Jarvi / Beethoven

[françois1309]

Hello,

Allez, lançons des sujets, ouvrons des fils pour faire vivre ce nouveau forum!

Depuis quelques jours, j'écoute en boucle les symphonies de beethoven par Jarvi et la Kammer Philharmonie Bremen. Je perçois bien quelles sont les intentions du chef (capitaliser les apports des chefs baroques, mais en y ajoutant la virtuosité et la précision d'un orchestre de chambre moderne). J'admire la clarté, la vigueur, le punch de ses interprétations, tant célébrées par ailleurs. je reconnais que c'est un Beethoven à nul autre pareil; Mais....il me manque quelque chose! La masse sonore est quand même bien légère, surtout dans une symphonie comme l'eroica...La marche funèbre de celle-ci ou le 2nd mouvement de la 7ème pris aussi vite, ça me convainc qu'à moitié aussi. Dans marche funèbre, il y a "marche" d'accord, mais bon...c'est un peu froid, le pathétique beethovenien ne me semble pas tout à fait là.

Et vous? Etes-vous séduits ou déçus?

[sophie]

Bonsoir François,

Je dirais que je suis plutôt séduite par ce beethoven là. j'admire la clarté et l'ossature rythmique. Je n'entends guère de froideur dans la mesure où jaervi a rodé ses interprétations en concert. D'après les comptes-rendus qu'on peut lire sur les forums allemands le concert à la beethovenfest était parait il grandiose. Jaervi m'a personnellement moins convaincue dans la quatrième de brahms vendredi dernier. Est ce que vous pouvez essayer de définir le pathétique beethovenien, je pose la question parce que j'ai l'impression que les gens y voient une chose et son contraire.
Bien à vous,

Sophie, transfuge de l'ex abeille musique

[Maestro]

Salut,

Je partage les impressions de Sophie.
Jarvi fait ici une synthèse que je qualifierai de presque parfaite, entre les apports des baroqueux, les relectures des partitions originales, le tout sur instrument moderne.

La sonorité ? C'est vrai qu'elle parait à certains moments (je n'ai écouté que les 3ème et 8ème au disque + youtube) un peu fine et parfois sèche, mais on est loin de ce qu'a fait Rattle avec Vienne. Ecoutez par exemple l'intro de la 1ère symphonie. J'ai l'impression d'écouter la même introduction, jouée avec autant d'ampleur et d'éloquence, par Barenboim ou Wand...alors que l'orchestre a un effectif de 40 musiciens maxi.

Il est bien évident qu'il n'y a pas la chair des Karajan, Furt, Klemperer et les chefs déjà citées, mais ces versions sont assez formidables pour détrôner Harnoucourt, qui parait bien pâle à côté.

[françois1309]

Bonsoir François,

Je dirais que je suis plutôt séduite par ce beethoven là. j'admire la clarté et l'ossature rythmique. Je n'entends guère de froideur dans la mesure où jaervi a rodé ses interprétations en concert. D'après les comptes-rendus qu'on peut lire sur les forums allemands le concert à la beethovenfest était parait il grandiose. Jaervi m'a personnellement moins convaincue dans la quatrième de brahms vendredi dernier. Est ce que vous pouvez essayer de définir le pathétique beethovenien, je pose la question parce que j'ai l'impression que les gens y voient une chose et son contraire.
Bien à vous,

Sophie, transfuge de l'ex abeille musique

Hello Sophie et Maestro,

d'accord avec vos impressions sur la clarté du son, la virtuosité de l'orchestre et la mise en oeuvre réussie de la synthèse rigueur baroqueuse / maîtrise moderne.

Je réponds à Sophie sur la notion de pathétique. J'attribuerais volontiers à beethoven la conception que donne Schiller de cette notion dans son essai sur le Pathétique (1793) : l'expression exacerbée de la souffrance, mais aussi de la résistance morale héroïque à cette souffrance. Or, il ne me semble pas que Jarvi exprime très bien ce conflit, qui semble tranché d'avance en faveur de l'héroïsme. A l'écoute de cette 'Eroica', je vois très bien Bonaparte au pont d'Arcole, mais pas tellement le destin tragique de l'archiduc Charles, ami de beethoven tué en 1806 (l'année de l'Eroica) à la bataille d'Iéna, en dépit du formidable vent de patriotisme allemand levé contre Bonaparte. Pardon pour ce détour historico-biographique, qui me permet d'illustrer mes impressions.

Or, il me semble c'est de ce désastre initial et de cette souffrance que renaîssent la pulsion de vie et l'énergie créatrice chez Beethoven. Ainsi la surdité qui conduit aux grands chefs d'oeuvre.

bref, je trouve Jarvi un peu unidimensionnel dans son approche des symphonies. C'est un Beethoven solaire et heureux. Ce n'est pas désagréable à écouter, d'ailleurs. Mais beethoven doit-il être agréable? Par ailleurs, il me semble que dans ce style clair et énergique, Carl Schuricht était plus convaincant il y a tout juste 50 ans à la tête de la Société des Concerts du Conservatoire (EMI)

Mais ce ne sont que les impressions d'un béotien....

Bien à vous, F.

[hideux67]

Bonjour,

Je vous remercie pour la définition du pathétique selon Schiller. Parce que j'ai toujours eu l'impression que le terme de "pathétique" était rattaché à "romantique" et donc que l'on avait droit à une interprétation de l'oeuvre de Beethoven "déformée" par le "romantisme" (donc une époque que l'on nous décrit dans les livres comme plus au moins postérieure à celle de Beethoven).

Pourquoi ce préambule, parce que lorsque l'on dit à P. Jarvi que ces interprétations manquent de chaleur, qu'il utilise le vibrato de manière parcimonieuse, que ces interprétations sont un peu raides, .... Jarvi vous dit que "Beethoven ne connaissait pas l'expression romantique que Wagner inventa plus tard". Jarvi voit Beethoven comme un "classique" comme un héritier du "Siècle des Lumières" et rejette toute mise en scène excessivement "romantique" de sa musique.

Mais paradoxalement, Jarvi préfère les interprétations de Furtwängler, Klemperer, Knappertsbusch et Bruno Walter et n'aime pas celles de Norrington et Harnoncourt. De plus pour lui, personne ne connaît Beethoven comme Furtwängler.

Les caractéristiques de son interprétation de Beethoven sont donc une synthèse des apports bénéfiques de la "tradition" (virtuosité orchestrale, etc...) et des "préceptes des baroqueux" (taille de l'orchestre, tempo et sa conservation, etc...) tout en rejetant les "dérives wagnériennes", et les nombreux défauts (dogmatisme, techniques instrumentale et orchestrale défaillantes,...) qui entâchent la plupart des interprétations "baroqueuses" de l'oeuvre de Beethoven.

Ces disques chez RCA comme son concert japonais des trois premières symphonies de Beethoven disponible sur youtube (en version saucissonnée et visuellement et auditivement moyennes) ou ailleurs sur internet en version techniquement plus satisfaisante (surtout l'image) sont à mes yeux très intéressantes et dans "l'air du temps" (cf les approches parallèles de Haitink-London SO, Vanska Skrowaczewski sans parler des deux intégrales Mackerras).....

Finalement dans Beethoven, Jarvi est le Kleiber père ('50), Szell ('60) ou Kleiber fils ('80) de sa génération....

MH

[hideux67]

J'oubliais Gielen (80' et 90')

MH

[Paul Machin]

Bonjour,

A propos des enregistrement de Paavo Järvi, j'ai remarqué que la stéréo est très peu marqué. Pas d'effet ping-pong gauche-droite mais un orchestre très central. Le fait que les violons I soient à gauche et les violons II à droite est peut-être une des causes.

Grâce à cela, l'écoute au casque est fort agréable et l'impacte redoutable.
Bref les meilleurs symphonies de Beethoven au casque : c'est déjà ça !!

Rq.: comme à peu près tout le monde je n'écoute que la piste CD su SACD...

Paul.

[Gaby]

Jarvi dans Beethoven, je ne connais que le premier volet 3e 8e, qui me semble excellent, tempis très vifs, lecture saillante, vivante, belle prise de son naturelle, orchestre très réactif...

Je n'apprécie pas en revanche cette manière d'écarter le pathos des mouvements lents dramatiques. Cela manque d'émotion, face aux Abbado, Furtwangler, Barenboim ou encore Karajan.

Malgrès cela une excellente nouvelle et un superbe cycle en vue, meilleur que celui d'Harnoncourt et consorts car moins extrêmiste.

[alain]

J'ai écouté hier, sans savoir qui dirigeait, la 7e par Jarvi. Et j'ai justement apprécié, grandement, qu'il écarte le pathos de l'allegretto pour en faire un moment de musique qui ne doit justement, et heureusement à mon avis, rien à Furtwängler... dont la vision, à mon avis, excessivement chargée de pathos, n'est en rien la panacée.

Mais la surprise est venue d'un autre chef qui, sans être marqué le moins du monde par l'esprit baroque, ni en effectifs ni en termes de phrasés... a mis tout le monde d'accord... et pour une surprise ce fut une surprise... mais chut... Les écoutes à l'aveugle, il n'y a que ça de vrai...

[Gaby]

Christian Thieleman !!

pardon ça m'a échappé...

[alain]

Pas du tout !

[Mzlo]

Ce serait Vanska que je n'en serai pas étonné.

[sophie]

Mais non, moi je pense que c'est Georges Prêtre...

[Gaby]

Pour une surprise, Vanska en serait une, sa 5e est d'une platitude d'un encéphalogramme d'escargot...

[Mzlo]

Pour une surprise, Vanska en serait une, sa 5e est d'une platitude d'un encéphalogramme d'escargot...

On ne fréquente manifestement pas le même hôpital.

[Gaby]

Bon j'ai peut être pensé les escargots pour plus bêtes qu'ils ne le sont, mais ça ne m'empêche pas de m'ennuyer terriblement dans les lectures de Vanska.

[françois1309]

Hello,

le 1er message de gaby résume parfaitement mes impressions: quelque chose qui manque dans les mouvements lents. ce n'est pas un beethoven qui souffre beaucoup, la dialectique entre souffrance et héroïsme créateur est un peu absente.

Alain, donnez-nous la réponse...c'est un enregistrement récent?

[alain]

Vous ne pouvez pas trouver. Je vous recommande juste d'écouter ce roi de la galette, pas pour ce que nous racontons (d'autant que ce que je dis de Furtwangler qui n'est pas diffusé va en faire hurler), mais pour jouer le jeu et pour ce que j'estime être la confirmation d'une réévaluation en cours...
C'est un chef vivant, pas un ancêtre et il dirige une formation on ne peut plus traditionnelle...

[Gaby]

Sawallisch, Haitink, Sanderling, Abbado, Blomstedt...

[Carlo Maria]

Sawallisch, Haitink, Sanderling, Abbado, Blomstedt...

John Nelson !