Les enregistrements qui vous sont proposés ici ont tous plus de 50 ans. Cela s'entend souvent au son, fréquemment monophonique, - pour ne citer que cet aspect. Cela se remarque aussi, parfois, au style des interprétations. On ne chante plus en français aujourd'hui comme dans les années 50, les violonistes font moins de portamento, les orchestres qui jouent Beethoven ou Mozart sont fréquemment plus "petits". Mais enfin, pour l'essentiel, on entend la même musique et, compte tenu de la variété des interprétations retenues, lorsque c'était possible, pour un même compositeur, il n'y aura pas toujours de quoi s'étonner dans les compositions postérieures à 1750 (si l'on prend comme point de référence la date de la mort de J. S. Bach) : le répertoire classique et romantique ne devrait pas révéler d'autres surprises que la variété des approches des interprètes choisis.

C'est très différent pour la musique plus ancienne.

Le cas de Bach, énormément joué et aimé depuis longtemps, est particulier ; certes, pour la musique pour clavier, on trouvera beaucoup de piano, ce qui horrifiera certains - mais les "querelles" sur le sujet ne sont pas closes. Si les orchestres se sont beaucoup allégés depuis, on trouvait déjà dans les années 50, et même avant, des exécutions « prébaroqueuses ». Les options retenues pour les oeuvres d'orgue trouveront peut-être plus facilement grâce aux oreilles des tenants des interprétations « historiquement informées », comme on dirait outre-Manche.




C'est pour la musique plus ancienne encore, de la Renaissance aux débuts de ce qu'on n'appelait pas encore le baroque, que les choix que nous vous proposons sont nettement imparfaits.

D'abord, on jouait très peu Monteverdi, - sauf en France ; peut-être un peu plus Schütz dont les choeurs n'ont jamais vraiment quitté le répertoire du Kreuzchor de Dresde, ou Buxtehude familier des organistes luthériens. On entendait un peu en Angleterre certaines oeuvres élisabéthaines, un peu en France quelques chansons de la Renaissance. Schein, Scheidt, Morales, Guerrero, Gesualdo, n'étaient guère plus que des noms dans les bibliothèques ; même Couperin et Rameau, malgré toute l'admiration que leur portaient les compositeurs français du tournant du 20e siècle, étaient à peine joués, sans qu'on dispose toujours des instruments mêmes pour lesquels la musique était écrite, et avant que les travaux de musicologues ne redonnent une idée des modes d'exécution et des effectifs.

On a pris ce qu'on a trouvé, quand on a trouvé quelque chose. Il arrivera donc qu'on entende un madrigal chanté par un grand choeur romantique au lieu d'un ensemble vocal à un par voix ; il se trouvera des récitatifs avec un continuo au piano moderne, avant qu'un orchestre symphonique, sans cornet à bouquin, sans viole de gambe, sans sacqueboute, n'enchaîne.

Trop peu de choses finalement et qu'on a totalement perdu l'habitude d'entendre jouer ainsi, au point de les rendre méconnaissables. Mais un bon musicien reste un bon musicien : ce n'est peut-être pas exactement ce qu'imaginait Schütz que chante Fischer-Dieskau, mais c'est néanmoins de la belle musique !