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Discussion: Phil Glass

  1. #21
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    Je pense que le génie de Ives consiste en partie à se saisir de ces matériaux divers, hétéroclites ou inassimilables, littéralement parlant, sans les contraindre ni chercher à les intégrer, mais en les laissant résonner dans un véritable espace poly-stylistique. Admettons qu'il s'agisse de "collage" musical - mais le terme sent un peu trop le procédé, tout prêt à être breveté et récupéré par des hordes d'épigones. Ce qu'il faut remarquer, c'est qu'il s'agit chez Ives d'un parti pris qui est tout le contraire d'un pluralisme esthétique, ce pluralisme même qui caractérise la fin du XXe siècle. À cet égard Ives n'a pas eu de devanciers (je suis d'accord sur ce point) et encore moins de successeurs. En ce sens son œuvre relève aussi bien de l'utopie que de l'uchronie.
    Ce n'est pas du collage. Le fondement des expérimentations de Ives, c'est de prendre un choral basique, et de se demander "et si la voix du dessous était dans une autre tonalité que celle du dessus?". Et cela ne le quittera pas, à tel point que toute sa musique se développe sur cette simple idée, qui est celle de la polyphonie, mais une polyphonie totalement libérée des règles et où le principe d'indépendance des voix est poussé au maximum. Des premières fugues à quatre voix en quatre tonalités différentes, on se retrouve avec une polyphonie qui est constituée de voix totalement indépendantes non seulement harmoniquement et rythmiquement, mais aussi stylistiquement, avec par exemple au-dessus une fanfare, tout en bas une voix qui utilise le total chromatique, et au milieu des agrégats de cordes et d'autres fragments d'hymnes aux vents. Ce n'est pas du collage, c'est de la polyphonie mais conçue dans une liberté totale, les voix tendant à avoir chacune leur propre source et leur propre système.
    De fait, le "postylisme" ou l'impression "d'entendre dans la même rue un Big Band, un guitariste de Blues et les échos de gospels de l'église" ne naissent pas de "l'extérieur vers l'intérieur", des idées musicales à la structure, de l'élément sourcé à l'organisation formelle qui fonctionnerait par superposition et accumulation, mais l'inverse, de la pensée de la structure à la réalisation particulière. C'est ce que j'entends par dégénérescence des règles contrapuntiques : il conserve fondamentalement l'idée de polyphonie mais la transcende en la libérant des contraintes de l'harmonie et des carrures traditionnels. Ce ne sont pas simplement des éléments collés les uns au-dessus des autres pour donner une impression de la vie moderne où des éléments hétérogènes cohabitent (même s'il y a aussi de ca), c'est une forme où le principe de cohabitation surpasse les éléments individuels qui n'en existent pas moins dans leur ipséité, et c'est bien là le principe de la polyphonie : c'est pour ca que dans les oeuvres les plus avancées ce n'est souvent pas la mélodie "du dessus" qui est intéressante, mais ce qui se passe dans les voix médianes, avec des plans souvent atonaux ou chromatiques qui complètent, structurent et détournent les éléments plus évidents et plus diatoniques.
    C'est important à mon sens pour comprendre comment un type pareil peut émerger et se mettre dans les années 10 à imaginer des orchestres spatialisés. Et il faudrait mettre ça en perspective avec les résurgences de son intérêt pour le transcendantalisme et les tension entre libéralisme et spiritualité dans l'art américain de la fin du XIXème.

    Du coup, si successeur il a, plutôt que chez les post-modernes adeptes des collages stylistiques, il faut les chercher chez ceux qui étendent et repensent la structure de la polyphonie... par exemple Xenakis, qui a aussi cherché dans de nouvelles formes de polyphonie un moyen de rendre compte de phénomènes sonores usuels, les phénomènes naturels. Je retrouve chez eux cette même idée de l'écoute du monde associée à une expérimentation radicale au sein systèmes mais tempérée par une pensée globalisante.

    Enfin c'est juste une piste, Ives est un compositeur d'une richesse très rare.
    Dernière modification par Kilgore Trout ; 29/10/2009 à 02h30.

  2. #22
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    D'accord encore une fois, mais ce que vous décrivez ("c'est de la polyphonie mais conçue dans une liberté totale, les voix tendant à avoir chacune leur propre source et leur propre système") fait tout de même penser au genre du motet où, à l'origine, les textes des différentes voix peuvent être indépendants les uns des autres. Ives a étendu le procédé.
    Quant à savoir ce qui a bien pu le pousser à penser ainsi la musique, avec la même liberté et la même inventivité formelle que les compositeurs de la fin du Moyen Âge, c'est en effet un mystère.

  3. #23
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    J'ai trouvé quelques vidéos; Hideux demandait dans un autre fil un top 10 des oeuvres de Glass, voici son voeu exaucé - pour moi le concerto pour violon est sans aucun doute possible dans ce top 10. Il y a, à mon avis, 3 oeuvres dans lesquelles Glass est parvenu à un langage parfaitement équilibré entre son penchant expérimental un peu extrémiste à la Cage (Music with Changing Parts", "Music in Twelve Parts", "Music in Contrary Motion" etc) et l'esprit de séduction sonore de ses oeuvres les plus immédiates (musique de film et symphonies), ce sont le concerto pour violon, le concerto pour quatuor de saxophones et le quatuor n°2. Il y a un climat de fatalisme et de résignation que pour ma part je trouve extrêmement poignant - et qui est tout à fait unique. Ici un extrait du Concerto pour violon (1987) dans la version de Gidon Kremer



    Autre pépite dans le même esprit, quoique moins connu : le Concerto pour quatuor de saxophones (1995) :



    et enfin le Quatuor n°2 "Company" (1983) qui est, pour moi, le meilleur, car à la fois le plus dense, le plus économe de moyens et le plus poignant (certainement la version Kronos ici) :



    Sinon, dans ce top 10 j'aurais certainement inclus Mad Rush (1979) mais dans la version pour orgue uniquement (l'écriture de Glass est nettement mieux adaptée à l'orgue qu'au piano). Ici le climat est plutôt onirique et dépassionné - l'absence de passion et de toute forme d'emportement est très caractéristique de la musique de Glass.



    Sinon évidemment les opéras - j'y reviendrai plus en détails. Einstein on the Beach (1976), oeuvre-phare de sa production et celle qui a largement contribué à le faire connaître. Elle est en outre très révélatrice du côté innovant de son oeuvre au-delà du strict point de vue rythmique/harmonique/(a)mélodique/orchestral ; la mise en scène, l'agencement, et la langue de ses opéras sont sans équivalents. Dans Einstein on the Beach, il n'y a pas d'intrigue linéaire, pas de narration, mais une série "d'événements" entrecoupés de séquences appelées "Knee Plays", le protagoniste principal (Einstein) n'est pas un chanteur mais un violoncelle, le texte est un patchwork de citations diverses, et parfois les parties vocales ne sont que des sons phonétiques simples. Ici un très bel extrait de cette oeuvre qui donne une idée de ce que je viens de raconter :



    J'ajouterai la magnifique musique du documentaire Koyaanisqatsi (1982), dont parlait Tahar :



    Ensuite, le fruit de sa collaboration avec le groupe brésilien Uakti avec leurs percussions chromatiques en tous genres, dont voici deux extraits assez significatifs :






    Et pour les 3 derniers de cette sélection j'aurais choisi les oeuvres suivantes (dont je n'ai trouvé aucun extrait sur internet) :

    - Music in 12 Parts (1974)
    - Orion (2004)
    - Undertow (2004) - musique de film

  4. 31/10/2009 00h27
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  5. #24
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    j'ai été très studieux ce soir, j'ai tout bien écouté les extraits que tu nous proposes... Voila... j'ai tout bien écouté... et maintenant j'ai des picotements dans les jambes... Faut que j'écoute Ives ( exemple pris au hasard ) pour que les picotements cessent...


  6. #25
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    fais du vélo plutôt

  7. #26
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  8. #27
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    j'ai été très studieux ce soir, j'ai tout bien écouté les extraits que tu nous proposes... Voila... j'ai tout bien écouté... et maintenant j'ai des picotements dans les jambes... Faut que j'écoute Ives ( exemple pris au hasard ) pour que les picotements cessent...

    Pour le moment je n'ai écouté que l'extrait du concerto pour violon, et je crois que je vais avoir du mal à poursuivre.
    Je trouve ça vain et très "commercial", pour reprendre un qualificatif de Gilles.
    Jean parlait plus haut de la différence entre écoute en direct et écoute au disque et faisait allusion au concerto de Feldman joué il y a quelques jours au Châtelet.
    J'y étais, et si tenir une heure sans décrocher n'était pas si facile, j'ai entendu une matière musicale autrement plus riche que dans cette oeuvre de Glass.
    Décidément, je crois que je ne suis pas faite pour la musique répétitive...
    Dernière modification par Chiarina ; 01/11/2009 à 00h10.

  9. #28
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    Bonjour Chiarina, je savais que vous n'aimeriez pas

    "commercial" ou "facile" ou "immédiat" etc, les qualificatifs ne manquent pas. Mais pour moi, refuser une oeuvre uniquement parce qu'elle est "commerciale" c'est la refuser sur la base d'un critère extra-musical.

    Je trouve par exemple très frappant de constater que certaines pièces du premier piano romantique, de Schumann, Schubert, Chopin, etc, sont bien plus "faciles", "immédiates" et jouent bien plus sur la corde sensible que les oeuvres de Glass. Mais ça on ne le reconnaîtra jamais...Tout est donc question de conditionnement.

    De mon point de vue, une matière musicale n'a pas à être "riche", elle a à être personnelle, à construire un univers sonore. Son degré de complexité technique est un aspect tout à fait annexe ; il m'est arrivé d'entendre des choses magnifiques chez Nyman et chez Bryars, qui eux sont intégralement dans le registre commercial. A l'inverse j'ai entendu parfois des choses très ardues et pas du tout commerciales qui étaient pour moi des nullités. Il n'y a pas de corrélation entre l'intérêt d'une oeuvre et son caractère plus ou moins commercial, (c'est-à-dire plus ou moins "populaire").

    Mais le monde du "classique" a horreur du "populaire" et l'anti-élitisme radical de Glass perturbe profondément le paysage. C'est d'ailleurs le paradoxe : c'est une musique facile d'accès, et que le public des mélomanes classique (en France surtout), refuse précisément parce qu'il n'y a pas assez d'entraves et de barrières pour la comprendre. Ca en dit long, je trouve.

  10. #29
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    Mais le monde du "classique" a horreur du "populaire" et l'anti-élitisme radical de Glass perturbe profondément le paysage. C'est d'ailleurs le paradoxe : c'est une musique facile d'accès, et que le public des mélomanes classique (en France surtout), refuse précisément parce qu'il n'y a pas assez d'entraves et de barrières pour la comprendre. Ca en dit long, je trouve.

    Le public des mélomanes classique aime au contraire les artistes populaires comme Karajan, Maurice André, Callas, Dudamel, Alagna ! C'est juste une bande d'happy few dont je fais partie qui vont soit préférer Rihm soit préférer Glass, soit les deux ! Et tout ce petit monde ne pèse pas lourd face au public populaire qui achète à pleines brassées en ce moment les compils musicales d'une radio célèbre dans une boutique célèbre... et ce n'est pas forcément de la gnognotte !


  11. #30
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Le public des mélomanes classique aime au contraire les artistes populaires comme Karajan, Maurice André, Callas, Dudamel, Alagna ! C'est juste une bande d'happy few dont je fais partie qui vont soit préférer Rihm soit préférer Glass, soit les deux ! Et tout ce petit monde ne pèse pas lourd face au public populaire qui achète à pleines brassées en ce moment les compils musicales d'une radio célèbre dans une boutique célèbre... et ce n'est pas forcément de la gnognotte !

    Petit mot pour dire combien j'admire cette discussion exemplaire sur le cas de Philip Glass qui est parvenu pour le moment à rester digne et à susciter une très intéressante mise au point sur Ives. J'espère que cela va se poursuivre.
    Justement, parlons-en de ce qui est commercial et ce qui ne l'est pas: et je ne pense pas que Glass soit justement un produit commercial du type Alagna, loin de là, lorsque l'on sait les réserves, voire les critiques, dont il fait l'objet: trop cérébral pour le public disons habitué au consensuel, trop simpliste pour l'esthète. L'on voudrait que Glass soit l'ordinaire des intello-branchouilles. Or, je ne pense pas exactement que cela se passe ainsi.
    On aime ou l'on n'aime pas, soit. Dans son cas à lui, on adhère ou on adhère pas à l'esthétique proposée, a priori simple, souvent plus complexe que l'on s'y attend. Glass cite souvent l'exemple de chefs d'orchestre qui pensent se dispenser de lire les partitions avant les répétitions et qui découvrent souvent interloqués la réalité de la chose: il s'en ouvre dans le documentaire qui lui a été récemment consacré par je ne sais plus qui mais qui est paru en DVD.
    Personnellement, je me souviens de ma réaction le jour où j'en ai entendu pour la première fois (c'était le concerto pour violon) : "mais quand est-ce que ce truc va bien vouloir finir?" Rejet total.
    Puis un jour, des années plus tard fortuitement, le final de la 3e symphonie passe sur France-Mu sans que je sache que c'est du Glass: surprise tout aussi profonde. J'achète le disque (Naxos-Alsop, en l'occurrence) en me disant que ce sera sans doute le premier, puis à la force des choses, on souhaite toujours aller plus loin.
    Inutile de se forcer, d'aller à l'encontre de soi-même, j'ai toujours du mal à expliquer pourquoi ce type de langage m'a finalement plu.
    Reconnaissons tout de même que c'est justement une musique que peu de compositeurs peuvent "imiter" sans donner immédiatement au plagiat et que ce qu'il a osé lui, personne ne sera en mesure de le refaire. Il est vrai qu'on reconnaît plus souvent à l'aveugle du Glass que du Rihm, mais c'est aussi aux risques et périls du compositeur.
    Mais une chose est sûre, si c'était aussi insignifiant qu'on le prétend parfois, il n'y aurait pas eu autant de discussions passionnées.

    N.B. Il y a eu d'excellents concerts Glass à la Cité de la Musique, comme quoi il ne fait pas tâche au milieu des post-Darmstadt tendance électro-spectro-aléatoires...

  12. #31
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Le public des mélomanes classique aime au contraire les artistes populaires comme Karajan, Maurice André, Callas, Dudamel, Alagna ! C'est juste une bande d'happy few dont je fais partie qui vont soit préférer Rihm soit préférer Glass, soit les deux ! Et tout ce petit monde ne pèse pas lourd face au public populaire qui achète à pleines brassées en ce moment les compils musicales d'une radio célèbre dans une boutique célèbre... et ce n'est pas forcément de la gnognotte !

    Pas faux...



    puff puff...pas faux...

    J'écoutais justement le Concerto de Québec hier soir, suite à la discussion qui avait eu lieu au sujet d'André Mathieu sur un autre fil, c'était très joli d'ailleurs, mais je me disais qu'en fait c'est plutôt ce genre de chose qui est VRAIMENT populaire.

  13. #32
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    Citation Envoyé par Vincent H Voir le message
    Petit mot pour dire combien j'admire cette discussion exemplaire sur le cas de Philip Glass qui est parvenu pour le moment à rester digne et à susciter une très intéressante mise au point sur Ives. J'espère que cela va se poursuivre.
    J'en suis le premier (agréablement) surpris. Ce n'est pas exactement l'expérience que j'avais des discussions sur le sujet - je résiste à mettre en lien celle que j'ai eue sur un forum concurrent, mais c'est tellement édifiant que je vais finir par céder.

    Ceci dit je compte bien un jour ouvrir le débat sur Nyman et Bryars, et là ce sera sans doute moins évident


    Citation Envoyé par Vincent H Voir le message
    Personnellement, je me souviens de ma réaction le jour où j'en ai entendu pour la première fois (c'était le concerto pour violon) : "mais quand est-ce que ce truc va bien vouloir finir?" Rejet total.
    Moi c'était "Company" dans l'émission de Bruno Letort sur FM et dont j'ai oublié le nom; c'était il y a assez longtemps, et c'était la seule émission où l'on entendait la nouvelle musique américaine (j'y ai aussi découvert Daugherty, Feldman, Torke, Reich, Riley etc.).

    Citation Envoyé par Vincent H Voir le message
    Reconnaissons tout de même que c'est justement une musique que peu de compositeurs peuvent "imiter" sans donner immédiatement au plagiat et que ce qu'il a osé lui, personne ne sera en mesure de le refaire.
    C'est un des aspects les plus étonnants de sa musique, ça n'a pas du tout facile à imiter, car il n'y a pas de mélodie ni de thème à proprement parler, et trouver un motif intéressant que l'on puisse reproduire ad libitum n'est pas vraiment évident.

  14. #33
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    l'absence de passion et de toute forme d'emportement est très caractéristique de la musique de Glass.

    Eh bien, même cela, je n'en suis pas si certain, surtout en matière de passion.

    L'exemple le plus frappant, c'est l'opéra O Corvo Branco, dont on trouve 4 extraits sur YouTube de la production madrilène, qui reprenait la production de la première de Lisbonne.

    J'ai choisi deux extraits pour illustrer comment la passion peut s'exprimer chez Phil Glass.

    Le prologue de l'acte I d'abord:



    et la première de l'acte III, à la court du roi du Portugal:



    mais aussi une certaine forme d'emportement dans le développement du prologue.
    Dernière modification par Tahar Mouslim ; 01/11/2009 à 15h43.

  15. #34
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    Personnellement, je me souviens de ma réaction le jour où j'en ai entendu pour la première fois (c'était le concerto pour violon) : "mais quand est-ce que ce truc va bien vouloir finir?" Rejet total.

    Heu... Je me demande plutôt : "quand est-ce que ce truc va bien vouloir commencer " ?


  16. #35
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Heu... Je me demande plutôt : "quand est-ce que ce truc va bien vouloir commencer " ?

    Ca me rappelle un épisode des Simpson où Milhouse et Bart écoutent du Miles Davis et que l'un d'eux demande, après une dizaine de minutes : "mais quand est-ce qu'il commence à chanter ?".


  17. #36
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    Il y a un autre épisode où la Salle de la Philharmonie de Springfield se vide en quelques minutes après que l'on annonce "un potpourri des oeuvres de Phil Glass". Grosse panique des spectateurs...

  18. #37
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    Et dans la VF, c'est un pot pourri d'oeuvres de Pierre Boulez, non?

  19. #38
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    Citation Envoyé par Couack Voir le message
    Ca me rappelle un épisode des Simpson où Milhouse et Bart écoutent du Miles Davis et que l'un d'eux demande, après une dizaine de minutes : "mais quand est-ce qu'il commence à chanter ?".

    Avant son opération des cordes vocales au milieu des années 50 Miles avait une très belles voix... après tout le monde la connait : c'est celle d'un fumeur de Boyards !

    Je sais, rien à voir avec monsieur Glass !

  20. #39
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    Bonjour Chiarina, je savais que vous n'aimeriez pas

    "commercial" ou "facile" ou "immédiat" etc, les qualificatifs ne manquent pas. Mais pour moi, refuser une oeuvre uniquement parce qu'elle est "commerciale" c'est la refuser sur la base d'un critère extra-musical.

    Je trouve par exemple très frappant de constater que certaines pièces du premier piano romantique, de Schumann, Schubert, Chopin, etc, sont bien plus "faciles", "immédiates" et jouent bien plus sur la corde sensible que les oeuvres de Glass. Mais ça on ne le reconnaîtra jamais...Tout est donc question de conditionnement.

    De mon point de vue, une matière musicale n'a pas à être "riche", elle a à être personnelle, à construire un univers sonore. Son degré de complexité technique est un aspect tout à fait annexe ; il m'est arrivé d'entendre des choses magnifiques chez Nyman et chez Bryars, qui eux sont intégralement dans le registre commercial. A l'inverse j'ai entendu parfois des choses très ardues et pas du tout commerciales qui étaient pour moi des nullités. Il n'y a pas de corrélation entre l'intérêt d'une oeuvre et son caractère plus ou moins commercial, (c'est-à-dire plus ou moins "populaire").

    Mais le monde du "classique" a horreur du "populaire" et l'anti-élitisme radical de Glass perturbe profondément le paysage. C'est d'ailleurs le paradoxe : c'est une musique facile d'accès, et que le public des mélomanes classique (en France surtout), refuse précisément parce qu'il n'y a pas assez d'entraves et de barrières pour la comprendre. Ca en dit long, je trouve.

    Je continue ma lente incursion dans l'oeuvre de Philip Glass:
    Là, je réécoute des extraits de Company, curieusement, ça passe mieux qu'à la première écoute, malgré ce petit côté Yann Tiersen amélioré (je sens que certains vont s'étrangler !) sans doute dû au matériau harmonique qui semble se limiter à trois ou quatre accords. C'est sans doute la richesse rythmique évoquée par Vincent, ou la répartition entre les instruments, qui fait que ça réussit à sonner avec un certain relief.
    J'ai écouté des extraits de Mishima également, mais je sens que la durée est une donnée importante d'appréciation et je n'ai que quelques minutes à disposition....
    Je suis d'accord avec Tahar sur la tension dans l'opéra dont il a parlé, le côté scénique y contribue sans doute. Quel en est l'argument ? Il y a des moments du prologue qui m' évoquent le Satie de Parade !

    Sinon, je voulais préciser que le mot "commercial" avait dans cette discussion un sens musical, j'entendais par là l'application de schémas ou de "recettes" éprouvées et efficaces, et donc dupliquées et répétées autant que possible. C'est un peu l'impression qu'on peut avoir à la première écoute de ce style de musique. Et ce n'est pas pour rien qu'il a été tant copié ensuite pour des musiques de film ou d'accompagnement....

    La notion d'immédiateté ou de "séduction" sonore me semble autre encore, elle est très subjective, et peut cacher une réelle force ou science d'écriture (Beethoven évidemment, ou Schubert, pour d'autres raisons)

    Enfin, je ne suis pas sûre d'être d'accord sur cette notion d'univers sonore "personnel" qui primerait sur le reste et que Gilles a déjà évoqué à propos de Rodrigo (qui en aurait donc un) ou de Berio (qui n'en aurait pas), pardon si je schématise !
    Est-ce qu'un compositeur qui se forge un style, un univers personnel, et y reste, quitte donner l'impression de se répéter parfois, a plus de talent ou de personnalité que celui qui touche à tout et est plus ouvert aux influences extérieures même s'il évolue avec plus ou moins de réussite ?
    Je n'ai pas la réponse, et cela me semble plus difficile à évaluer en musique qu'en peinture ou en cinéma.
    Dernière modification par Chiarina ; 04/11/2009 à 00h06.

  21. #40
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    Je suis d'accord avec Tahar sur la tension dans l'opéra dont il a parlé, le côté scénique y contribue sans doute. Quel en est l'argument ? Il y a des moments du prologue qui m' évoquent le Satie de Parade !

    O Corvo Branco est à mon sens l'un des épisodes les plus réussis de la longue collaboration entre Phil Glass et Bob Wilson.

    En 1998, au moment de l'Exposition Universelle à Lisbonne qui commémorait 500 ans d'exploration portugaise, et qui a vu l'inauguration du magnifique pont Vasco de Gama, la cité a commissionné les deux compères pour un opéra sur le thème du retour de Vasco de Gama au Portugal après ses expéditions en Afrique et en Inde dans les années 1490.

    C'est un opéra très onirique, avec des costumes et des décors superbes et une intrigue proche de celle du Magicien d'Oz ou des livres de Maurice Sendak.

    En matière de musique, c'est à mon sens le chef d'oeuvre du compositeur, car c'est une musique à multiples dimensions, y compris celles qu'on n'associe pas - comme ce fil le montre - à sa musique, comme la passion et l'emportement.

    La production a été reprise plusieurs fois, à Madrid et au Lincoln Center de New York notamment.

    A New York, l'oeuvre avait repris son titre anglais The White Raven.

    Les grands explorateurs sont un thème qui a toujours inspiré et fasciné le compositeur.

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