Il n'est pas toujours facile d'être "le fils de son père" (). Surtout quand ce dernier est un génie.
Cela dit, quatre des nombreux fils de Johann Sebastian Bach devinrent compositeurs à leur tour, deux d'entre eux ayant été considérés au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle comme des créateurs importants. Il semble même que, lorsque le nom de "Bach" était prononcé devant Haydn et Mozart, c'est à Carl Philipp Emanuel que le premier pensait d'abord, et à Johann Christian que le second (pour des raisons personnelles) songeait aussitôt.
Voici une image trouvée sur la toile montrant le père à gauche et les quatre fils en question, soit de gauche à droite Wilhelm Friedemann Bach (1710-1784), Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788), Johann Christoph Friedrich Bach (1732-1795) et Johann Christian Bach (1735-1785) :
Pour les présenter, je me borne à reproduire ci-dessous les "fiches" qu'en donnent les Guides Fayard, qui me paraissent suffisamment détaillées :
Wilhelm Friedemann Bach
Né à Weimar le 22 novembre 1710, mort à Berlin le 1er juillet 1784. Fils aîné de Jean Sébastien Bach, il étudia avec son père et à la Thomasschule, puis à l'université de Leipzig, et, en 1733, obtint le poste d'organiste à la Sophienkirche de Dresde. En 1746, il quitta cette ville, catholique et trop férue de musique italienne, et devint organiste à la Liebfrauenkirche de Halle. Ayant eu avec les autorités de cette ville de nombreux démêlés, il accepta en 1762, mais sans aller l'occuper, le poste de maître de chapelle à Darmstadt, et finalement donna sa démission (1764). Il resta à Halle jusqu'en 1770, puis s'installa à Brunswick et enfin à Berlin (1774), où il passa ses dix dernières années, subsistant grâce à des leçons et à des récitals d'orgue. A sa mort, il laissa sa femme et sa fille dans la misère. Esprit instable mais aventureux, il souffrit particulièrement de sa position «entre deux âges» et ne tenta pas, comme son cadet Carl Philipp Emanuel, d'en réaliser la synthèse. Il écrivit une musique de visionnaire, très personnelle sur le plan expressif. A Leipzig, il composa surtout pour clavier, à Dresde surtout des œuvres instrumentales, à Halle la plupart de ses œuvres vocales (dont deux douzaines environ de cantates d'église), et à Brunswick et Berlin des œuvres pour clavier et de chambre. Une légende entretenue au XIXe siècle par le roman pseudo-historique de Brachvogel s'édifia rapidement autour de son nom, — le présentant comme un ivrogne et un malhonnête homme. On peut en faire bon marché, tout comme de l'incompréhension et de l'irrespect qu'il aurait manifesté envers l'art de son père. Des quatre fils Bach, il fut le seul à perpétuer comme organiste la tradition familiale. Un catalogue de ses œuvres a été dressé en 1913 par Martin Falck.
Carl Philipp Emanuel Bach
Né à Weimar le 8 mars 1714, mort à Hambourg le 14 décembre 1788. Deuxième des quatre fils musiciens de Jean Sébastien, il travailla d'abord avec son père et, après des études de droit, devint en 1738 claveciniste dans l'orchestre du prince héritier de Prusse. Quand celui-ci devint roi sous le nom de Frédéric II (1740), il le suivit à Potsdam et Berlin. A la mort de son parrain Telemann (1767), il lui succéda comme directeur de la musique à Hambourg, — occupant ce poste de 1768 à sa propre mort. Il se révéla rapidement un maître de la musique instrumentale, en particulier du clavier, et, à ce titre, marqua profondément son époque, tant par ses sonates et pièces diverses que par son Essai sur la véritable manière de jouer des instruments à clavier (1753 et 1762), traité fondamental pour la connaissance du style du XVIIIe siècle. De tous les membres de la famille Bach, il fut le plus célèbre de son vivant, et attacha son nom à l' Empfindsamkeit (en français «Sensibilité»), courant musical en réaction contre le rationalisme. «Un musicien ne peut émouvoir que s'il est ému lui-même», disait-il volontiers. Sa musique abonde en surprises harmoniques et rythmiques, son style, souvent heurté et velléitaire, confine parfois à la bizarrerie, et traduit des états d'âme changeants. Il tourna le dos à la galanterie. Haydn et Mozart l'admirèrent beaucoup, et dans son héritage se trouvaient la plupart des documents originaux de la famille Bach. Le catalogue thématique de ses œuvres dressé par Alfred Wotquenne (1905) est à peu de choses près une copie de celui réalisé par un ami du compositeur, l'organiste Johann Jakob Heinrich Westphal (1756-1825).
Johann Christoph Friedrich Bach
Né à Leipzig le 21 juin 1732, mort à Bückeburg (Westphalie) le 26 janvier 1795. Troisième des quatre fils musiciens de Jean Sébastien, il fut engagé au début de 1750, juste avant la mort de son père, à la cour du comte de Schaumburg-Lippe à Bückeburg, et y passa le reste de ses jours au service des comtes Wilhelm (jusqu'en 1777) et Friedrich Ernst (1777-1787), puis de la régente Whilhelmine. Le comte Whilhelm n'aimait que la musique italienne, et sa chapelle était dirigée par des italiens, le compositeur Giovanni Battista Serini et le violoniste Angelo Colonna. Après leur départ en 1756, et surtout après le retour du comte de la Guerre de Sept Ans (1763), Johann Christoph Friedrich — Concert-Meister depuis 1759 — put mettre à ses programmes des œuvres allemandes (Stamitz, Haydn, Gluck). De 1771 à 1776, l'écrivain Johann Gottfried Herder séjourna à Bückeburg et écrivit pour lui des livrets d'oratorios et de cantates. En 1778, il rendit visite à Londres à son frère Jean Chrétien. En 1793 fut engagé à Bùckeburg le compositeur Franz Christoph Neubauer (1760-1795), — dont la concurrence le stimula. Avec son fils Wilhelm Friedrich Ernst (1759-1845), également musicien, devait s'éteindre la descendance mâle de Jean Sébastien.
Johann Christian Bach
Né à Leipzig le 5 septembre 1735, mort à Londres le 1er janvier 1782. Dernier des quatre fils musiciens de Jean Sébastien, il n'avait que quinze ans à la mort de son père. Après 1750 il poursuivit sa formation à Berlin auprès de son demi-frère Carl Philipp Emanuel et, en 1754, se rendit en Italie, — voyage qu'auparavant aucun Bach n'avait effectué. Là, il prit des leçons auprès du padre Martini, se lia avec Sammartini, se convertit au catholicisme (1757), devint organiste à la cathédrale de Milan (juin 1760), et composa des opéras, — genre qu'avant lui aucun Bach n'avait pratiqué : Artaserse (1761), Catone in Utica (1761) et Alessandro nell'Indie (1762). En 1762, en principe pour un an seulement, il arriva à Londres comme compositeur attitré du King's Theatre où il donna en février 1763 l'opéra Orione, et en mai de la même année Zanaida. En fait, il ne devait plus quitter la capitale britannique (où, en 1764, il rencontra la famille Mozart) que pour quelques brefs voyages sur le continent; et, pendant vingt ans, premier Bach cosmopolite, premier Bach mondain, il participa activement à sa vie musicale. De 1765 à 1781, il organisa avec le compositeur et gambiste Carl Friedrich Abel (1723-1787), qu'il avait connu à Leipzig, les fameux concerts publics Bach-Abel. Il devint professeur de musique des enfants royaux. A Londres il donna encore, comme opéras italiens, Adriano in Siria (1765), Carattaco(1767) et la Clemenza di Scipione (1778). On le vit à Mannheim en 1772 et en 1774 pour les créations respectives de Temistocle et de Lucio Silla, et en 1778 à Paris où il retrouva Mozart et signa un contrat pour l'opéra français Amadis de Gaule, représenté l'année suivante. Dans ses dernières années ses succès diminuèrent, et sa mort prématurée émut surtout ses créanciers. Mais Mozart eut cette réaction, rare chez lui : «Bach n'est plus, quelle perte pour la musique !» Ivresse mélodique, élégance, sensualité, mais aussi gestes théâtraux caractérisent son style.
Ce sera tout pour le moment. Car le sujet est vaste et, pour tout dire, je n'en connais qu'une faible partie ().
Les disques d'oeuvres composées par les fils de J. S. Bach sont pourtant assez nombreux dans mes armoires, la plupart concernant Carl Philipp Emanuel ... Mais j'évoquerai ces enregistrements plus tard, ne les ayant pas encore tous recensés (et encore moins réécoutés ).
Jacques