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Discussion: Aaron Copland

  1. #1
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    Aaron Copland

    Bon, je vais étrenner ce forum-ci avec un compositeur qui fait mes délices depuis longtemps.

    Je ne m'étends pas trop sur la personnalité du compositeur ni sur le rôle décisif qu'il a joué dans la musique américaine et j'attaque directement sur l'oeuvre.

    D'un point de vue global, il me semble que c'est surtout dans la musique symphonique que Copland s'est le mieux illustré. Les oeuvres vocales valent également le déplacement (en particulier son opéra "The Tender Land", véritable manifeste de son esthétique, et les 12 Poems of Emily Dickinson). La musique de chambre m'a souvent déçu, hormis son ultime "duo pour flûte et piano" qui est, à mon avis, un sommet de son oeuvre. Le piano me semble globalement plus morne.

    Si l'on excepte quelques écarts expérimentaux au début et vers la fin de sa carrière, la musique de Copland a développé une esthétique faite de naïveté candide toute en ambiguïtés. Son côté pastoral, quasi-omniprésent, qui évoque si bien les grands espaces, la prairie, souvent inspiré par la musique folklorique (au sens large, avec des emprunts aux folklores mexicains, cubains, afro-américain etc) est toujours à la marge d'un abîme de mélancolie. C'est très pudique, très retenu, d'une grâce sublime, et pour moi extrêmement sincère et émouvant.

    C'est aussi une musique qui s'est tenue très à l'écart des débats esthétiques du siècle : toujours radicalement tonal (sauf exceptions rares), post-stravinskien à sa manière (encore un élève de Nadia Boulanger), d'une écriture claire et sans effets de manche, hermétique au minimalisme.

    Il faut souligner également que, sur les quelques 15 dernières années de sa vie, Copland souffrait d'une maladie neurologique qui l'a considérablement diminué.

    Je vais développer, mais comme d'habitude je préfère utiliser différents posts, ça me semble plus digeste.

    Gilles

  2. #2
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    Je commence par le coeur du sujet : l'oeuvre symphonique. Comme le compositeur est né en 1900, il sera assez facile de calculer en quelle année il a composé telle ou telle oeuvre :

    Dance Symphony (1925 - 17mn)

    C'est un Copland qui n'a pas encore la tendresse ambiguë des grandes années, qui reste encore assez grinçant, mais dont le langage s'affirme déjà pleinement et dont la dette à Stravinsky est bien moins grande qu'on l'a dit. C'est assez sarcastique, climat plutôt rare chez lui. Cette oeuvre est une suite de ballet (d'après Grogh) qui raconte une histoire de vampire ou quelque-chose dans ce style.

    Music for the Theatre (1925 - 21' )

    C'est déjà du grand Copland : une écriture rythmiquement très vive, avec des emprunts de danses et de thèmes à connotation folkloriques, une grande clarté des lignes mélodiques toujours parfaitement lisibles malgré une écriture entrelacée, une abondance de thèmes, un usage parcimonieux mais toujours habile des bois, une prédominance nette des cuivres ici et une impression générale de couleurs chaudes extraordinaires. Les mouvements lents (surtout le IV avec son superbe solo de clarinette et son glockenspiel) sont déjà superbes. On n'en est pas au degré de finesse des oeuvres de la maturité, mais c'est quand même assez réussi.

    Symphonic Ode (1929 - 20' )

    Dans sa veine grinçante et cuivresque des débuts : on y voit toujours transparaître l'aspect danses populaires et certaines harmonies pastorales auxquelles il ne renonce pas. Sinon c'est quand même assez âpre et brutal.

    El Salon Mexico (1932 - 11' )

    Une œuvre riche en couleurs et en thèmes divers : il est assez extraordinaire de pouvoir évoquer tant de sentiments contradictoires en 11 mn, depuis la méditation nostalgique jusqu'à l'épique de western, avec toujours cette évocation de la plénitude des grands espaces si caractéristique de Copland. Une oeuvre formidablement structurée, tout s'entend et se ressent.Ici on voit à quel point son influence de Copland sur Bernstein a été grande.

    Statements (1934 - 18' )

    Copland dans sa période atonalisante : c'est assez austère, même si ici on reste encore globalement dans du tonal au milieu d'accords dissonnants; Durant cette période, il privilégie largement les cuivres qui confèrent un côté brillant et doré à ses oeuvres. Ca s'écoute mais ça n'est pas le Copland le plus original.

    Billy the Kid (1938 - 18' )

    Une œuvre de la première période de Copland, plus carrée et moins fine que les suivantes, avce davantage d'aspérités et moins de souplesse, mais on y reconnaît bien la verve pastorale du compositeur et son évocation colorée de la prairie comme des paysages du Colorado. L'usage des danses américaines est très efficace (II) et superbement intégré à l'oeuvre. Certains passages sont cependant moins inspirés (VII) malgré une très grande maîtrise de l'écriture orchestrale (VIII magnifiques solos de basson et de trombone).

    Quiet City (1940 - 10' ) pour cor anglais, trompette & orchestre

    La quintessence du minimalisme coplandien : l'œuvre est toute centrée sur le son des solistes qui se marient superbement, à peine soulignés par des harmonies de cordes. La magie nocturne d'une ville qui s'endort. La complexité des sentiments sollicités par cette oeuvre est caractéristique de la musique de Copland et de son ambivalence : appaisé et inquiet. A mon avis une de ses plus belles réussites.

    John Henry (1940 - 4' )

    Un esclave s'enfuit en prenant le train : magnifique leçon d'optimisme, magnifique évocation du train qui conduit l'homme vers la liberté. Bref et dense.

    Our Town (1940 - 11' )

    Il n'y a que Copland pour mêler ainsi la tendresse à la nostalgie : magnifique orchestre de cordes et de flûtes, avec des accents de cors accablants de tristesse. Sublime

    Bon je fais une pause.

  3. #3
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    Si vous allez à Disneyland Paris, vous entendrez, tout en déambulant dans Frontierland, des passages d'El Salon Mexico et Billy the Kid.
    C'était juste pour l'anecdote, car il est vrai que Copland est un grand compositeur.

  4. #4
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    Citation Envoyé par Tiomkin Voir le message
    Si vous allez à Disneyland Paris, vous entendrez, tout en déambulant dans Frontierland, des passages d'El Salon Mexico et Billy the Kid.
    C'était juste pour l'anecdote, car il est vrai que Copland est un grand compositeur.
    C'est amusant, à propos d'associations inédites, je pensais aussi qu'il y avait un lien entre "la petite maison dans la prairie" et la musique de Copland : son opéra "The Tender Land" aurait quasiment pu être un épisode de la série.

  5. #5
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    Je continue sur ma lancée :

    Music for Movies (1942 - 18' )

    Une série de tableaux très colorés, avec notamment la reprise de Down a Country Lane. Ca n'est pas le Copland le plus émouvant et le plus raffiné, mais c'est sympa.

    Danzon Cubano (1942 - 8' )

    Une petite merveille : le compositeur sait à la fois écrire de manière parfaitement claire et sans fioriture, avec une étonnante qualité de lisibilité, et rendre sa partition extrêmement riche, ici les thèmes sont nombreux, les couleurs orchestrales chaudes, les rythmes vifs.

    Rodeo (1942 - 22' )

    Toujours cette écriture incroyablement nette et colorée : une parfaite lisibilité, tout s'entend malgré une certaine complexité en réalité, une économie de moyen et un sens musical qui touchent juste ; le 3, dans ce style nocturne pastoral si caractéristique du compositeur se paie même le luxe d'être bouleversant. La farandole du 4 vaut la peine également. l'évocation du rodéo estt précise, non dénuée d'humour d'ailleurs. Du pur concentré d'optimisme, de simplicité et de soleil.

    Lincoln Portrait (1942 - 18' ) pour récitant et orchestre

    Les deux premiers mvts sont uniquement instrumentaux, légers, colorés dans un climat pastoral ensoleillé. La dernière partie avec le narrateur est empreinte d'une grandiloquence patriotique un peu datée.

    Letter from Home (1944 - 8' )

    Encore un sommet de finesse et de tendresse : une partition centrée sur les cordes, délicatement colorée par les bois, calme et translucide.

    Appalachian Spring (1944 - 26' )

    La délicatesse et la tendresse de l'intro sont déjà un sommet en soi. Le génie que déploie le compositeur à équilibrer les couleurs de l'orchestre et les lignes mélodiques est à la fois saisissant de simplicité et redoutable d'efficacité (le solo de flûte à la fin du II est beau à pleurer). Les thèmes sont d'une qualité irréprochable d'un bout à l'autre. Quant aux harmonies pastorales de Copland, à la fois candides et émouvantes, tendres et naïves, elles sont inimitables et d'une abyssale ambiguïté.

    The Red Pony (1948 - 24' )

    Une œuvre de la maturité, avec des harmonies de cordes mêlées de flûtes d'une pudeur et d'une tendresse bouleversante : chez lui jamais rien de trop, ni de surenchère technique ni expressive, tout est là où il faut. Il ne s'appesanti jamais sur un thème nostalgique, ne fait que l'évoquer pour passer à quelque chose de plus enjoué. L'usage de la musique populaire américaine est plus intense que jamais, danses, rondes, musiques de fêtes en tout genres, retravaillées et intégrées à l'oeuvre avec un naturel déconcertant. C'est une musique libératrice, subtilement colorée par de savants mélanges de timbres, émouvante sans être introspective, qui évoque bien souvent une nuit étoilée dans la prairie ou une scène de la vie d'un ranch avec une densité de sentiments unique.

    Preamble for a Solemn Occasion (1949 - 6' )

    La solennité coplandesque est tout ce qu'il y a de plus radieux, ça respire le petit déjeuner à la Ricoré sur la terasse. Un "préambule solennel" sans pompe ni faste.

    Nouvelle pause

  6. #6
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    Je reprends mon marathon sur la musique symphonique de Copland

    Orchestral Variations (1957 - 13')

    Seule vraie concession de Copland au sérialisme : il essaie de résister à la froideur du système par des colorations orchestrales chaleureuses, on sent qu'il n'y est pas à l'aise. L'oeuvre est une orchestration d'une oeuvre pour piano antérieure.

    Dance Panels (1959 - 27' )

    On entre ici dans la dernière phase de l'oeuvre coplandienne : la quintessence de sa musique, distanciée, toujours aussi peu mélodramatique et aussi ambivalente dans les sentiments qu'elle suscite. Les cordes dominent largement ce ballet, les rythmes entraînants aussi, mais tout depuis les harmonies en demi-teintes, aux couleurs savamment dosées, jusqu'aux thèmes parfois détournés de leur caractère festif, entraîne l'auditeur dans une ambiguïté psychologique, à la frange du candide et du tragique, que peu de compositeurs ont cherché à explorer. Il suffit d'un ralentissement et d'un thème de flûte pour qu'une tristesse sans fond émerge (sublime final).

    Music for a Great City (1964 - 25' )

    Une œuvre très dynamique, basée sur des effets de masses de cuivres et d'accords dissonants. On retrouve néanmoins la clarté coplandienne et une certaine dynamique bernsteinienne. Ca n'a pas la force évocatrice ni la densité de ses plus grandes oeuvres, mais ça reste plaisant.

    Down a Country Lane (1962 - 3' )

    C'est rare qu'un compositeur parvienne à développer un univers en 3 mns de musique. C'est encore plus rare qu'on parvienne en quelques notes à une telle densité. Copland atteindra lui-même rarement un tel degré d'émotion dans un style qui lui est pourtant propre. Une oeuvre pourtant sans prétention, mais d'une simplicité bouleversante.

    Connotations (1962 - 19' )

    Ici on a soit affaire à un Copland plus angoissé, ou moins inspiré, ou plus vulnérable aux sirènes de l'atonalité. Quoiqu'il en soit, l'œuvre est nettement plus faible que les précédentes et rejoint un peu ses désastreuses Variations. Il perd en originalité, en couleur, en profondeur, fini la tendre ambiguité des grandes oeuvres, on est dans cette angoisse atonale simpliste. Seule l'orchestration chaude et colorée rappelle qu'on écoute du Copland.

    Inscape (1967 - 14' )

    Œuvre clone de "Connotations", Copland est toujours en phase basse. Il faudra attendre le magnifique Duo pour qu'il retrouve son inspiration.

    Three Latin-American Sketches (1971 - 10' )

    Une sorte de résumé de l'œuvre de Copland dans laquelle on retrouve tous les paysages et les ambiances évoquées dans sa carrière musicale. C'est aussi sa dernière œuvre d'envergure. Assez distanciée, moins haute en couleur que les autres, elle n'en demeure pas moins émouvante par son apparente évidence. C'est le 2ème sketche, empreint de cette tendresse des grands espaces, qui est le plus troublant.

  7. #7
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    Les oeuvres vocales.

    Remarquable présentation.

    Pour compléter, il faudrait parler du concerto pour clarinette.

    C'est probablement l'oeuvre de musique dite "savante" dont je collectionne le plus les interprétations (encore plus que pour les sonates pour piano et les quatuors de Beethoven).

    Du temps d'Abeille, j'avais réécouté toutes mes interprétations, et j'avais fait un message très long.

    Pas trop envie de refaire cela en ce moment, et je n'ai rien gardé de ce que j'ai écrit, car je tiens à la spontanéité.

    L'interprétation que j'écoute le plus souvent est celle de Laura Arden avec le Nashville Chamber Orchestra, dirigé par Paul Gambill chez Naxos.

    Cette interprétation n'a eu que de bonnes critiques, partout dans le monde, alors que je la trouve personnellement exceptionnelle.

    Probablement que le fait d'avoir été enregistrée pour Naxos lui a fait avoir une petite décôte inconsciente de la part des critiques (comme pour beaucoup d'autres disques exceptionnels: la série des quatuors anglais par le Maggini String Quartet, par exemple).

    Bonne nuit,

    Tahar


  8. #8
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    Merci Tahar ! Je ne connaissais pas du tout cette interprétation... Tu fais bien de parler de la discographie, qui est la grosse lacune de mes petites présentations. D'autant que pour Copland elle est très riche. Je ne connaissais pour ce concerto que celles de Stanley Drucker et de Benny Goodman. Mon enthousiasme m'emporte sans doute trop loin, mais pour moi cette oeuvre est le plus beau concerto pour clarinette que je connaisse.

    Gilles

  9. #9
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    What to listen for in music

    Il est intéressant aussi de signaler qu'Aaron Copland a écrit en 1957 un petit guide à l'usage du néophyte:



    C'est informatif, roboratif, sans prétention, et d'une clarté telle dans les termes, que n'importe quel professeur, dans n'importe quelle matière, pourrait en prendre de la graine.

    Je ne sais pas si cela a été traduit en français un jour: la version originale anglaise, en est déjà (au moins) à sa huitième édition en paperback depuis l'origine.

    Tahar

  10. #10
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    Les oeuvres vocales.

    Citation Envoyé par Couack Voir le message
    Les oeuvres vocales valent également le déplacement (en particulier son opéra "The Tender Land", véritable manifeste de son esthétique, et les 12 Poems of Emily Dickinson).

    je reviens un peu sur les oeuvres vocales.

    Les 12 poèmes d'Emily Dickinson avaient été abordées lorsqu'on a parlé du disque de Joyce DiDonato "The deepest Desire".

    Je veux signaler le travail de composition - qui ressemble beaucoup à ce qu'a fait Maurice Ravel d'ailleurs avec les chants populaires - d'Aaron Copland dans les deux recueils d'Old American Songs.

    Je n'ai pas le temps de faire long: je reviendrai donc.

    Deux fois cinq chansons: des Minstrel's songs, deux ballades, un hymne religieux, un Shaker song, un campaign song, une lullaby, un children's song et un Revitalist song, et un vrai travail de re-composition.

    Pour les découvrir, rien n'a jamais dépassé la voix profonde du grand William Warfield, accompagné par le compositeur.

    Le premier livre a été enregistré en Août 1951 et le deuxième en Août 1953.

    A plus tard, pour un peu plus de détails.

    Tahar

  11. #11
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    Old American Songs.

    Deux livres.

    Old American Songs (Set 1)

    The Boatmen's Dance (Minstrel Song, 1843)

    The Dodger (Campaign Song)

    Long Time Ago (Ballad)

    Simple Gifts (Shaker Song)

    I Bought Me a Cat (Children's Song)


    Old American Songs (Set 2)

    The Little Horses (Lullaby)

    Zion's Walls (Revitalist Song)

    The Golden Willow Tree (Anglo-American Ballad)

    At the River (Hymn Tune)

    Ching-a-ring-Chaw (Minstrel Song)



    Lorsqu'on lit les titres de ces chansons, elles sont toutes familières, à un titre ou à un autre, à toute personne ayant passé une partie de sa vie sur le continent américain.

    Que ce soit les Pretty Little Horses, que les parents chantent et miment à leurs bébés et jeunes enfants pour arriver à les faire dormir, ou I Bought Me a Cat, que ces mêmes parents chantent à leurs enfants un peu plus âgés pour les faire rire, ou encore Shall we gather at the River ou Simple Gifts, qu'on retrouve plutôt dans les églises, lors de circonstances souvent moins gaies, comme des funérailles.
    C'était d'ailleurs le cas, hier à Sarnia, par une belle journée d'automne à l'église Anglicane: les funérailles se sont terminées par l'organiste jouant la mélodie de At the River, juste après la communion, et finissant la cérémonie par l'assemblée chantant Simple Gifts et Amazing Grace.

    Bref, des chansons enracinées dans l'identité américaine.

    Ce qui est remarquable chez Copland, ce sont les mêmes qualités que chez Ravel: cette capacité à s'emparer de textes et de mélodies populaires de propos et d'horizons divers et d'en rendre à chaque fois l'universalité.

    Quant à l'interprétation, William Warfield - longtemps marié à Leontyne Price - est un très grand artiste: de la trempe de Paul Robeson, sans conteste. On n'a que peu de témoignages enregistrés de cette grande voix, et la conjonction de délicatesse, de simplicité, et de grandeur et de hiératisme qu'il met dans cette interprétation, est au dessus de tout éloge.



    Tahar
    Dernière modification par Tahar Mouslim ; 26/10/2007 à 16h26.

  12. #12
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    J'ai ces songs couplées avec celles de Ives dans l'édition Argo avec Samuel Ramey; je ne sais pas si c'est une bonne version mais ça m'a bien plû. Je vais essayer de mettre la main sur celle dont tu parles (avec le compositeur). Quant au livre, j'ignorais jusqu'à son existence, mais je vois qu'il est disponible chez Amazon pour une somme plus que modique.

  13. #13
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    Bon, les symphonies maintenant.

    Copland en a écrit trois, toutes très différentes.

    Symphonie n°1 "Organ" (1924 - 25')

    Là il était encore un peu vert, et toujours dans le climat grinçant des débuts. Un premier mouvement inquiétant, dominé par une mélodie entêtante et fantômatique de l'orgue sur des jeux d'anches doux; mais un hautbois guilleret (II) nous ramène dans la prairie avec ses ranchs et ses marmites de haricots fumants. Puis reviens l'ambiance Dracula, encore accentuée dans un assez burlesque final où l'on sent tous les ingrédients du sinistre d'opérette qu'affectionnait Copland à ses débuts. Sympa mais sans plus, il faut quand même souligner une très habile intégration de l'orgue à l'orchestre.

    Symphonie n°2 "Short Symphony" (1933 - 16')

    Un petit miracle : cette symphonie de 16' doit contenir autant de matériau thématique
    que certaines qui en font 3 fois plus, et il y a ces étonnantes harmonies coplandiennes qui mêlent si étroitement le parfum de la prairie, la touchante simplicité et la tendresse la plus étrange. Le mouvement lent surtout est un sommet. A se demander comment une oeuvre peut être aussi fouillée tout en restant d'apparence modeste et évidente.

    Symphonie n°3 (1944 - 44')

    Cette œuvre fait vraiment regretter que Copland n'ait pas écrit davantage de symphonie, et se place avec Appalachian Spring, au climax de sa carrière de compositeur. C'est aussi son oeuvre de la plus grande envergure par la durée et les effectifs orchestraux engagés. Ca commence par un choral de cordes et de flûtes suspendu dans les hauteurs, avec des couleurs dorées de coucher de soleil sur la grande prairie américaine, avant que ne se développent plusieurs thèmes majestueux aux cuivres. La fin revient à un climat plus confidentiel avec quelques bois à peine soulignés par les violons. Le mouvement II est plus vif, avec de très beaux air et une bonne humeur contagieuse. III- Ici on aura tout le loisir de se laisser bercer par les harmonies uniques de Copland, transparentes et lumineuses. Ce mouvement lent est centré sur les cordes, avec des harmonies limpides à peine teintées de nostalgie. IV- Apothéose finale avec la célèbre Fanfare for the Common Man, ce long final conclut magistralement et sans une faute de goût une oeuvre qui est, pour moi, une des plus belles symphonies du siècle.

  14. #14
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    J'en finis avec la partie orchestrale de l'oeuvre par les concertos. Tahar a déjà évoqué le très beau concerto pour clarinette. Il existe également un concerto pour piano moins abouti mais qui ne manque pas d'intérêt.

    Concerto pour piano (1926 - 16')

    Dans un contexte post-romantique/debussyste/stravinskien rythmique, Copland déboule avec son pastoralisme zen, sa prairie calme et son Tender Land. Le Ier mvt de ce concerto est tout cela, du calme, de la contemplation, de la tendresse. La vivacité du II démontre quant à elle une intelligence rythmique inattendue dans une oeuvre de jeunesse. On retrouve quand même certains accents narquois de sa Dance Symphony et de sa Symphonie n°1 dans cette oeuvre.

    Concerto pour clarinette & harpe (1949 - 17')

    Il faut d'abord commencer par souligner que l'oeuvre a été écrite pour Benny Goodman, qui paraît-il en avait été plus qu'ému. Sans doute pour moi le plus beau concerto pour clarinette jamais écrit (on est fan ou on est pas). Le I est un modèle d'équilibre d'une précision fantastique entre une clarinette rêveuse, une harpe régulière comme une horloge et des cordes souples aux couleurs de la prairie. Après une cadence plus vive, on attaque un II jovial et gaillard rythmé par un piano espiègle. Pas de narcissisme ni de nostalgie chez Copland, et la tendresse nostalgique du I n'est déjà plus qu'un vague souvenir. La clarinette virevolte, gambade, accompagnée par un orchestre léger et enthousiaste.

  15. #15
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    Quelques repères discographiques.

    Pour compléter ce remarquable panorama.

    Appalachian Spring, ce ballet pour Martha, a fait l'objet d'une interprétation vivante, engagée, et superbement virtuose de William Steinberg et de son Pittsburgh Symphony Orchestra en mai 1967.

    Cela fait partie de la fournée qui comprenait aussi la septième symphonie de Bruckner, dont j'avais parlé dans une vie antérieure.

    C'est un très bel enregistrement: ça commence de manière mystérieuse, un peu sombre, mais sans angoisse. On est parti pour une belle histoire, lyrique, enlevée, mais effectivement aussi feutrée et ambigue, par moments.

    Même si je reconnais avoir quelques biais (positifs) pour ce grand musicien, il me semble difficile d'écouter cette interprétation objectivement sans reconnaitre que Bill Steinberg était un grand chef d'orchestre, direct, engagée, démiurge.

    Une interprétation aujourd'hui difficile à obtenir autrement que dans des circuits d'oaccasion, reparue en 1988 chez MCA Classics, couplé avec Billy the Kid, toujours par Steinberg et Pittsburgh, et toujours épatants, et avec les Four Dances de Rodeo, et El salon Mexico par Maurice Abravanel et son Utah Symphony.

    Bien que très belles aussi, ces interprétations (plus anciennes: décembre 1958 et février 1959 respectivement), ne me semblent pas aussi abouties, que ce soit intellectuellement comme en matière de mise en place orchestrale (il faut dire que la première de ces quatre danses Buckaroo Holiday est très difficile de mise en place!!) que celles de Steinberg.

    Au total, c'est une très belle alternative aux interprétations plus connues de Copland, de Tilson Thomas et de Bernstein par exemple.

    A noter que - dans Appalachian Spring - Copland cite en intégralité, le Shaker song Simple gifts, et en offre une série de variations assez époustouflantes.

    A noter aussi que l'interprétation de ce même Appalachian Spring par Paul Gambill et son Nashville Orchestra est presqu'aussi engagée que celle de Bill Steinberg.

    Quant à William Warfield, grand chanteur, grand poète, grand être humain: j'ai ouvert un fil à sa mémoire dans le forum vocal, et j'incite à aller lire

    ce n'est pas faire injure à l'excellent Samuel Ramey - ni à l'excellent Thomas Hampson - que de dire qu'il y a vraiment quelque chose en plus dans la voix et dans l'interprétation de William Warfield, qui la rend unique.

    Tahar
    Dernière modification par Tahar Mouslim ; 26/10/2007 à 23h04.

  16. #16
    Administrateur Avatar de Philippe
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    Ah là là Couack et Tahar ! quelle splendide présentation



    Je sens qu'on a bien fait d'ouvrir ce forum


    Merci les amis ! et bravo !

  17. #17
    Membre Avatar de Tahar Mouslim
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    Troisième symphonie: quelques pistes discographiques.

    La troisième symphonie est une oeuvre plutôt imposante par sa longueur.

    Je voudrais parler ici de deux interprétations moins connues que d'autres, ce qui ne signifie pas que les habituels piliers soient devenus mauvais, mais, plutôt, a contrario, que d'autres pistes peuvent valoir la peine.

    Quelques propos liminaires: Lenny a toujours bien défendu cette symphonie.

    Comme je l'avais dit dans une autre vie: pour moi, aucune hésitation, la première interprétation, plus brute de fonderie, plus rude, chez Sony:



    J'ai d'ailleurs acquis le disque Sony, alors que je n'ai pas acquis - après emprunt - le disque DGG.

    Neeme Järvi a programmé plusieurs fois cette symphonie avec le Detroit Symphony: son interprétation, chez Chandos, est fort belle (je l'ai écoutée, pas pas acquise), mais je la trouve moins intéressante que les deux disques dont je vais parler maintenant.

    Yoel Levi: Atlanta Symphony Orchestra



    D'abors, il faut souligner la qualité de la prise de son, qui rend les contrastes et écarts de dynamique avec force et naturelle.

    Ensuite, il y a l'orchestre d'Atlanta, d'une homogénéité et d'une virtuosité rare dans les pupitres.

    Enfin, Yoel Levi: son approche ne sera pas pour tout les goûts.

    C'est dans l'ensemble sombre, par moments vraiment "gloomy": on se croirait dans les rues de Londres rejoignant Baker Street, au milieu d'une enquête de Sherlock Holmes, ou même au milieu du film "gangs of New York".

    C'est clair que le côté coucher du soleil dans la grande prairie et la luminosité sont souvent absente.

    Pour pas mal de gens, ça constitue "a little bit of a stretch", pour moi, c'est fascinant....et cela démontre aussi la capacité de cette oeuvre à supporter diverses approches et diverses lectures, ce qui est le propre des grandes oeuvres.

    A mes oreilles, c'en est une, sans conteste.


    Eiji Oue: Minnesota Orchestra

    Si on ne les écoutait que dans cette oeuvre, on n'aurait sûrement aucun mal à penser qu'Eiji Oue est un artiste beaucoup moins neurasthénique que Yoel Levi:



    Quelques mots sur la prise de son: peut-être encore plus réussie, si c'est possible, que celle de Telarc.

    La conception de Eiji Oue est beaucoup plus proche de celle de son mentor Bernstein.

    A vrai dire, en écoutant Oue, je retrouve la conception de son mentor Leonard Bernstein chez Sony, mais sans la raucité militante et avec plus de nuances mises en lumière, plus de bonheur, de respiration, sans pour autant tomber dans ce que je n'aimait pas dans Bernstein II chez DGG: écarts de tempis, creusement permanent des phrases et profusion de couleurs opulentes.

    Deux manières différentes, mais superbes, d'écouter cette oeuvre superbe.

    Bonne journée,

    Tahar

  18. #18
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    Les briques de base de la discographie.

    Pour celles et ceux qui auront été tentés par ces description, Sony a édité en 1991 et en l'an 2000 deux collections faisant un tour assez large de la musique d'Aaron Copland.

    Cela, c'est la bonne nouvelle

    Viennent ensuite, quelques mauvaises nouvelles:

    - c'est Sony, donc les deux collections sont out of print,

    - c'est Sony, donc il y a des doublons importants entre les deux collections,

    - c'est Sony, donc il y a quand même presque toujours au moins une oeuvre qui rend le volume intéressant, et qui incite à accepter que les quatre cinquièmes du volume soient en doublon,

    - c'est Sony, donc il y aussi des doublons avec d'autres collections Sony, comme la Bernstein Century collection

    Malgré tout, cela mérite de tenter d'obtenir l'une ou l'autre des deux collections dans les circuits d'occasion.

    The Copland Collection

    Orchestral & Ballets Works 1936-1948



    Early Orchestral Works 1922-1935



    Orchestral Works 1948-1971




    A Copland Celebration

    Volume 1



    Volume 2



    Volume 3




    Bien entendu, il manquera toujours deux ou trois choses, mais, entre la collection Naxos, les musiques de films chez RCA par Slatkin et le disque choral de Michael Tilson Thomas - s'ajoutant aux disques déjà commentés dans ce fil - cela fait une bonne base de départ

  19. #19
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    Je poursuis l'exploration de l'oeuvre de Copland avec les opéras. Copland ne se considérait pas lui-même comme un compositeur d'opéra "impénitent" contrairement à son ami Britten (j'en profite pour glisser une photo qui m'a toujours ému)



    Bon, il est certain que les opéras de Copand n'ont pas la puissance expressive de ceux de son ami d'outre-Atlantique, mais ça me semble quand même valoir un petit détour. Il faut souligner d'abord que ses deux uniques opéras ont été écrits pour des orchestres de jeunes musiciens et de jeunes chanteurs : la partition est donc délibérément simple, ce qui ne nuit pas à la finesse de l'écriture par ailleurs.

    The Second Hurricane (1937 - 46' )

    Ce petit opéra n'est pas l'opus le plus passionnant du compositeur, ni pour sa musique ni pour son livret : une œuvre didactique, comme The Tender Land, mais nettement moins affinée. La présence inutile d'un narrateur qui se croit obligé de sans cesse expliquer les échanges des jeunes gens est exaspérante. Certains passages sont musicalement sympas, mais globalement c'est assez terne et on est loin de l'ambiguité sentimentale de son second opéra. De plus, l'histoire véhicule un message téléphoné et moralisant : on est plus heureux quand on ne se dispute pas que quand on se dispute.

    The Tender Land (1954 - 1h36' )

    Le prélude magnifique, d'une simplicité et d'une pudeur incroyablement émouvantes, comme l'est le chant quasi incantatoire ("the cold, cold weather") de la mère, le formidable équilibre formé par le duo chanté de la mère et parlé de la fille, les intonations délicieusement paysannes du facteur; tout ça sent bon les champs de blé. Globalement le côté rural est très marqué, le livret aurait pu servir pour La petite maison dans la prairie : Copland joue magnifiquement de cette candeur pastorale à laquelle il donne une dimension et une ambiguïté étonnantes. Chaque mélodie va dans le sens de l'ambiguïté psychologique, toujours entre joie populaire et tristesse méditative : son invention mélodique semble d'ailleurs inépuisable. Pour un compositeur qui ne se considère pas comme un compositeur d'opéra, et compte-tenu des contraintes de composition, c'est assurément un coup de maître.

  20. #20
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    Avec la musique de chambre, on pénètre à mon avis dans la partie la moins intéressante de l'oeuvre de Copland. D'ailleurs c'est une musique qui n'a pas eu au dique le succès de sa musique symphonique comme en témoigne le faible nombre d'enregistrements. Comme le disait Tahar plus haut, les séries de coffrets Sony se recoupent largement, mais pas pour la musique de chambre (la seconde série présentée dans son post fait la part belle à cette partie de l'oeuvre, alors qu'elle est absente de la première, ce qui oblige les fans à acheter les deux). A retenir surtout : son duo pour flûte et piano qui est une petite merveille.

    Dans le détail, ça donne ceci :

    Trio Vitebsk (1929 - 12' )

    Très sec et très raide. On n'y retrouve pas du tout la tendresse pastorale et la vivacité chatoyante dans lesquelles il excelle.

    Sextuor avec clarinette (1937 - 15' )

    C'est une reprise de la symphonie n°2, réalisée parce que certains chefs la trouvaient trop compliquée à diriger. La version présente est très peu colorée et aussi peu enthousiasmante. Quand on connait la version originale, c'est une grosse déception : ceci démontre assez que Copland est un compositeur de l'orchestre.

    Sonate pour violon & piano (1943 - 20' )

    Beaucoup de vivacité et de bonne humeur, mais nettement moins raffiné que le duo pour flûte et piano qui suivra. Beaucoup d'acidité également ; sa musique de chambre est souvent plus âpre et plus distante que le reste.

    Quatuor avec piano (1950 - 20' )

    La musique de chambre de Copland est souvent décevante car il semble croire y gagner des galons en sacrifiant à un style abstrait en vogue à l'époque. C'est encore le cas de ce quatuor, dénué de toute la finesse et de toute l'ambiguité des ses grandes oeuvres.

    Nonet (1960 - 20' )

    Une œuvre assez sombre qui ne ressemble pas vraiment à du Copland : il devait avoir le blues, car on se croirait plutôt chez Chostakovitch (en moins bien). Trop grinçant, trop acide, uniquement des mouvements lents.

    Duo pour flûte & piano (1971 - 13' )

    Une oeuvre extrêmement émouvante, qui concentre avec une désarmante simplicité toutes les qualités de son œuvre : tendresse pudique, finesse des enharmonies, rythmes dansants et ciselés, et miraculeuses colorations. Tout ce qui fait le génie de Copland s'y retrouve en concentré, et c'est aussi, hélas, une de ses dernières oeuvres importante avec les 3 Latin-American Sketches composés la même année. Après ce duo, profondément affecté par la maladie, il ne composera plus guère que quelques petites pièces pour piano, jusqu'à sa mort en 1990.
    Dernière modification par Couack ; 30/10/2007 à 18h26. Motif: erreur de date

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