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Discussion: Gustav Mahler

  1. #21
    Membre Avatar de Jacques
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    Citation Envoyé par Vincent H Voir le message
    Je n'ai jamais pu supporter Kathleen Ferrier plus de trois minutes, allez savoir pourquoi, et particulièrement dans les Kindertotenlieder d'un pathos incroyablement artificiel (me rappelle les stridulations des chouettes); c'est dire si je ne porte pas cette version du Chant de la Terre dans mon coeur et lui préfère de très loin l'autre, celle de Klemperer, réalisée dans de difficiles conditions (euphémisme) avec Wunderlich et Ludwig.
    Vincent () a fait ci-dessus un aveu que j'hésitais à faire moi-même, car mon entourage est plein de gens qui idolâtrent Kathleen Ferrier, la rendant en quelque sorte inattaquable. Mais je suis content de voir qu'il est du même avis que moi . Quoi qu'il en soit, j'ai toujours eu du mal avec les voix féminines très graves, tout comme avec les voix masculines très hautes (en d'autres termes, je ne suis un "fan" ni des contraltos, ni des contre-ténors).

    Cela dit, je reviens un peu "comme grêle après vendanges" avec le message que je venais de préparer () avant de découvrir les posts ajoutés dans l'intervalle...

    S'il est difficile de rendre compte des symphonies de Mahler, ce l'est encore bien davantage, je crois, de ses grands cycles pour voix et orchestre : les Lieder eines fahrenden Gesellen (1884), Des Knaben Wunderhorn (1892/1899), les Rückert-Lieder (1901/1902), les Kindertotenlieder (1905) et Das Lied von der Erde (1908). Dans sa présentation succinte de quatre d'entre eux figurant sur le livret joint à un double album EMI paru en 1990, Philippe Mougeot s'y est toutefois risqué dans les termes - très "lyriques" - qui suivent :

    "Les (...) œuvres ici réunies retracent l'itinéraire douloureux d'une âme déchirée entre le sentiment de sa finitude et son exigence d'absolu; écartelée entre la conscience de son impuissance et la certitude que «rien ne peut décourager l'appétit de divinité au cœur de l'homme»; en quête d'une unité tardivement réalisée dans la communication avec une Nature à laquelle Dieu est immanent. Cet affrontement de toute une vie à sa solitude fondamentale, Mahler l'éprouva douloureusement : «trois fois apatride ! Bohémien en Autriche, Autrichien en Allemagne - et Juif dans le monde entier !» Sa terre promise, il l'atteint donc hors de l'univers terrestre : ce sera la Musique; son identité, il la trouve dans ses réalisations «hors norme» de Lieder symphoniques et de Symphonie-lieder, et dans cette écriture sans exemple : collage de bouleversantes lignes mélodiques et de brefs motifs impressionnistes, de gigantesques tutti et de formations réduites, évoluant toujours plus vers l'individualisation des pupitres, sans que jamais la cohésion de l'ensemble n'en souffre, tant, à chaque instant, la matière sonore est adéquate à la pensée ou au texte.

    De ce style, l'équilibre est d'emblée atteint avec les Lieder eines fahrenden Gesellen (1884) où Mahler musicien est au service de Mahler poète (seul le premier texte n'est pas de lui) : l'orchestre, encore imposant mais subitement diversifié, peut ainsi nimber de lumière irréelle la lancinante complainte du mal-aimé (1), dessiner le sourire de la nature (2), plonger au plus noir de la détresse (3) ou peindre, en teintes hivernales, l'abattement d'un cœur sans espoir (4).

    Avec Des Knaben Wunderhorn (1892/96-1899), la palette sonore du compositeur s'enrichit de couleurs plus fraîches, mais ces échos de fanfares militaires, de ländler, de valses, ces prenantes musiques nocturnes sonnent en porte-à-faux avec un texte mi-fantastique, mi-morbide - que deux pages (8 et 9) d'humour désabusé n'éclairent même pas : terrifiant ou hagard défilé d'âmes errantes, de spectres des damnés de la terre, qui renvoie impitoyablement à notre marche à l'inévitable.

    Quelle prémonition pousse Mahler, aux moments les plus heureux de son existence, à composer, avec les Kindertotenlieder (1905), le Requiem anticipé pour sa fille Maria qui mourra en 1907 ? Musique monochrome, accablante, dont l'immense pouvoir expressif provient, paradoxalement, de la nudité de l'instrumentation et du contrepoint, suscitant la présence d'un arrière-monde sans espace ni temps, vide, neutre - par là-même angoissante et d'une tristesse infinie : le néant rendu palpable... Même économie de moyens pour la bourrasque qui secoue (n° 5) l'orchestre de spasmes, de furieuses rafales - symbolique révolte avant le renoncement final, l'abandon à la lumière divine...

    Das Lied von Erde (1908), réflexion sur la condition humaine, réalise la symbiose absolue du Chant et de l'Orchestre, la synthèse du Dionysiaque (abrupts et dénivellations accompagnant les dérapages du buveur : 1, 5) et de l'Apollinien (vents et bois épousant les replis d'une conscience sur elle-même : 2; évocation de la jeunesse au travers des lumières de la Bohème : 3; rythmes ondoyants du Printemps «saisis» par l'entrée fracassante de l'Eté : 4). Et cet «Adieu», enfin, (6) où la masse orchestrale se désagrège, chaque instrument faisant écho tour à tour, comme en état second, à la voix blanche de la soliste. D'un morne passage orchestral à vide, déprimant, s'élève alors aux cordes le soupir d'adieu de l'âme à la terre, ultime expression de tendresse pour cette Nature qui ne peut décevoir et dont le renouvellement «toujours, au printemps», atteste la réalité d'une Eternité."


    S'agissant de Das Lied von der Erde (Le Chant de la Terre), "Symphonie pour une voix de ténor, une voix d'alto (ou baryton) et orchestre" sur six poèmes de Hans Bethge d'après la "Flûte chinoise" (recueil de poésies chinoises traduites en allemand), je présente ci-dessous trois versions, les deux premières - dont on a déjà abondamment parlé - en guise de rémoignages laissés par les "disciples" qu'on peut voir au post 11 (à l'époque où, encore très jeunes, ils étaient les collaborateurs directs de Mahler) :





    A propos des chefs dirigeant les versions les plus illustres (Bruno Walter et le Wiener Philharmoniker en 1952, avec Julius Patzak, ténor, et Kathleen Ferrier, contralto / Otto Klemperer et le Philharmonia & New Philharmonia Orchestra en 1964, avec Fritz Wunderlich, ténor, et Christa Ludwig, mezzo-soprano), Michael Kennedy observe ce qui suit : "(...) Walter et Klemperer (...) représentent deux pôles opposés dans l'interprétation de Mahler. Walter aborde Mahler avec plus de lyrisme, plus de «douceur», tandis que Klemperer, souvent plus âpre, met en valeur le stoïcisme du tempérament mahlérien. Ni l'une ni l'autre de ces approches n'est «juste» ou «fausse». Toutes deux sont justifiées par la musique. On préférera l'une un jour, l'autre le lendemain. (...)"

    Quant à la troisième version, par Paul Kletzki dirigeant en 1959 le Philharmonia Orchestra (prise de son stéréo, comme pour l'enregistrement Klemperer), elle offre la particularité de faire alterner un ténor [Murray Dickie] avec un baryton [Dietrich Fischer-Diskau]. Elle est pour moi tout aussi mémorable que les deux autres (de "Der Abschied", en particulier, Fischer-Dieskau donne une interprétation à mon avis remarquable de justesse et d'émotion).

    Jacques
    Dernière modification par Jacques ; 12/04/2010 à 14h23.

  2. #22
    Membre Avatar de Alfredo
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    << Oui, je connais bien la version Reiner avec Forrester et c'est sans plus; si la cantatrice est effectivement excellente, je n'en dirais pas autant d'une direction qui pêche et évacue le détail au profit d'une maximalisation des effets (du Reiner, quoi, mais des mauvais jours).>>

    Je rappelle que je suis novice dans ce répertoire, et que mes points de vue sont ceux de quelqu'un qui découvre (et d'un amateur de voix), et pas ceux d'un connaisseur de ce répertoire.

    Sinon, si on cherche une version de la 4ème bien "chaloupée" (limite mauvais goût... le contraire de la version Boulez...) vous conseillez laquelle ?
    Dernière modification par Alfredo ; 12/04/2010 à 15h22.

  3. #23
    - Avatar de mah70
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    Pour un Mahler limite mauvais goût, très rentre-dedans et se vautrant avec délices dans les recoins de la musique, j'avais bien aimé la sélection de symphonies enregistrées par Neeme Järvi chez Chandos. Dans le tas se trouvait une 4e que je ne connais pas. Huss avait adoré mais avait fort critiqué la voix de Linda Finnie dans le 4e mouvement.
    Malheureusement, ça ne semble plus trop édité. Si les hasards d'un magasin d'occasion vous les font croiser, ça vaut le coup de tenter, à mon avis...
    La seule certitude que j'ai, c'est d'être dans le doute. (Pierre Desproges)

  4. #24
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    Puisque Christa Ludwig semble avoir un peu "la cote" (), je signale aussi ce disque où, en 1969 avec Bernstein dirigeant le New York Philharmonic, elle se partage avec le baryton Walter Berry la totalité du cycle Des Knaben Wunderhorn :




    Mieux encore, ce CD où Ludwig interprète notamment les cinq Rückert-Lieder en 1964 avec Klemperer à la tête du Philharmonia Orchestra (le Lied "Ich bin der Welt abhanden gekommen", c'est sublime ) :




    Et à propos des Ruckert-Lieder, je n'ai pour ma part jamais oublié cet enregistrement où, en 1978 avec Andrew Davis dirigeant le LPO, c'est la soprano américaine (d'origine allemande) Frederica von Stade qui les interprète :



    Pour tout dire, c'est cette version un peu hors norme qui m'avait révélé l'oeuvre (sur disque vinyl). Et j'avais été passablement troublé, à l'époque, de retrouver "la Mélisande de Karajan" chantant cette fois-ci Mahler dans un parfait allemand.

    Cela dit, je vais sans doute faire "hurler dans les chaumières" mais peu m'importe () : en dépit de Ludwig, qui sans doute s'impose au premier chef, j'aime toujours beaucoup cette version von Stade, à laquelle je reste très attaché .

    Jacques

  5. #25
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    Pour le fan-club de Ludwig dans le "Chant de laTerre" il y a aussi ceci :

    ou avec un plus ancien visuel :


  6. #26
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    Sinon, si on cherche une version de la 4ème bien "chaloupée" (limite mauvais goût... le contraire de la version Boulez...) vous conseillez laquelle ?


    Contraire de Boulez ? Gatti, Svetlanov, Tennstedt, Sinopoli ou Mengelberg. Mais sont-ils de mauvais goût ? Qu'est ce qu'un mauvais goût ?

  7. #27
    En attente de confirmation
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    soprano américaine (d'origine allemande) Frederica von Stade
    Origine allemande ??
    Elle est née dans le New-Jersey, ce qui la fait d'origine purement et totalement américaine. Elle habite à présent en Californie.

  8. #28
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    << Contraire de Boulez ? Gatti, Svetlanov, Tennstedt, Sinopoli ou Mengelberg. Mais sont-ils de mauvais goût ? >>

    J'ai comparé des extraits de la 4ème sur Musicme.
    La version de Jascha Horenstein a l'air d'assez bien correspondre à ce que je recherche. (plus qu'une version de "mauvais goût, je cherche surtout une version pas guindée et bien libre dans le rubato.)

  9. #29
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    Citation Envoyé par Alfredo Voir le message
    << Contraire de Boulez ? Gatti, Svetlanov, Tennstedt, Sinopoli ou Mengelberg. Mais sont-ils de mauvais goût ? >>

    J'ai comparé des extraits de la 4ème sur Musicme.
    La version de Jascha Horenstein a l'air d'assez bien correspondre à ce que je recherche. (plus qu'une version de "mauvais goût, je cherche surtout une version pas guindée et bien libre dans le rubato.)
    Horenstein est très bien en effet. Sinon, je reviens toujours à ma préférée : celle de David Oïstrakh.
    Frédéric
    Il vaut mieux mobiliser son intelligence sur des conneries que mobiliser sa connerie sur des choses intelligentes.Proverbe Shadok

  10. #30
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    Citation Envoyé par The Fierce Rabbit Voir le message
    Origine allemande ??
    Elle est née dans le New-Jersey, ce qui la fait d'origine purement et totalement américaine. Elle habite à présent en Californie.
    Oui, bon, OK.

    J'ai sans doute "parlé" trop vite et retire ce qui n'était qu'une malheureuse supposition fondée sur un patronyme à l'évidence germanique, laissant à tout le moins penser que les ancêtres de Frederica von Stade n'étaient pas venus en Amérique à bord du Mayflower. Et je ne confondais pas, quant à moi, "origine" et "nationalité", qui sont deux notions bien distinctes, ni n'insinuais que cette chanteuse était une Allemande, née en Allemagne, ayant plus tard acquis la nationalité américaine.

    Quand j'ai rencontré en Pennsylvanie, il y a une vingtaine d'années, un vieil Américain tout fier de m'apprendre qu'il était "d'origine suisse" parce que ses ancêtres appenzellois s'étaient établis dans cet Etat au début du XIXème siècle, je n'en ai évidemment pas déduit qu'il avait acquis la nationalité américaine après sa naissance.

    Cela dit, j'en profite pour montrer ci-après une image (trouvée sur Wikipédia) de la pochette du disque vinyl que j'évoquais dans mon précédent post :



    Jacques
    Dernière modification par Jacques ; 12/04/2010 à 23h55.

  11. #31
    Pour Alfredo, il me semble que la version de Fritz Reiner, avec le C.S.O. et Lisa Della Casa, correspond assez avec ce qu'il cherche.
    Et le son est bien meilleur que celui d'Horenstein.

    Mais sans doute faut-il ne pas trop tenir compte de la jaquette …


  12. #32
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    en voyant cet ange je me remémore une expérience inouïe vécue une foisà l'écoute de la fin du 3ème mt de cette symphonie,après l'envolée baroque où l'on a l'impression que le ciel se déchire et nous aspire vers les hauteurs.Lors des incroyables modulations qui suivent je me suis sentie physiquement décoller de mon siège, en état de lévitation totale.c'était très impressionnant...

  13. #33
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    << Pour Alfredo, il me semble que la version de Fritz Reiner, avec le C.S.O. et Lisa Della Casa, correspond assez avec ce qu'il cherche.
    Et le son est bien meilleur que celui d'Horenstein.>>


    Merci Jean-Louis pour cette suggestion, car je viens de l'écouter et effectivement, je préfère encore à Horenstein. Je dois aimer Reiner dans Mahler, puisque c'est aussi sa version que j'ai choisie après écoute comparée pour le chant de la terre...

  14. #34
    Non certes Jacques et Vincent Kathleen Ferrier n'est pas inattaquable et je comprends parfaitement que ceux qui sont plus avertis que moi des aspects techniques du chant puissent avoir des critiques à formuler ou que l'on n'aime tout simplement pas sa voix.

    Mais voilà : j'admire beaucoup son Chant de la Terre avec Walter. Je suis en train d'écouter Der Abschied et cette voix me bouleverse exactement de la même façon que la première fois que je l'entendis.

    Quant à la musique …

    Je ne peux m'empêcher de penser aussi qu'à peine un an plus tard, Kathleen Ferrier allait disparaître et le savait en chantant ce beau texte.

    L'enregistrement Decca du CD montré par Jacques est des 15 et 16 mai 1952.

    Le 17 mai dans la salle du Musikverein avec Julius Patzak et l'Orchestre Philharmonique de Vienne, toujours sous la direction de Bruno Walter, elle chantait de nouveau Das Lied von der Erde en public. L'émotion est ici ( pour moi ) encore plus palpable y compris dans la salle.

    C'est ce live qui se trouve sur le disque Tahra ci-dessous :



    " Partout et pour toujours les horizons bleuissent !
    Éternellement … éternellement … "

    Ewig … ewig …

    Merci Madame.

  15. #35
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    [QUOTE=Alfredo;88121]<< Pour Alfredo, il me semble que la version de Fritz Reiner, avec le C.S.O. et Lisa Della Casa, correspond assez avec ce qu'il cherche.
    Et le son est bien meilleur que celui d'Horenstein.>>


    Bien que je ne sois pas un grand connaisseur et empileur de versions des symphonies de Mahler (en dehors de la 4e justement), la version Reiner reste toujours ma préférée pour la 4e (il faut dire que j'ai découvert cette oeuvre par Reiner), de ce travail intense de préparation de l'orchestre, qui sonne de manière si transparente ( voire chambriste), de cette précision naît une émotion indicible (3e mouvement). De là à voir en Reiner un anti-Boulez, je dirais plutôt un supra-Boulez

  16. #36
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    Merci, Jean Louis , d'avoir rendu hommage à Kathleen Ferrier (post 34). Votre évocation des circonstances dans lesquelles, vers la fin de sa vie, elle a donné du Chant de la Terre (en particulier de "Der Abschied") des interprétations aussi bouleversantes était sans doute bienvenue.

    Car ceux qui comme moi reviennent rarement à ces témoignages uniques, pour la simple - et bête - raison que certains timbres de voix les mettent d'emblée mal à l'aise (et il est vrai que la voix de Kathleen Ferrier était très singulière), ont besoin qu'on leur rappelle ces faits de temps à autre. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que ces interprétations ont tant marqué les esprits. Et il me paraît même probable que Mahler en personne, qui sauf erreur appréciait beaucoup les voix féminines graves, les aurait beaucoup aimées s'il avait pu les entendre.

    Vous m'incitez en tout cas à réécouter la version que je possède (celle des 15 et 16 mai 1952) du Chant de la Terre par Walter et Ferrier. Je le ferai ce soir même.

    Jacques

  17. #37
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    << la version Reiner reste toujours ma préférée pour la 4e (il faut dire que j'ai découvert cette oeuvre par Reiner), de ce travail intense de préparation de l'orchestre, qui sonne de manière si transparente ( voire chambriste), de cette précision naît une émotion indicible (3e mouvement). De là à voir en Reiner un anti-Boulez, je dirais plutôt un supra-Boulez >>

    Ce qui me gêne énormément dans la version Boulez de la 4ème (en particulier dans le premier mouvement), c'est le tempo droit et le son aseptisé, l'absence de "balancé", de "chaloupé", par crainte de faire un faux pas ou de tomber dans le mauvais goût alors que ce que fait Reiner est extrèmement vivant élastique et souple, comme une musique de ballet. Oui, pour moi ce sont deux conceptions totalement opposées.
    Horenstein est intéressant aussi mais l'orchestre sonne beaucoup plus massif et épais, sans le grain de son "transparent et chambriste" de la version Reiner.
    Oui, je vais acheter Reiner.

  18. #38
    Le post de Hideux 67 m'a amené à écouter une fois de plus ce soir Reiner dans la 4ème.
    Je dois dire que ses mots sont ceux que j'aurais aimé trouver pour caractériser cette version :
    " de ce travail intense de préparation de l'orchestre, qui sonne de manière si transparente ( voire chambriste), de cette précision naît une émotion indicible (3e mouvement) ".
    Et une beauté indicible.

    Ceci étant bien sûr particulièrement vrai en ce qui concerne le 3ème mouvement dont a aussi tellement bien parlé Urlicht un peu plus haut.

    Il y a aussi Lisa Della Casa et cette voix qui chaque fois que je l'entend me rappelle les merveilleux Vier letzte Lieder de Strauss enregistrés avec Karl Böhm et les Wiener en 1953, l'année même de la mort de Kathleen Ferrier …

    Et donc : oui, Alfredo, achetez Fritz Reiner … pour commencer …

  19. #39
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    Merci, Jean Louis , d'avoir rendu hommage à Kathleen Ferrier (post 34). Votre évocation des circonstances dans lesquelles, vers la fin de sa vie, elle a donné du Chant de la Terre (en particulier de "Der Abschied") des interprétations aussi bouleversantes était sans doute bienvenue.

    Car ceux qui comme moi reviennent rarement à ces témoignages uniques, pour la simple - et bête - raison que certains timbres de voix les mettent d'emblée mal à l'aise (et il est vrai que la voix de Kathleen Ferrier était très singulière), ont besoin qu'on leur rappelle ces faits de temps à autre. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que ces interprétations ont tant marqué les esprits. Et il me paraît même probable que Mahler en personne, qui sauf erreur appréciait beaucoup les voix féminines graves, les aurait beaucoup aimées s'il avait pu les entendre.

    Vous m'incitez en tout cas à réécouter la version que je possède (celle des 15 et 16 mai 1952) du Chant de la Terre par Walter et Ferrier. Je le ferai ce soir même.

    Jacques
    Bonjour Jacques et Lean-Louis,

    Justement, vos deux posts m'interpellent: n'est-ce pas rétrospectivement que l'on a commencé à porter cette version aux nues, c'est-à-dire après le tragique décès de Ferrier? C'est une explication qui tient donc plus de l'émotion immédiate et rien d'autre. Moi-même, ça me gêne d'être critique pour ces mêmes raisons puisque l'on touche à des choses beaucoup plus profondes que la seule musique, à savoir les rapports des vivants avec le trépas. Bref, tout ceci nous éloigne de la musique. Il se trouve que le Chant de la Terre est un parfait transmetteur d'émotion; un critique sur FMusique disait un jour que même un mauvais chef ne pouvait pas rater le dernier mouvement, tant celui-ci était simple et beau. Je le rejoins parfaitement. Mais je reste circonspect quant à la qualité musicale seule de la version Ferrier. J'espère ne pas avoir été trop approximatif...

  20. #40
    Bonsoir Vincent.

    " Les rapports des vivants avec le trépas " , dites vous. Certes !
    Mais n'oubliez pas que justement le Chant de la Terre, comme les Kindertotenlieder, sont peut-être nés des rapports que Mahler lui-même essayait de discerner entre la Musique et la Mort, du moins il me semble.
    Le Chant de la Terre a été commencé en 1907, juste après la mort de sa fille aînée et alors qu'on a découvert chez lui la maladie qui l'emportera … Sa musique ne peut pas n'avoir aucun lien avec cela.

    En tout cas, pour moi qui ne suis pas du tout musicien c'est l'émotion "immédiate " qui m'importe et me touche dans cette musique, comme dans toute musique.
    Par ailleurs je ne crois pas que ce soit la renommée seule qui donne à ces enregistrements la force qu'ils ont aujourd'hui et je ne crois pas non plus qu'ils passeront avec celle-ci. Ils sont pour moi trop importants pour le coeur des hommes.

    En ce qui concerne Kathleen Ferrier je l'ai personnellement "découverte" non par Das Lied von der Erde mais dans ses lieder de Schubert ( An die Musik avant tout qui reste une de mes grandes émotions musicales ). Et ce n'est pas seulement son destin tragique qui me bouleverse, c'est avant tout sa voix.
    Vous me direz qu'il s'agit là aussi "d'émotion immédiate", je suis d'accord et j'en suis heureux.

    Je reviendrai peut-être plus tard sur tout ça.

    Ne m'en veuillez pas de cette réponse un peu abrupte.

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