+ Répondre à la discussion
Affichage des résultats 1 à 10 sur 10

Discussion: sonate D850 de Schubert

  1. #1
    Membre Avatar de françois1309
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Normandie
    Messages
    116

    sonate D850 de Schubert

    Elle passe parfois inaperçue, coincée qu'elle est entre la très beethovennienne d845 et la dernière trilogie des sonates. Et pourtant, elle est très bien servie au disque, et c'est l'une de mes préférées, toute imprégnée de l'air frais et de l'atmosphère élégiaque des vacances de Schubert à Bad Gastein.

    Brendel a, à mon avis, toujours raté cette sonate au disque. cette oeuvre limpide ne supporte pas le triturage et les sollicitations souvent un peu forcées que Brendel fait subir à la partition.

    J'ai un live roumain de Radu Lupu qui vient parfaitement combler la lacune de la série officielle chez Decca, mais sa sophistication et son lyrisme exacerbé ne me paraissent pas des plus convaincants ici.

    J'écoute surtout 3 versions:

    1/ Ashkenazy (Decca) nous en donne une lecture robuste, carrée, qui va droit à l'essentiel et ne surcharge pas cette oeuvre de signification. Il me paraît résoudre la quadrature du cercle posée par le dernier mouvement: éviter les excès de pittoresque (sonner comme un coucou autrichien), tout en conservant cet aspect rustique et satisfait, à l'opposé du schubert morbide qu'on nous sert trop souvent.

    2/ Andsnes (EMI) qui livre ici sa meilleure sonate de Schubert selon moi. Très proche d'Ashkenazy, sans prise de tête, solide et chantant

    3/ Gilels (RCA), très différent et moins "objectif" que les précédents. Vraiment puissant et beethovenien dans le 1er mouvement, et surtout fabuleuse lecture du 2ème mouvement: plus de 16 minutes, une longue et lente mélopée, pleine de redites, d'hésitations, de suspension: le Wanderer s'arrête, et doute de sa propre existence devant le spectacle de la nature, à la façon du héros de Senancour. Par contre, Gilels et sa sonorité de cathédrale me semble un peu empêtré dans le tic-tac du dernier mouvement...

    Voilà pour lancer la discussion!!!

  2. #2
    Membre Avatar de françois1309
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Normandie
    Messages
    116
    Voici les disques dont je parle:













  3. #3
    Membre Avatar de Theo B
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Paris
    Messages
    5 974
    C'est à peine croyable: j'ai passé tout mon dimanche après-midi hier à faire une écoute comparée de cette sonate!

    Nous n'avons eu le temps que de faire les deux premiers mouvements, ce qui est en même temps déjà assez ravageur.

    Il y avait dans l'ordre alphabétique:

    Andsnes (EMI, studio)
    Askhenazy (Decca, studio)
    Curzon (Decca, studio)
    Endres (Capriccio, studio)
    Gilels (RCA, studio)
    Goode (Nonesuch, studio)
    Kempff (DG, studio)

    Klien (Vox, studio)
    Richter (Praga, concert à Prague)
    Richter (Monitor, concert à Moscou)
    Schiff (Decca, studio)
    Schnabel (EMI, studio)

  4. #4
    Membre Avatar de Theo B
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Paris
    Messages
    5 974
    Bon, d'abord dans le I tout le monde fait la reprise, sauf Curzon.

    Tempi très différents (Schubert indique un simple Allegro). Cela va du Allegro con fuoco ou brio (les deux versions Richter, Askhenazy juste un poil moins rapide), au quasi Maestoso (Gilels).

    Andsnes, Schnabel sont dans la moyenne rapide aussi.

    Goode et Schiff ont été éliminés d'entrée: pas tenu, pas de fil conducteur, moyens pianistiqus en retrait des autres. Curzon, Endres, un peu juste aussi mais un peu plus intéressant. Klien et Kempff un peu mieux encore mais toujours un peu juste techniquement. Schnabel juste techniquement mais passionnant et même fascinant.

    Ceux qui dominent pianstiquement la chose: Andsnes, Askhenazy, Gilels, Richter les deux fois. Intellectuellement, les russes sont les plus impressionnants, la version me semblant la plus forte pour le moment étant Gilels, incroyable de puissance, de souffle et de hauteur de vue dans ce tempo lent mais totalement tenu.

    Deux juges de paix au moins ici, en dehors des aspects généraux (tenue rythmique, force, mobilité...): le passage si étrange poco piu lento, et celui juste après la reprise, ou presque tout le monde est en difficulté à la fois pour faire sonner les accords et pour phraser. Le thème pointé à la main gauche est terrible aussi: il y a ceux qui arrivent à tenir la croche pointée et donc à avoir le "style" et ceux qui n'y arrivent pas parce qu'ils ont déjà du mal à tenir la main droite...
    Dernière modification par Theo B ; 13/10/2008 à 15h50.

  5. #5
    Membre Avatar de Theo B
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Paris
    Messages
    5 974
    Second mouvement, là aussi on a des extrêmes, de dix minutes pour Kempff à seize pour Gilels!

    Ecoute en aveugle cette fois.

    J'ai été d'abord déçu par Askhenazy, je pensais qu'il tiendrait plus la distance après son excellent premier mouvement, mais en fait pas du tout; C'est prosaîque; Curzon c'est pire. Andsnes aussi.

    Klien, Endres, rapide et peu intéressants. Kempff, très rapide et un peu plus intéressant, beaucoup plus construit, mais je n'ai guère de plaisir à l'écouter ici. Schnabel, assez rapide et toujours passionnnat: il parle, il parle, c'est toujours senti, décontracté, tellement plein de vie et de sens... évidemment c'est discutable (le second thème!)

    Il ne reste plus que les ours d'Odessa, sans aucune surprise. Il faut dire que ce n'était pas très drôle, on les reconnaissait tout de suite, les autres aussi d'ailleurs (j'ai juste confondu Askhenazy et Curzon au début). Gilels est toujours très impressionnant, mais parfois il ralentit trop sur le troisième thème et vers la fin.
    Richter à Prague est un petit cran en dessous, Richter à Moscou met tout le monde d'accord: c'est absolu, tout y est, et personne n'arrive à faire sonner le piano comme cela. La même autorité et hauteur de vue que Gilels, mais encore plus tenu, tempo totalement fixe du début à la fin, force de concentration stupéfiante, et une minute de moins que Gilels à l'arrivée.

  6. #6
    Membre Avatar de thierry h
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Catalogne
    Messages
    4 360
    Si j'ai bien compris ma version Brendel je peux faire le discobole avec ? Sinon j'aime bien Gilels chez RCA...


  7. #7
    Co-Administrateur
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Messages
    1 056
    Deux versions à ajouter, mais malheureusement non rééditées :

    F. Wührer (Vox, au sein de son intégrale) et E. Istomin (CBS/Sony).

    F. Wührer est exceptionnellement rapide dans le deuxième mouvement (après tout, il est indiqué "con moto"), tandis qu'E. Istomin l'est dans le premier.

    Comme ça fait longtemps que je ne les ai pas réécouté, je ne me souviens plus d'autres caractéristiques, mais je sais qu'il s'agit de versions "qui comptent".

    Musicalement,
    l'obsédé-des-incunables

  8. #8
    Membre Avatar de Theo B
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Paris
    Messages
    5 974
    Citation Envoyé par françois1309 Voir le message
    Elle passe parfois inaperçue, coincée qu'elle est entre la très beethovennienne d845 et la dernière trilogie des sonates. Et pourtant, elle est très bien servie au disque, et c'est l'une de mes préférées, toute imprégnée de l'air frais et de l'atmosphère élégiaque des vacances de Schubert à Bad Gastein.

    J'ai un live roumain de Radu Lupu qui vient parfaitement combler la lacune de la série officielle chez Decca, mais sa sophistication et son lyrisme exacerbé ne me paraissent pas des plus convaincants ici.
    !
    Je vous réponds à contretemps, ce qui n'est guère courtois, pardonnez-moi!

    La Gastein n'est pas non plus la plus mal servie parmi les chefs d'œuvres. Elle est souvent couplée avec la D845 - il est dommage que Pollini d'ailleurs ne l'ait pas fait, à mon avis il avait les moyens de faire de grandes choses ici.

    Beaucoup moins mal servie que la Reliquie D840, déjà, et moins que la D894, qui est presque systématiquement massacrée parce que personne n'y est capable d'y tenir un tempo, et encore, on ne parle pas de "bon" tempo!


    Pour ce qui est de Lupu, je serais curieux de savoir à quoi ressemble votre live roumain, car Lupu m'a bouleversé l'an passé au Châtelet, malgré un premier mouvement un peu hésitant. Mais après quelques minutes pour rentrer dans son concert, ce qu'il a livré était transcendant, assez sophistiqué mais jamais maniéré. Pour reprendre l'expression d'un ami qui y était (et avec qui j'ai fait l'écoute comparée d'hier), Lupu, là où plus les autres avancent plus ils se perdent, lui s'y retrouvait.
    Le quatrième mouvement était à tomber.
    Dernière modification par Theo B ; 13/10/2008 à 17h58.

  9. #9
    Membre Avatar de françois1309
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Normandie
    Messages
    116
    Citation Envoyé par Theo B Voir le message
    Je vous réponds à contretemps, ce qui n'est guère courtois, pardonnez-moi!

    La Gastein n'est pas non plus la plus mal servie parmi les chefs d'oeuvres. Elle est souvent couplée avec la D845 - il est dommage que Pollini d'ailleurs ne l'ait pas fait, à mon avis il avait les moyens de faire de grandes choses ici.
    Beaucoup moins que la Reliquie D840, déjà, et moins que la D894, qu est presque systématiquement massacrée parce que personne n'y est capable d'y tenir un tempo, et encore, on ne parle pas de "bon" tempo!


    Pour ce qui est de Lupu, je serais curieux de savoir à quoi ressemble votre live roumain, car Lupu m'a bouleversé l'an passé au Châtelet, malgré un premier mouvement un peu hésitant. Mais après quelques minutes pour rentrer dans son concert, ce qu'il a livré était transcendant, assez sophistiqué mais jamais maniéré. Pour reprendre l'expression d'un ami qui y était (et avec qui j'ai fait l'écoute comparée d'hier), Lupu, là où plus les autres avancent plus ils se perdent, lui s'y retrouvait.
    Le quatrième mouvement était à tomber.





    Salut Theo,

    La conception que Lupu a de cette sonate n'a pas du énormement changé d'après ce que vous dites du concert. Hésitations dans le 1er mouvement qui manque un peu d'allant, superbe mouvement lent avec des nuances d'une tendresse infinie, sens du rythme et de la structure dans les derniers mouvements.

    Envoyez moi un mail si vous voulez entendre cela...

  10. #10
    Membre
    Date d'inscription
    octobre 2007
    Localisation
    Utrecht, Pays Bas
    Messages
    123
    Citation Envoyé par françois1309 Voir le message
    Elle passe parfois inaperçue, coincée qu'elle est entre la très beethovennienne d845 et la dernière trilogie des sonates. Et pourtant, elle est très bien servie au disque, et c'est l'une de mes préférées, toute imprégnée de l'air frais et de l'atmosphère élégiaque des vacances de Schubert à Bad Gastein.

    Brendel a, à mon avis, toujours raté cette sonate au disque. cette oeuvre limpide ne supporte pas le triturage et les sollicitations souvent un peu forcées que Brendel fait subir à la partition.

    J'ai un live roumain de Radu Lupu qui vient parfaitement combler la lacune de la série officielle chez Decca, mais sa sophistication et son lyrisme exacerbé ne me paraissent pas des plus convaincants ici.

    J'écoute surtout 3 versions:

    1/ Ashkenazy (Decca) nous en donne une lecture robuste, carrée, qui va droit à l'essentiel et ne surcharge pas cette oeuvre de signification. Il me paraît résoudre la quadrature du cercle posée par le dernier mouvement: éviter les excès de pittoresque (sonner comme un coucou autrichien), tout en conservant cet aspect rustique et satisfait, à l'opposé du schubert morbide qu'on nous sert trop souvent.

    2/ Andsnes (EMI) qui livre ici sa meilleure sonate de Schubert selon moi. Très proche d'Ashkenazy, sans prise de tête, solide et chantant

    3/ Gilels (RCA), très différent et moins "objectif" que les précédents. Vraiment puissant et beethovenien dans le 1er mouvement, et surtout fabuleuse lecture du 2ème mouvement: plus de 16 minutes, une longue et lente mélopée, pleine de redites, d'hésitations, de suspension: le Wanderer s'arrête, et doute de sa propre existence devant le spectacle de la nature, à la façon du héros de Senancour. Par contre, Gilels et sa sonorité de cathédrale me semble un peu empêtré dans le tic-tac du dernier mouvement...

    Voilà pour lancer la discussion!!!
    Bonjour François,

    d'accord avec votre sélection en ce qui concerne Ashkenazy et Gilels, que je possède tous les deux aussi. Je ne connais pas Andsnes dans cette sonate précise, mais je ne doute pas qu'il y soit excellent. Sinon, je pense à Zacharias qui a laissé une intégrale Schubert réussie et à la pianiste anglaise Imogen Cooper, qui a enrégistré un cycle Schubert dont cette sonate. Une version sobre qui va droit à l'essentiel sans oublier la poésie.

    Amicalement,
    Willem

+ Répondre à la discussion

Informations de la discussion

Utilisateur(s) sur cette discussion

Il y a actuellement 1 utilisateur(s) naviguant sur cette discussion. (0 utilisateur(s) et 1 invité(s))

     

Règles de messages

  • Vous ne pouvez pas créer de nouvelles discussions
  • Vous ne pouvez pas envoyer des réponses
  • Vous ne pouvez pas envoyer des pièces jointes
  • Vous ne pouvez pas modifier vos messages