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Discussion: Bartok

  1. #1
    Membre Avatar de Couack
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    Bartok

    On dirait qu'il n'y a pas de fil Bartok (Thierry où es-tu ?)

    Je n'avais rien de global ni de spécialement pénétrant à assener sur ce grand compositeur. Seulement je viens de réécouter le premier quatuor que je n'avais pas entendu depuis des lustres, et de remarquer un détail certainement connu des spécialistes - mais pas de moi : l'un des thèmes principaux du final est identique à l'un des thèmes du 1er mvt de La Nuit Transfigurée.

    Je sais c'est inouï. Je me demande donc s'il s'agit d'une réminiscence ou d'une citation; je n'ai pas trouvé d'info sur ce sujet brûlant : si quelqu'un a une idée...

    En attendant voici ce dont il s'agit

    Bartok : Quatuor n°1 (1909) (c'est le premier thème qu'on entend et il est central dans ce mouvement) :




    Schoenberg : La Nuit Transfigurée (1899), à 3'55 ici, aux altos :




    on ne l'entend plus ensuite (ni avant d'ailleurs).
    lokoobooniirabootooaŕaiaikaalteelok onanenaŕ[-]ekaa?iiśiinkoolobooiiteerobaarebeet easiioonii

  2. #2
    Membre Avatar de Jacques
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    C'est en effet assez troublant ...

    Je n'ai aucune info à ce sujet, personnellement. Mais j'attends avec curiosité de voir si d'autres en fourniront, le cas échéant ().

    J'imagine toutefois mal que ce soit une citation, pensant qu'il s'agit tout au plus d'une réminiscence, voire d'une simple "coïncidence" comme il en existe parfois en musique.

    Cela dit, en fait de citation délibérée, je rappelle à toutes fins utiles () que Bartók en fit une "belle" (et plutôt "vache" ), vers la fin de sa vie, dans le passage parodique qu'on peut entendre entre 2'05'' et 2'55'' sur la vidéo ci-dessous :

    [/URL]


    Jacques

  3. #3
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    on parle beaucoup de cette "citation" mais de quoi s'agit-il exactement? Lehar? je ne reconnais pas le thème de l'Invasion de la 7ème de Chostakovich dont Bartok était censé se moquer. Là il ne nous cite qu'une descente de gamme.

  4. #4
    Membre Avatar de Jacques
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    Il est vrai que ce n'est pas si simple que ça...

    Cela dit, dans le petit livre que la collection "Solfèges" consacre à Bartók (Seuil, 1994), Pierre Citron écrit notamment ce qui suit :


    "(...) Il y a dans le Concerto pour orchestre quelque chose de crispé. Sa joie est parfois grimaçante. Bartók crie trop fort : aveu de faiblesse. Le quatrième mouvement est caractéristique à cet égard, avec son épisode burlesque, fait d'un thème de fox-trot ridiculement simple, interrompu à deux reprises par le glissando des trombones et des sortes d'éclats de rire aigus aux cordes (de même, dans Hary Janos de Kodaly, les trombones interrompent une parodie de musique militaire).

    «Chant d'ivrogne interrompant une sérénade», aurait dit Bartók à Gyorgy Sandor. Peter Bartók raconte que son père a eu l'idée de la phrase de danse en entendant à la radio la Septième Symphonie de Chostakovitch; le dessin, d'une triste banalité, y figure en effet dans le premier mouvement. Mais J. Weissmann remarque que c'est aussi, à peu de chose près, l'air d'une chanson de La Veuve joyeuse de Lehar, Da geh' ich ins Maxim's :



    Les deux sont vrais. Bartok raille la platitude du motif de Chostakovitch, qu'il n'aurait pas écrit, et prouve que c'est là, au fond, de la musique d'opérette. Mais ce n'est pas tout. Chostakovitch, c'était l'idole de Koussevitzki. Bartók marque ainsi son agacement devant les panégyriques, entendus dans la bouche de son commanditaire, d'un musicien qu'il estime très inférieur à lui-même; il affirme son indépendance malgré tout, et prend une revanche sur la musique un peu grosse, un peu complaisante, qu'il a été contraint d'écrire pour répondre au désir de Koussevitzki, et, à travers lui, du grand public américain. (...)"


    Jacques

  5. #5
    Modérateur Avatar de lebewohl
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    Je crois d'ailleurs avoir lu que le thème en question avait été délibérément choisi par chostakovitch comme caricature ; mais je ne sais pas si c'est vrai!
    Il s'engendre beaucoup d'abus au monde ou, pour le dire plus hardiment, tous les abus du monde s'engendrent de ce qu'on nous apprend à craindre de faire profession de notre ignorance.

    Montaigne

  6. #6
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    On a dit que Chostakovich avait choisi ce thème comme un dérivé de Lehar, compositeur favori d'Hitler, mais l'auteur a précisé plus tard qu'il s'agissait d'un private joke et d'un thème qu'il chantait à son fils Maxime. On trouve le même genre de structure thématique dans la deuxième sonate.
    D'un autre côté Bartok aurait effectivement dit "qu'il n'y en avait plus que pour Chostakovich" reprenant en cela une plainte attribuée à Rachmaninov. Mais Bartok aux Etats-Unis avait déjà depuis longtemps viré à l'aigre, refusant tous les postes de professeur qui lui étaient offerts parce qu'il ne souhait plus enseigner que le piano, classe où les institutions disposaient déjà de virtuoses à la réputation bien établie.

  7. #7
    Membre Avatar de Jacques
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    Citation Envoyé par Fred Audin Voir le message
    Mais Bartok aux Etats-Unis avait déjà depuis longtemps viré à l'aigre, refusant tous les postes de professeur qui lui étaient offerts parce qu'il ne souhait plus enseigner que le piano, classe où les institutions disposaient déjà de virtuoses à la réputation bien établie.
    En fait, Bartók ne fut jamais un homme particulièrement avenant et d'un abord facile... Ce que semblent refléter de nombreuses photos où il apparaît, comme celles le montrant à onze ans avec sa petite soeur Elsa, ou à cinquante-sept ans sur la couverture d'un livre paru chez Stock en 1981 :



    A propos du caractère plutôt farouche et entier du compositeur, ce livre commence même très fort dans sa préface, en révélant d'emblée cet étonnant petit "incident" (je crois l'avoir déjà mentionné sur un autre fil, mais il est peut-être davantage à sa place ici) :

    "Au cours de l'un de mes premiers séjours à Budapest, j'eus une longue conversation avec un vétéran de la musique hongroise contemporaine. A la fin, je demandai à mon hôte s'il avait connu Bartók. Sa réponse fut surprenante : «J'ai au moins connu beaucoup de ses œuvres. Pour le reste, il ne m'a jamais adressé qu'un seul mot, Igen [oui], et il voulait en fait dire Nem [non]».

    Une brève histoire me fut contée en guise d'explication :

    Budapest, un soir d'hiver. Le téléphone sonne. Monsieur Béla Bartók saisit le combiné :
    Oui...
    Bonsoir, Maître. Excusez-moi de vous déranger, mais votre ami le professeur Kodály m'a conseillé de le faire. Je suis un jeune compositeur et aimerais connaître...
    Une sonnerie interrompt l'élan de la phrase toute préparée : Maître Bartók a raccroché ! Il n'aime pas qu'on le dérange, il n'aime pas qu'on s'introduise grâce à un tiers et il considère que la composition ne s'enseigne pas. En conclusion, il n'a aucun avis, aucun conseil à prodiguer à son jeune interlocuteur et il coupe simplement la communication.

    Cette anecdote, qui fait d'abord sourire, est un point de départ presque idéal pour méditer sur la personnalité de Bartók, ne serait-ce que parce qu'elle révèle le refus absolu de toute concession et de toute mondanité. (...)"


    Jacques

  8. #8
    Administrateur Avatar de Philippe
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    "Au cours de l'un de mes premiers séjours à Budapest, j'eus une longue conversation avec un vétéran de la musique hongroise contemporaine. A la fin, je demandai à mon hôte s'il avait connu Bartók. Sa réponse fut surprenante : «J'ai au moins connu beaucoup de ses œuvres. Pour le reste, il ne m'a jamais adressé qu'un seul mot, Igen [oui], et il voulait en fait dire Nem [non]».

    Une brève histoire me fut contée en guise d'explication :

    Budapest, un soir d'hiver. Le téléphone sonne. Monsieur Béla Bartók saisit le combiné :
    Oui...
    Bonsoir, Maître. Excusez-moi de vous déranger, mais votre ami le professeur Kodály m'a conseillé de le faire. Je suis un jeune compositeur et aimerais connaître...
    Une sonnerie interrompt l'élan de la phrase toute préparée : Maître Bartók a raccroché ! Il n'aime pas qu'on le dérange, il n'aime pas qu'on s'introduise grâce à un tiers et il considère que la composition ne s'enseigne pas. En conclusion, il n'a aucun avis, aucun conseil à prodiguer à son jeune interlocuteur et il coupe simplement la communication.

    Cette anecdote, qui fait d'abord sourire, est un point de départ presque idéal pour méditer sur la personnalité de Bartók, ne serait-ce que parce qu'elle révèle le refus absolu de toute concession et de toute mondanité. (...)"

    Jacques
    Impeccable

    Je ne me souvenais pas d'avoir déjà lu cette anecdote ailleurs, mais ça force l'admiration (même si en effet ça manque un peu de politesse )

    Le dernier §, en forme de conclusion, semble pertinent

  9. #9
    Membre Avatar de thierry h
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    Je ne fais que passer....

    Le couillon en l'occurrence c'est Kodaly qui connaissait son pote Bartok par coeur et qui aurait pu prévenir ce jeune compositeur d'une probable déconvenue ! Enfin, il me semble !

    Bartok était un homme plutôt timide et réservé mais intransigeant ce qui expliquerait peut être son côté un peu brusque qui va aller croissant avec la maladie et l'exil !

  10. #10
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Le couillon en l'occurrence c'est Kodaly qui connaissait son pote Bartok par coeur et qui aurait pu prévenir ce jeune compositeur d'une probable déconvenue !
    C'est exactement ce que je pense aussi .

    Pour compenser l'impression négative qu'a pu donner le comportement un peu "cavalier" révélé par cette anecdote, je précise que bien des lettres reproduites dans le livre de Philippe A. Autexier témoignent à l'inverse, de la part de Bartók, de "qualités de coeur" qu'on ne soupçonnerait pas (sans compter le fait qu'à certains égards on peut aussi le qualifier d'humaniste, à mon avis).

    Mais ces questions sont délicates... En ce qui les concerne, je viens d'ailleurs de découvrir sur un forum concurrent cet amusant petit échange () :

    "— On parle beaucoup des types insupportables ou égocentriques comme Wagner, Mahler, Beethoven, Boulez... Mais on pourrait aussi parler des personnalités sympathiques: je pense notamment à Bartók, dont tout porte à penser que c'était un type formidable, humain, généreux."

    "— Je crains que là, je ne suis pas tout à fait d'accord. De toute manière je suis sûr que Bartók était un homme très difficile à vivre avec. J'ai bien connu Denijs Dille (qui est décédé récemment et qui était un ami très proche de Bartók). Il était l'oncle de mon meilleur ami de jeunesse et nous nous sommes rencontrés à maintes reprises. Là aussi, il y a le Bartók "public", très exigeant envers les autres et soi-même mais d'une grande galanterie et d'une grande politesse, et le Bartók privé qui était - disons - maladif, pessimiste et négatif. Ce n'est donc pas si simple que cela."

    Quoi qu'il en soit, pour terminer "en beauté" (et peu importe qu'on estime le compositeur et le chef "sympathiques" ou pas ), je montre cette vidéo qui n'est hélas qu'un court extrait à but publicitaire mais que j'ai toujours trouvée très impressionnante () :

    [/URL]


    Jacques

  11. #11
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    Quatre photos où apparaît Bartók, ultra connues mais qu'il est intéressant de revoir...


    En 1909, enregistrant des chants folkloriques dans le village de Darasz :





    En 1910, avec notamment, assis en face de lui, son ami Zoltán Kodály :





    En 1938, avec son épouse Ditta, née Pasztory, à l'époque où ils donnèrent en première audition (à Bâle le 16 janvier, sous la direction de Paul Sacher) la Sonate pour deux pianos et percussion :





    En 1940, aux Etats-Unis, enregistrant Contrastes pour violon, clarinette et piano avec Joseph Szigeti et Benny Goodman :





    Jacques

  12. #12
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    On ne s'en lasse pas Jacques ! au sujet de la première image je crois que Bartok a raconté qu'il avait été très touché ( et ce n'était pas la première fois ni la dernière fois que cela arrivera ) que les villageois aient sortis leurs plus beaux habits, ceux que l'on sort pour les très grandes occasions ! Faut dire qu'il allait dans des coins où règnait une misère noire ( ça n'a pas beaucoup changé dans certains coins de Transylvanie ) tout juste s'il avait de quoi bouffer !
    Aux spécialistes de juger si le terme folklore est approprié puisqu'il s'agissait de musiques et de chants vivants, quotidiens, et non formolisés pour des touristes en shorts ! Dirions nous que le tango, la valse, le fandango, le flamenco ou ma chère sardane sont des danses folkloriques ?
    Dernière modification par thierry h ; 30/08/2010 à 18h00.

  13. #13
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    Merci, Thierry , d'avoir fourni ces précisions à propos de la première photo de mon précédent post. Je trouve ces faits très touchants.

    S'agissant des mots "chants folkloriques", l'expression est en effet discutable... J'avoue l'avoir reprise sans trop réfléchir de la légende figurant sous (ou plutôt au-dessus de) la même photo dans le bouquin sur Bartók de la collection "Solfèges"... Comme il s'agissait incontestablement de musiques et de chants vivants, j'aurais plutôt dû dire, tout simplement, "chants villageois", ou "chants de paysans".

    Jacques

  14. #14
    Membre Avatar de JYDUC
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    On ne s'en lasse pas Jacques ! au sujet de la première image je crois que Bartok a raconté qu'il avait été très touché ( et ce n'était pas la première fois ni la dernière fois que cela arrivera ) que les villageois aient sortis leurs plus beaux habits, ceux que l'on sort pour les très grandes occasions ! Faut dire qu'il allait dans des coins où règnait une misère noire ( ça n'a pas beaucoup changé dans certains coins de Transylvanie ) tout juste s'il avait de quoi bouffer !
    Aux spécialistes de juger si le terme folklore est approprié puisqu'il s'agissait de musiques et de chants vivants, quotidiens, et non formolisés pour des touristes en shorts ! Dirions nous que le tango, la valse, le fandango, le flamenco ou ma chère sardane sont des danses folkloriques ?
    Vingt dieux !
    M'avait l'air d'être un bon gars, le sieur Bartok !
    Un mec du terroir. Un quidam de la campagne.
    Pourtant sa musique me paraît, ma foi, plutôt urbaine
    Moi, ce que j'en dis, hein ?
    A part le rugby, je n'entends rien à rien
    Si le mélange est savant, il passe inaperçu.

  15. #15
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    Citation Envoyé par Irmah Vacharde Voir le message
    M'avait l'air d'être un bon gars, le sieur Bartok !
    Ces deux photos moins connues, qui montrent Bartók jouant avec son fils Béla "Junior", en 1913, dans le jardin de sa maison de Rakoskeresztur (banlieue de Budapest), pourront confirmer cette impression, il me semble :



    Citation Envoyé par Irmah Vacharde Voir le message
    Un mec du terroir. Un quidam de la campagne.
    Bartók était en tout cas très attaché à la nature campagnarde. Ce qui le conduisit à "récolter" avec assiduité non seulement de nombreux chants villageois, comme le voulait sa vocation de musicien, mais aussi quantité de plantes, de minéraux et d'insectes.

    Quant à Béla "Junior", qui n'avait que trois ans sur ces photos, il partagea très tôt l'attirance qu'avait son père pour la campagne et choisit même, plus tard, le métier d'ingénieur agronome .

    Jacques

  16. #16
    Membre Avatar de thierry h
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message


    Bartók était en tout cas très attaché à la nature campagnarde. Ce qui le conduisit à "récolter" avec assiduité non seulement de nombreux chants villageois, comme le voulait sa vocation de musicien, mais aussi quantité de plantes, de minéraux et d'insectes.

    Jacques
    Un grand homme vous dis-je !

  17. #17
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Aux spécialistes de juger si le terme folklore est approprié puisqu'il s'agissait de musiques et de chants vivants, quotidiens, et non formolisés pour des touristes en shorts ! Dirions nous que le tango, la valse, le fandango, le flamenco ou ma chère sardane sont des danses folkloriques ?
    Cest sans doute en français que le terme est devenu le plus péjoratif, carrément dégradant même. Pourtant les spécialistes justement (et les amateurs comme moi) continuent de le trouver bien commode, puisqu'ils parlent de "processus d'élaboration folklorique", et on voit mal par quoi remplacer l'adjectif ici. Gageons que les cognoscenti qui peuplent ce forum savent faire la part des choses... A propos, je n'en fait sûrement pas partie puisque je découvre ces photos. C'est vraiment fascinant, et ce souci de dignité, confirmé par l'anecdote sur les costumes, me rappelle la photo de la chanteuse auprès de laquelle Donatien Laurent a recueilli une superbe version de la complainte de Loeiz Ar Rawaleg en pays vannetais: elle aussi y paraît dans ses plus beaux atours, et elle a une allure qu'on chercherait en vain dans les groupes dits folkloriques.

  18. #18
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    Je signale encore que Bartók, lors de ses visites à la campagne, ne se contentait pas d'enregistrer les chants des villageois mais aimait bien aussi les photographier s'il le pouvait (usant pour cela de beaucoup de tact et de diplomatie, car il avait pour eux le plus grand respect) .

    Voici en tout cas deux photos prises par lui (j'ai malheureusement dû les tronquer un peu pour des raisons "techniques" ), l'une montrant deux jeunes campagnardes portant leurs "habits de fête" [à Pomiky, en juillet 1915], l'autre des femmes "en habit de tous les jours" [à Valaská, Slovaquie, en avril 1916] :




    Je change maintenant de sujet (), m'étant demandé ce que Debussy, autre "grand timide" au caractère parfois ombrageux, avait bien pu entendre de Bartók et de Kodály avant sa mort en mars 1918...

    Invoquant "des sources orales, qu'il est difficile de vérifier", François Lesure avance l'hypothèse qu'il aurait pu au moins entendre, à la faveur d'un concert organisé pendant son séjour à Budapest en 1910, les quatuors à cordes No 1 de chacun des deux jeunes compositeurs hongrois. Toujours est-il que Debussy mentionna expressément lesdits compositeurs dans une interview accordée en juin 1914 à D. Calvocoressi, déclarant notamment ceci :

    "(...) C'est imprudent de déranger de jeunes artistes en en faisant des sujets de discussions souvent superficielles et partiales. La hâte fébrile que l'on met à discuter, à disséquer et à classer est une maladie de notre temps. A peine un compositeur a-t-il fait son apparition que l'on commence à lui consacrer des articles. On se jette sur ses oeuvres et on leur applique d'ambitieuses définitions.

    J'estime, par exemple, que, aussi tentant que cela peut l'être, le moment n'est pas encore venu de juger les jeunes hongrois tels que Bartók et Kodály. Tous deux sont de jeunes artistes extrêmement intéressants et pleins de mérite, qui cherchent passionnément leur voie, il n'y a aucun doute. Ils sont à peu près sûrs de la trouver. Et l'une des caractéristiques importantes de leur musique est l'évidente affinité entre leur esprit et celui de la musique française moderne. Mais je n'en dirai pas plus. (...)"

    Sinon, sauf - s'il a bien eu lieu - lors de ce concert de 1910 à Budapest (auquel il serait étonnant qu'ils n'aient pas été présents personnellement), mais alors pour de simples présentations formelles, ni Bartók, ni Kodály ne rencontrèrent Debussy (que tous deux avaient alors pour "idole"), à ce que je crois savoir...

    Cela faillit toutefois arriver à Bartók, à l'occasion d'un séjour qu'il fit à Paris un an auparavant. Dans son livre, Pierre Citron raconte à ce sujet ce qui suit, rapportant une autre petite anecdote amusante :

    "(...) Lors d'un voyage à Paris, en 1909, il [Bartók] refuse, dit-on, d'être présenté par I. Philipp à Saint-Saëns, à Widor, et ne veut voir que Debussy.
    C'est un homme impossible, objecte Philipp, il déteste tout le monde et sera certainement grossier avec vous. Tenez-vous à être insulté par lui ?
    Oui. []
    L'entrevue n'a pas lieu. Mais, plus tard, Bartók continue à jouer souvent Debussy dans ses concerts (il y inscrira une fois les Vingt-Quatre Préludes). (...)"


    Jacques

  19. #19
    Membre Avatar de thierry h
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    Pas mal !

    Au passage je signale qu'il existe un fort célèbre enregistrement de la sonate de Debussy par Szigeti et Bartok ! 13 avril 40, Library of Congress ! C'est archiconnu mais bon...
    En revanche je ne connais pas le continu des gros pavés Hungaroton Bartok au piano dans lesquelles il doit bien y avoir quelques Debussy !

  20. #20
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Au passage je signale qu'il existe un fort célèbre enregistrement de la sonate de Debussy par Szigeti et Bartok ! 13 avril 40, Library of Congress ! C'est archiconnu mais bon...
    En revanche je ne connais pas le continu des gros pavés Hungaroton Bartok au piano dans lesquelles il doit bien y avoir quelques Debussy !
    Je ne connais pas non plus ces gros pavés mais ne serais pas étonné qu'y figure un enregistrement de la suite pour deux pianos En Blanc et Noir de Debussy, interprétée par Béla et Ditta Bartók (ils l'appréciaient beaucoup et la jouaient volontiers, sauf erreur) .

    Quant à la Sonate pour violon et piano de Debussy par Szigeti et Bartók, en voici, pour mémoire, le troisième mouvement :

    [/URL]


    Sinon, on trouve évidemment sur YouTube d'assez nombreuses vidéos permettant d'entendre Bartók jouant certaines de ses propres oeuvres au piano. En voici une où il interprète ses célèbres Danses populaires roumaines Sz. 56 () :

    [/URL]


    Entendre la voix parlée du compositeur est chose plus émouvante encore, à certains égards ()... Cette vidéo le permet, qui reproduit une interview accordée par Bartók le 2 juillet 1944 à une station de radio américaine, présentant un récital de piano donné par sa femme Ditta Pásztory-Bartók (il s'exprime en anglais - à partir de 0:23 - et il n'y a pas de sous-titres, mais ce n'est pas trop grave, je crois) :

    [/URL]


    Jacques

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