Avant de commencer ma contribution d’aujourd’hui, permettez-moi une petite écartade, histoire de situer mon état d’esprit ces jours-ci.
Je ne me considère pas particulièrement religieux – en fait, je me considère plus spirituel que religieux (je ne sais pas si c’est quelque chose qui fait du sens…). Toutefois, lorsqu’on arrive au Carême, je me sens plus porté vers les traditions catholiques. Pour moi, c’est période de réflexion et de réévaluation, et je me tourne beaucoup plus ces jours-ci vers les pièces sacrées et spirituelles de ma collection qu’à tout autre moment de l’année.
Donc, pour les prochaines semaines, vous me permettrez de diriger mes propos vers ce genre de musique, et vers les œuvres «de circonstances».
Pour notre billet d’aujourd’hui, je vous propose des œuvres de Francis Poulenc, hormis une sélection, il s’agît ici d’œuvres sacrées.
L’homosexualité de Poulenc est bien documentée, et je trouve personnellement que ceci a dû placer Poulenc dans une situation délicate et difficile au niveau de sa spiritualité et de sa foi catholique. Le critique Claude Rostand, pour souligner la coexistence chez Poulenc d’une grande gravité due à sa foi catholique jumelée avec l’insouciance et la fantaisie, a forgé la formule célèbre «moine ou voyou».
Il y a d’ailleurs deux pèlerinages de Poulenc à Rocamadour qui correspondent à des épreuves difficiles: le décès du compositeur et critique Pierre-Octave Ferroud en 1935, et celui de l’artiste Christian Bérard en 1949. On suggère d’ailleurs que le pèlerinage de 1935 est, en grande partie, responsable pour un renouvellement de la foi chez Poulenc, qui avait délaissé l’Église après le décès de son père en 1917.
La première sélection que j’ai choisie est le Stabat Mater, composé en 1950 et dédié à la mémoire de Bérard.
http://www.youtube.com/playlist?list=PL0DDCBDCA919521EC
Le résultat de son premier pèlerinage en 1935 est une succession d’œuvres sacrées: les Litanies à la Vierge noire de Rocamadour, pour chœur de femmes et orgue (1935), la Messe en sol majeur pour chœur mixte a cappella (1937) et Quatre motets pour un temps de pénitence (1938-39). Ma deuxième sélection est ce cycle de quatre motets:
http://www.youtube.com/playlist?list=PLBCDA703BDA258D9C
Danatnt de la même période, et sans doute influencé par les mêmes sentiments, le Concerto pour orgue, timbales et cordes en sol mineur date d’entre 1934 et 1938. Le résultat d’une commande de la mécène Winnaretta Singer, Princesse Edmond de Polignac, héritière de la fabrique de machines à coudre Nord-Américaine et organiste amateure. Originalement conçu comme «pièce facile» que la Princesse pourrait exécuter elle-même, Poulenc écrira à son ami Jean Françaix: «Le concerto (…) n’est pas du Poulenc amusant du concerto pour deux pianos, mais plutôt du Poulenc en route pour le cloître.» Le concerto ne rappelle nullement des pièces similaires de compositeurs baroques tels Handel et Vivaldi, mais offre une voix moderne à un instrument considéré démodé. À vous d’en juger:
Poulenc allternera mélodies, pièces orchestrales (Sinfonietta, 1947), de chambre ou pour le piano, chœurs profanes (Huit chansons françaises, 1945) ou religieux. Son Gloria pour soprano solo, chœur mixte et orchestre est créé simultanément à Boston par Charles Munch et à Paris par Georges Prêtre (janvier-février 1961)
http://www.youtube.com/playlist?list=PL064803AB8BBD0E4D
En 1953, Poulenc s'arrête sur le livret en italien que Flavio Testi a tiré d'une pièce représentée par Jacques Hébertot l'année précédente au théâtre des Arts, Dialogues des carmélites d'après un scénario inédit de Georges Bernanos. Poulenc se lance à corps perdu dans un sujet qui ne tarde pas à l'obséder. Il adapte lui-même le texte de Bernanos pour une version française et achève sa partition en août 1955. Dialogues est créé à Milan le 26 janvier 1957, puis en version française à l'Opéra de Paris le 21 juin suivant avec Régine Crespin et Denise Duval.
Blogue à part: 2012 marque le 20e anniversaire du décès d’Olivier Messiaen, et je soulignerai l’évènement sur mon blog Blogspot avec une paire de billets vendredi et mardi prochains. Le billet de vendredi (Messiaen, compositeur spirituel) explore des sélections inspirées par la foi du compositeur et celui de mardi prochain explorera Messiaen organiste à la Sainte-Trinité de Paris et certaines de ses compositions pour orgue seul. A lire et entendre à compter du 2 mars. @+