans ce genre de salle.
Et peut-être se poser la question de la présentation ordinaire de ce concert dans la plaquette de Pleyel (il y en avait un peu plus dans celle de la Villette mais rien qui soulignait l'évènement et la création française), ce qui n'incite pas à la curiosité.
Bonjour Patricia.
Je ne suis pas sûr d'être en accord avec vous sur ce point là. Mon expérience au festival baroque de Pontoise confirme évidemment que le public préfèrerait que l'on programme Vivaldi, les Concertos brandebourgeois, le Messie et le Te Deum de Charpentier.
Nous nous refusons à cela, non par snobisme mais parce la mission du festival est de faire connaitre l'ensemble des courants de la musique baroque (et d'autres arts d'ailleurs). Faire venir le public, c'est aussi lui offrir des passerelles, à base d'animations pédadogiques ou par le biais de concepts de concerts un peu différents.
Ceci dit, j'écris cela sereinement, 3 semaines après la fin du festival, mais en plein coeur, j'étais fou furieux de ne voir une église que remplie à moitié pour ce qui fut le sommet de la programmation : les sonates du Rosaire de Biber par la sublime Mira Glodeanu qui, l'espoir de 2 soirées, a mis toute ma discographie de ces chefs d'oeuvre par terre.
Mais, pour le reste du festival, et compte tenu des difficultés mentionnées pour de nombreux concerts depuis le début de la saison, je pense pouvoir dire que, tout en maintenant un haut degré d'exigence sur la programmation, nous nous en sommes bien sortis avec des recettes supérieures de 12% par rapport à l'an dernier, pour un même nombre de manifestations et sans augmentation de prix.
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