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Discussion: Debussy et le saxophone

  1. #1
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    Debussy et le saxophone

    Quelqu'un qui possèderait la correspondance de Debussy aurait-il l'obligeance de me renseigner sur le texte original (cad en français) des lettres de Debussy concernant la composition de la "rapsodie mauresque" et les commentaires sur Mme Elisa Hall, particulièrement, les extraits suivants:

    à sa (1ère) femme Lily, le 4 juin 1903

    I do not know why “the Saxophone Lady” appears to me as the Statue of
    the commandatore appeared to poor Don Juan!—She will never suspect
    how much she bored me. Does it not appear indecent to you, a woman
    in love with a saxophone, whose lips suck at the wooden mouthpiece of
    this ridiculous instrument?—That must surely be an old bat who dresses
    like an umbrella.


    à André Messager le 8 juin 1903:

    It is my turn to be scandalously late with you . . . ! Here is the reason:
    several months ago, a lady, who is not satisfied being American but also
    allows herself the bizarre luxury of playing saxophone, commissioned,
    through the intermediary of Georges Longy, a piece for orchestra and
    saxophone obligato. . . . I don’t know if you have a liking for this instrument; as for me, I had forgotten its special sonority to such a degree that I forgot “this commission” at the same time. But the tenacity of Americans is proverbial and . . . the saxophone lady arrived eight or ten
    days ago in Paris at 58 rue Cardinet, asking me for an update about her
    piece!—Naturally I assured her that after Ramses II, it was the thing I
    was thinking about the most.—Still, I had to get down to it, and here I
    am, searching desperately for the most original combinations that are
    most appropriate for bringing out this aquatic instrument. The whole
    thing will be called “Rapsodie orientale.” (It’s the best we’re doing at the
    moment).


    à Pierre Louÿs fin juillet ou début Août 1903

    The saxophone is a reedy animal with whose habits I’m largely unfamiliar. Is it suited to the romantic sweetness of the clarinets or the rather vulgar irony of the sarrusophone (or the contra-bassoon)? In the end I’ve got it murmuring melancholy phrases against rolls on the snare drum. Surely the saxophone, like the Grand Duchess, likes military men? The whole thing’s
    called “Rapsodie arabe” . . . (long live the army, even so). The country’s
    not boring at all, you see? The answer lies in not believing that the sun
    which sets on the hillsides of Bichain is any different from the one
    which goes to rest on the pale terraces of Biskra.


    Compte-tenu de l'amour immodéré que je porte à ce compositeur, je crains d'en rajouter un peu en retraduisant à partir de l'anglais...

  2. #2
    Membre Avatar de Philippe95
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    J'essaierai, si j'y pense, de retrouver le texte dans la Correspondance chez moi.

  3. #3
    Membre Avatar de Philippe95
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    Pouvez vous me dire si vous avez reçu le message que je viens de vous adresser, comprenant les textes originaux ? Je n'en trouve plus trace, ce qui m'inquiète un peu.
    Merci

  4. #4
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    a priori je n'ai rien reçu en message privé depuis la semaine dernière. Pas grave, c'est très gentil à vous d'avoir essayé. J'ai dû me débrouiller autrement et réduire les citations au minimum par manque de place (je regrette toute de même celle sur l'indécence de la femme amoureuse du saxophone) et dans l'urgence de livrer le texte.
    Je referai peut-être plus tard un article plus détaillé sur la Rapsodie pour orch avec sax obligé dans quelques temps. Le sujet et tout ce qu'il y a autour est assez fascinant.

  5. #5
    Membre Avatar de Philippe95
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    Désolé. Je ne sais ce qui s'est passé. Un peu tard ce soir pour vous les renvoyer. Sinon, je vous les lis au téléphone demain, je prendrai le gros Gallimard avec moi. Dites moi juste si c'est encore nécessaire et comment je peux vous joindre.

  6. #6
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    c'est gentil mais je vais me débrouiller comme ça. Merci d'avoir cherché.

  7. #7
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    "Compte-tenu de l'amour immodéré que je porte à ce compositeur, je crains d'en rajouter un peu en retraduisant à partir de l'anglais"

    C'est dommage j'aurais bien aimé lire ça

    Cette rapsodie pour saxophone est une des oeuvres de Debussy que je préfère avec la Plus-que-lente orchestrée et la Fantaisie pour piano et orchestre.
    Dernière modification par Erwan ; 06/01/2011 à 02h58.

  8. #8
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    c'est curieux, moi aussi... je rajouterai la Suite Bergamasque pour compléter la liste des oeuvres supportables (ou plutôt je l'échange contre Printemps qui n'est qu'à moitié réussi).

  9. #9
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    Ce que j'apprécie le plus chez une femme ? Son mari.

    Et bien c'est un peu pareil pour Debussy : ce que je préfère chez lui c'est avant tout Bax, Delius, Bridge, Scott, Gaubert, Joseph Marx, etc. Les "debussysmes" ne me rebutent pas - bien au contraire ! - dès lors qu'ils sont "intégrés" et font partie prenante d'une forme et d'un style particulier.

    J'aime beaucoup la "Pelléas et Mélisande-Symphonie" réalisée par Marius Constant par ailleurs.
    (25 minutes de bonheur en lieu et place de 2h30 d'ennui)

  10. #10
    Modérateur Avatar de lebewohl
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    Il m'est arrivé de trouver, mais je suis sourd et pervers, que Debussy avait intégré pas mal de debussysmes dans une forme et un style particulier.
    Il s'engendre beaucoup d'abus au monde ou, pour le dire plus hardiment, tous les abus du monde s'engendrent de ce qu'on nous apprend à craindre de faire profession de notre ignorance.

    Montaigne

  11. #11
    Membre Avatar de Amitiou
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    Citation Envoyé par lebewohl Voir le message
    Il m'est arrivé de trouver, mais je suis sourd et pervers, que Debussy avait intégré pas mal de debussysmes dans une forme et un style particulier.
    Enorme ^^
    Pour ma part j'aime ses oeuvres de jeunesse, et...je connais peu le reste, mais rien ne m'a vraiment émerveillé.
    Amicalement vôtre.

  12. #12
    Modérateur Avatar de lebewohl
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    Ah... je vais finir par penser que je suis le seul ici à aimer raisonnablement Debussy (je ne l'ai pas aimé du jour au lendemain, notez bien, mais je crois que plus ça va, plus je l'aime) (sans qu'il soit devenu mon préféré, à l'heure où j'écris).
    Il s'engendre beaucoup d'abus au monde ou, pour le dire plus hardiment, tous les abus du monde s'engendrent de ce qu'on nous apprend à craindre de faire profession de notre ignorance.

    Montaigne

  13. #13
    - Avatar de mah70
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    Citation Envoyé par lebewohl Voir le message
    Ah... je vais finir par penser que je suis le seul ici à aimer raisonnablement Debussy .
    Non, non, au besoin j'arrive en renfort.

    Par ailleurs, je constate que les a-debussystes aiment bien les disciples plus ou moins avoués (Bax, Delius, et autres) alors même que moi, debussyste avoué, je trouve ces auteurs souvent assez coupables de déliquescence à force de "à la manière de". Will wonders never cease?
    La seule certitude que j'ai, c'est d'être dans le doute. (Pierre Desproges)

  14. #14
    Membre Avatar de thierry h
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    Citation Envoyé par Amitiou Voir le message
    Enorme ^^
    Pour ma part j'aime ses oeuvres de jeunesse, et...je connais peu le reste, mais rien ne m'a vraiment émerveillé.
    Faut persévérer, et en dernier recours vous acheter éventuellement un sonotone !

  15. #15
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    Trop de choses à écouter avant: en ce moment c'est Clementi! (D'ailleurs Debussy n'en était-il pas un admirateur?)
    Amicalement vôtre.

  16. #16
    Membre Avatar de Jacques
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    Citation Envoyé par Fred Audin Voir le message
    Quelqu'un qui possèderait la correspondance de Debussy aurait-il l'obligeance de me renseigner sur le texte original (cad en français) des lettres de Debussy concernant la composition de la "rapsodie mauresque" et les commentaires sur Mme Elisa Hall, particulièrement, les extraits suivants:
    N'y voyez aucune mauvaise volonté ou lenteur excessive de ma part, mais ce n'est que maintenant que je découvre cette requête, qui m'avait totalement échappé à l'époque alors que je pouvais facilement et rapidement y répondre ()...

    Cela dit, huit mois de retard, ça fait vraiment beaucoup et mon intervention ne sert probablement plus à grand chose (). Mais on ne sait jamais ()...

    Alors voici quand même ces textes originaux, tirés de l'énorme pavé (2330 pages ) paru en 2005 chez Gallimard et contenant toute la correspondance connue du compositeur en question.

    Citation Envoyé par Fred Audin Voir le message
    à sa (1ère) femme Lily, le 4 juin 1903 :
    "(...) Je se sais pourquoi «la Dame au saxophone» m'apparaît comme la Statue du commandeur apparut au pauvre Don Juan ! - Jamais elle ne se doutera combien elle a pu m'ennuyer. Ça ne te paraît pas indécent, une femme amoureuse d'un saxophone, dont les lèvres sucent le bec en bois de ce ridicule instrument ? - Ça doit être sûrement une vieille taupe qui s'habille comme un parapluie. (...)".

    Citation Envoyé par Fred Audin Voir le message
    à André Messager le 8 juin 1903 :
    "(...) C'est à mon tour d'être scandaleusement en retard avec vous... ! Voici pourquoi : une dame qui, non contente d'être américaine, se donne le luxe bizarre de jouer du saxophone m'a commandé il y a quelque mois, par l'entremise de G. Longy, un morceau pour orchestre et saxophone obligé... Je ne sais si vous avez du goût pour cet instrument; quant à moi j'en ai oublié la sonorité spéciale, à tel point que j'ai oublié «cette commande» du même coup. Mais la ténacité des Américains est proverbiale et... la dame au saxophone est débarquée il y a 8 ou 10 jours, à Paris au 58 rue Cardinet, me demandant des nouvelles de son morceau ! - Naturellement je lui ai affirmé qu'après Ramsès II c'était la chose à laquelle je pensais le plus. - Tout de même il a fallu s'y mettre, et me voilà cherchant désespérément les mélanges les plus inédits, les plus propres à faire ressortir cet instrument aquatique. Le tout s'appellera Rhapsodie orientale (C'est ce que nous faisons de mieux en ce moment.) (...)."

    Citation Envoyé par Fred Audin Voir le message
    à Pierre Louÿs fin juillet ou début août 1903 :
    NB : je rajoute au début quelques phrases, qui se rapportent au même sujet et sont assez typiques de leur auteur ()...

    "(...) Excuse-moi... Depuis quelque jours je suis : l'Homme-qui-travaille-à-une-Fantaisie-pour-saxophone-alto-en-mi-bémol (dis un peu ça trois fois sans respirer...). Etant donné que cette Fantaisie est commandée, payée, mangée depuis plus d'un an, il me semble que je suis en retard ? - D'abord ça ne m'amusait que très peu, puis je n'aurais pas pu t'écrire une lettre assez soignée. Le saxophone est un animal à anche dont je connais mal les habitudes. Aime-t-il la douceur romantique des clarinettes ou l'ironie un peu grossière du sarrusophone (ou contre-basson) ? Enfin je l'ai fait murmurer des phrases mélancoliques, sous des roulements de tambour militaire. Le saxophone, comme la Grande-Duchesse, doit aimer les militaires... Le tout s'appelle Rhapsodie arabe... (vive l'Armée tout de même). Tu vois qu'on ne s'ennuie pas à la campagne ? Le tout est de ne pas croire que le soleil qui se couche sur les coteaux de Bichain n'est pas le même que celui qui s'endort sur la blancheur des terrasses de Biskra. (...)".


    Jacques

  17. #17
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    merci beaucoup, Jacques, ça ne servira guère à ce à quoi c'était destiné dans l'instant, mais je conserve néanmoins précieusement pour mes propres archives.

  18. #18
    Membre Avatar de Amitiou
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    "Naturellement je lui ai affirmé qu'après Ramsès II c'était la chose à laquelle je pensais le plus."
    Mais c'est quoi c'est quoi cette expression de fou furieux xD
    Amicalement vôtre.

  19. #19
    Membre Avatar de Jacques
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    Citation Envoyé par Amitiou Voir le message
    "Naturellement je lui ai affirmé qu'après Ramsès II c'était la chose à laquelle je pensais le plus."
    Mais c'est quoi c'est quoi cette expression de fou furieux xD
    Ci-après mon hypothèse, qui "vaut ce qu'elle vaut" ()...

    L'égyptologie était très à la mode au début du XXème siècle (ça atteindra des sommets en 1922, avec la découverte de la tombe de Toutânkhamon). Or, il semble bien qu'au cours des années 1903-1904 furent mises à jour (désensablées) à Karnak, en plus ou moins bon état, de gigantesques statues du pharaon Ramsès II. Ces découvertes frappèrent beaucoup les imaginations et la presse leur consacra sans doute de nombreux et fréquents articles, tous plus sensationnels les uns que les autres.

    Ce devait donc être tout à fait le genre d'événement dont on dit couramment : "on ne parle plus que de ça", ou "on ne pense plus qu'à ça" ().

    Un peu comme l'affaire DSK 108 ans plus tard ( ).

    Jacques

  20. #20
    Modérateur Avatar de lebewohl
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    En tout cas c'est assez drôle...
    Il s'engendre beaucoup d'abus au monde ou, pour le dire plus hardiment, tous les abus du monde s'engendrent de ce qu'on nous apprend à craindre de faire profession de notre ignorance.

    Montaigne

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