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Discussion: Prokofiev

  1. #21
    Membre Avatar de thierry h
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    Les sonates par Kasman sont pas mal du tout, on peut les écouter sur mon SM.
    J'aime aussi beaucoup, toujours au rayon intégrale, celles par Bronfman qui est un sacré pianiste ( à réévaluer peut être ) Y compris au rayon concertos, Bronfman accompagné par Mehta est vraiment génial!
    Aussi je n'ai jamais vraiment goûté l'integrale Toradze/Gergiev que je trouve, comment dire ? un peu lisse. Le piano n'a pas beaucoup de couleurs je trouve ( mes oreilles entendent des trucs bizarres je sais )
    Je trouve également l'intégrale Païk / Wit chez Naxos formidable, elle a aussi des détracteurs farouches... Païk se jette la dedans comme un lion, ça cogne fort, trop peut être ? mais c'est enthousiasmant !

    thierry




    ps : je crois qu'une discussion est dédiée sur le forum aux sonates...
    Dernière modification par PoorMonsteR ; 25/10/2008 à 20h22. Motif: Plus pratique pour voir les images ;-)

  2. #22
    Elle est ici. Et les sonates par Bronfman sont encore sur mon compte.

  3. #23
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    Un fil de discussion sur les Sonates pour piano de Prokofiev existe en effet depuis longtemps (j'y ai même "mis mon grain de sel" à la fin du mois de mai dernier, en évoquant justement l'intégrale Kasman -- laquelle, soit dit en passant, a été couronnée d'un "10 de Répertoire"). A ce jour le sujet a donc été traité assez largement, de sorte qu'il vaudrait mieux se concentrer ici sur l'orchestre ou la musique de chambre .

    S'agissant des Concertos pour piano, j'ai bien sûr aussi l'intégrale Naxos avec Kun Woo Paik et Antoni Wit, et je ne suis en tout cas pas l'un de ses détracteurs. C'est même celle à laquelle je reviens le plus souvent (j'apprécie au plus haut point le lyrisme qu'on trouve souvent dans la musique de Prokofiev - à commencer par ce grand moment qui figure dans le dernier mouvement du Troisième concerto -, mais quand ça doit "cogner" je préfère qu'on y aille franchement ).

    A propos du pianiste Kun Woo Paik, je relève juste qu'il a enregistré plus tard pour Decca [2001] un étonnant récital Fauré (je n'attendais pas ça de lui), un album qu'une partie de la critique a encensé tandis qu'une autre le "descendait en flammes".

    La première intégrale des Concertos pour piano de Prokofiev que j'ai achetée, c'était un coffret Melodiya d'enregistrements réalisés dans l'ancienne URSS, avec Vladimir Krainev et la Philharmonie de Moscou dirigée par Dimitri Kitaenko. Je l'ai évidemment toujours et je l'aimais assez pour son côté un peu "carré et robuste", qui me paraissait bien convenir au répertoire. Il y a toutefois très longtemps que je ne l'ai plus écoutée.

    Jacques

  4. #24
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    Concernant le piano Prokofiev a écrit d'autres oeuvres que les sonates...C'est pas un rayon que je connais bien... Pour la musique de chambre, il y a bien longtemps que je n'ai pas écouté par exemple les deux quatuors à cordes, ou les sonates pour violon...


  5. #25
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    Bonsoir Thierry

    Le reste de la musique pour piano seul de Prokofiev représente plus du double du volume occupé par les Sonates . En dehors de disques isolés, je possède une intégrale de tout ce corpus (y compris les transcriptions de ballets), enregistrée pour Harmonia Mundi entre 1992 et 1999 par le pianiste américain d'origine chinoise Frederic Chiu (il s'agit d'un coffret de 9 CDs, auxquels s'ajoute un dixième disque où Chiu accompagne Pierre Amoyal dans les Sonates pour violon et piano). C'est une intégrale de qualité, mais je la trouve quand même dans l'ensemble un peu "lisse", un peu trop "raffinée", en particulier dans les pièces où j'attendais davantage de punch... Mais là, de nouveau, c'est une question de goût personnel.

    J'ai bien sûr aussi divers disques de musique de chambre, des versions complètes ou sous forme de suites des principaux ballets (n'oublions pas, en particulier, le célébrissime "Roméo et Juliette" ), des enregistrements des symphonies (dont une intégrale), ainsi que des versions d'autres oeuvres plus ou moins connues.

    Mais je reviendrai sur ces différents aspects de l'oeuvre de Prokofiev (avec peut-être quelques exemples) un autre jour, car j'ai pas mal de choses à réécouter dans l'intervalle.

    En attendant, je montre ci-dessous une vidéo consacrée à la Toccata en ré mineur Op. 11 de 1912, une oeuvre qui produit toujours un certain effet sur l'auditeur (en tout cas lorsqu'on l'entend pour la première fois) :



    Jacques

  6. #26
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    A titre documentaire, mais pas seulement, on trouve un certain nombre de pièces jouées par Prokofiev lui-même ;

    je reste toujours étonné par certaines des "visions fugitives", avec un rubato que plus personne n'oserait pour jouer un imitateur de Chopin (je suis à dessein caricatural dans ma formulation).;

    Voilà le CD en question, pas cher en plus :
    Dernière modification par lebewohl ; 24/10/2008 à 14h36.

  7. #27
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    Citation Envoyé par lebewohl Voir le message
    A titre documentaire, mais pas seulement, on trouve un certain nombre de pièces jouées par Prokofiev lui-même
    Bonjour Lebewohl .

    Sous forme d'une vidéo trouvée sur YouTube, j'en mets une ci-dessous, de ces pièces jouées par Prokofiev en personne (le son a l'air très récent car l'enregistrement provient d'un "Duo-Art Reproducing Piano Roll" anglais, adapté à un piano actuel). Il s'agit de la fameuse "Marche" tirée de l'opéra "L'Amour des trois oranges".

    Au-dessous de la vidéo, je montre un très joli récital où, de Prokofiev, la pianiste russe Tatiana Nikolayeva (grande spécialiste de Bach et de Chostakovitch) interprète justement cette "Marche", ainsi que le Prélude en do majeur Op. 12 No 7. Je relève que ce récital Borodine / Liadov / Prokofiev vaut surtout pour la Petite Suite de Borodine, qui est un véritable joyau du piano russe du XIXème siècle (une oeuvre à connaître absolument à mon avis, et pas seulement si on aime la musique de Borodine).

    Voici ces deux choses :






    Jacques

  8. #28
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    Citation Envoyé par Jacques Voir le message
    "Duo-Art Reproducing Piano Roll"
    Bonjour Jacques,

    Pourriez vous nous en dire plus sur ce procédé ? si j'ai bien compris c'est un truc qui vous convertit le bruit d'un moteur d'une Ford T en celui d'une Jaguar dernier cri ?!
    Le procédé est il réalisé, réalisable, plausible, impossible,( rayez la/les mentions inutiles ) concernant par exemple des cordes ou n'importe quel autre instrument ?

    thierry

  9. #29
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Pourriez vous nous en dire plus sur ce procédé ? si j'ai bien compris c'est un truc qui vous convertit le bruit d'un moteur d'une Ford T en celui d'une Jaguar dernier cri ?!
    Le procédé est il réalisé, réalisable, plausible, impossible,( rayez la/les mentions inutiles ) concernant par exemple des cordes ou n'importe quel autre instrument ?
    thierry
    Si vous lisez l'anglais, Thierry , vous aurez toutes les explications utiles sur la page "Wikipedia" suivante (il n'y a malheureusement pas son équivalent en français; il y a juste de l'allemand, du hongrois et du japonais) :

    http://en.wikipedia.org/wiki/Piano_roll

    Jacques

  10. #30
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    Pour les Symphonies de Prokofiev, j'ai deux intégrales ("honnêtes" sans être absolument "transcendantes"), l'une en coffret, l'autre en disques séparés (dont je montre un exemplaire) :




    J'ai aussi divers disques isolés, dont le must absolu ci-dessous en ce qui concerne la magnifique, lyrique et épique Symphonie No 5 en si bémol majeur Op. 100 (la plus connue après le joli pastiche haydnien que constitue la No 1 dite "classique"). Réalisé en 1969 par von Karajan et le Berliner Philharmoniker, cet enregistrement est en tout cas sorti un jour grand vainqueur d'un comparatif suivi d'une écoute "en aveugle". S'agissant de Prokofiev, on pourrait peut-être le mettre au même rang que celui de l'enregistrement réalisé plus tard de la Dixième Symphonie de Chostakovitch par le célèbre - et très controversé - chef allemand. Voici ce must :




    Jacques

  11. #31
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Pour mémoire : Dans l'édition timbrée, Nevsky était couplé avec le Sacre!

    thierry

    Oui .

    Comme je possède cette ancienne édition, je montre ci-dessous comment elle se présente (la version du Sacre qui la complète peut aussi être tenue pour une référence, je crois, en dépit d'une concurrence serrée) :



    Jacques

  12. #32
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    C'est en effet une des plus belles versions du Sacre du Printemps, je trouve. Et d'Alexandre Nevski, mais j'en connais beaucoup moins.

    (et, pardon pour la parenthèse, mais Oedipus Rex et la Symphonie de Psaumes par les mêmes sont extraordinaires) <- fin de la parenthèse

  13. #33
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    Citation Envoyé par lebewohl Voir le message
    C'est en effet une des plus belles versions du Sacre du Printemps, je trouve. Et d'Alexandre Nevski, mais j'en connais beaucoup moins.
    (et, pardon pour la parenthèse, mais Oedipus Rex et la Symphonie de Psaumes par les mêmes sont extraordinaires) <- fin de la parenthèse
    Parfaitement d'accord avec vous, Lebewohl , y compris avec ce que vous avez écrit entre parenthèses (car j'ai moi-même tous ces enregistrements depuis longtemps -- je pense d'ailleurs qu'un fil sur Stravinsky compositeur serait le bienvenu, pour autant que quelqu'un ose se lancer dans l'aventure) .


    En ce qui concerne la musique de chambre de Prokofiev, je ne peux pas dire que j'étouffe sous les versions...

    S'agissant des deux beaux quatuors à cordes, le Quatuor No 1 en si mineur Op. 50 (composé en France - sauf erreur - en 1931) et le Quatuor No 2 en fa majeur Op. 92 (composé en URSS en 1942), je ne possède que cette version, qui me satisfait d'ailleurs pleinement pour l'instant :




    Quant à l'oeuvre pour violon et piano, j'en possède ces deux versions, chacune avec les Cinq mélodies pour violon et piano Op. 35bis et les Sonates pour violon et piano No 1 Op. 80 (1938-40) et No 2 Op. 94bis (1943), celle de gauche ayant pour seul avantage de contenir en plus l'arrangement pour violon et piano de la fameuse "Marche" tirée de "L'Amour des trois oranges" :



    Ceux qui savent déjà tout le bien que je pense du jeune violoniste canadien James Ehnes (en particulier pour ses récents enregistrements des concertos d'Elgar et de Walton) ne s'étonneront pas de voir à nouveau ce dernier ici. A 23 ans (en 1999), avec sa partenaire d'alors la pianiste Wendy Chen [NB : ils font aussi merveille, chez le même label québecois, dans un récital Saint-Saëns - Ravel - Debussy], ce violoniste abordait avec un talent remarquable de maîtrise et de musicalité ces sonates de Prokofiev, ce qui contribua beaucoup à sa célébrité.

    Tiré du livret de l'enregistrement Ehnes de ces Sonates de Prokofiev, voici en outre un petit texte qui relate un point d'histoire relativement peu connu :

    "Lorsque la dépouille de Prokofiev fut exposée solennellement à Moscou le 6 mars 1953 - le jour suivant son décès, qui ne fut pas annoncé au reste du monde avant une semaine puisqu'il coïncidait avec celui de Staline -, la musique la plus appropriée qu'on avait su trouver pour honorer sa mémoire fut celle des premier et troisième mouvements de la Sonate en fa mineur Op. 80 du regretté. La partie de violon était alors tenue par David Oïstrakh, ami de Prokofiev (et autrefois son partenaire d'échecs), à qui l'oeuvre avait été dédiée et qui en avait assuré la création. On peut facilement s'imaginer à quel point avait dû paraître d'un douloureux à-propos ce passage de l'Andante assai, où le violon fait entendre d'inquiétantes gammes rapides en sourdine sur toute son étendue, à glacer le sang (le passage est marqué freddo), et duquel Prokofiev avait confié à Oïstrakh qu'il devait sonner comme «le vent dans un cimetière». Le grand violoniste soviétique résuma ainsi ses impressions de la sonate : «Rien qui ne fut écrit pour le violon depuis de nombreuses décennies - où que ce soit dans le mondre - ne pourrait égaler cette oeuvre en beauté et en profondeur» (...)".


    Jacques

  14. #34
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    C'est juste pour ne pas qu'on l'oublie ...


    En guise d'avant-propos à sa version de l'immense opéra Guerre et Paix, enregistré pour Erato du 8 au 15 décembre 1986 à Paris (Radio France),



    le violoncelliste et chef d'orchestre Mtislav Rostropovitch écrivait ce qui suit :

    "Durant les dernières années de sa vie, alors que sa santé se dégradait d'une manière inexorable, Serge Prokofiev était poursuivi par une obsession légitime : espérer que Guerre et Paix, son plus haut chef-d'œuvre, triomphe un jour dans sa version définitive, fruit de tant de labeur...

    "A chacune des visites que je lui rendais à l'hôpital moscovite où il fut soigné jusqu'à sa mort, survenue le 5 mars 1953, Prokofiev me parlait sans cesse de son opéra. Il me confia son ardent désir de me voir faire reconnaître Guerre et Paix partout. Le 15 Mai 1970, je conduisais pour la première fois de ma vie cette énorme partition au Théâtre Bolchoï; à cette occasion, Chostakovitch écrivit une critique dont les louanges me font encore rougir.

    "Deux heures avant le début de la représentation, je m'étais rendu au cimetière où Prokofiev est inhumé. Là, je mis mes deux bras autour de sa pierre tombale, et l'embrassai. A ce moment essentiel, je tenais en effet à communiquer avec lui.

    "Désormais, j'espère ardemment que le présent enregistrement satisfera mon cher vieil ami. Si, du haut du ciel, il me regarde, qu'il sache à quel point je suis ému de m'être enfin acquitté de la mission qu'il me confia voici presque quarante ans."

    En ce qui concerne les circonstances dans lesquelles cet opéra a vu le jour et les difficultés auxquelles il s'est heurté par la suite, les faits sont suffisamment complexes pour que je me contente, prudemment, de simplement reproduire ci-dessous ce qu'en dit André Lischké dans le gros livret joint au coffret.

    Jacques

    --------------------------------------------------------------------

    (...) C'est aussitôt après avoir achevé Les Fiançailles au Couvent que Prokofiev conçut le projet d'un opéra d'après le roman de Tolstoï. Est-ce un pressentiment, en ce mois d'avril 1941, deux mois avant que les hordes nazies ne rompent l'imprudent pacte Molotov-Ribentropp pour entreprendre l'invasion de l'URSS ? La guerre est déjà commencée lorsque Prokofiev élabore son livret, avec l'aide de sa seconde épouse Myra Mendelssohn, et avec la participation de Serge Eisenstein. Outre la lecture de Tolstoï, il se plonge dans la documentation historique, allant jusqu'à étudier les chansons militaires, et divers dictons apparus à l'époque. "Les pages du roman relatant la lutte du peuple russe contre les armées de Napoléon devinrent alors particulièrement actuelles, et je sentis clairement que c'est ces pages-là qui devaient constituer la base de l'opéra", écrivit-il dans son Autobiographie. Evacué bientôt, avec d'autres intellectuels, au Caucase, successivement à Naltchik, à Tbilissi puis à Alma-Ata, Prokofiev acheva au début de 1942 la version pour piano et chant de Guerre et Paix.

    Son ami le compositeur Nikolaï Miaskovsky en donna alors l'appréciation suivante : "Des passages remarquables, mais selon sa manière habituelle, les chanteurs conversent presque tout le temps sur le fond d'une magnifique musique orchestrale. Une critique qu'il n'aura pas été le seul à formuler... Un an après, l'opéra est entièrement orchestré. Une première version est donc prête, réalisée parallèlement à la composition d'autres œuvres (Septième sonate pour piano, musique du film Ivan le Terrible, Ballade d'un garçon resté Inconnu, entre autres). Au cours de l'orchestration, Prokofiev apporte déjà un nombre de remaniements à sa partition, en suivant les conseils d'Eisenstein et du chef d'orchestre Samuel Samosoud, pressenti pour la création de l'ouvrage. C'est alors qu'il écrit, également, l'épigraphe choral par lequel débute Guerre et Paix. Dans cette première version, l'opéra se compose de onze tableaux, les six premiers constituant la partie "paix" (...) et les cinq derniers la partie "guerre" (...). La partition piano et chant fut éditée en 1943. Deux exécutions en concert eurent d'abord lieu, l'une avec accompagnement au piano, dans la Maison des Acteurs à Moscou en Octobre 1944, l'autre dans la grande salle du Conservatoire de Moscou le 7 Juin 1945. Samosoud suggéra à Prokofiev d'écrire un nouveau tableau, celui du bal où Natacha fait la connaissance d'André Bolkonsky; ce tableau devint le numéro 2, précédant donc celui de la visite de Natacha chez le vieux Bolkonsky. Ce fut alors que, vu les dimensions de l'ouvrage, on songea à le répartir sur deux soirées. Samosoud avait récemment quitté son poste au Théâtre Bolchoï de Moscou pour prendre celui du Théâtre Maly de Léningrad, et c'est là que furent créés, le 12 Juin 1946, les huit premiers tableaux de Guerre et Paix, c'est-à-dire toute la première partie avec adjonction du tableau précédant la bataille de la Moskova. Le reste devait être représenté au cours de la saison suivante. Dans cette perspective, Prokofiev avait composé encore un autre tableau, devenu le numéro 10 : le Conseil de guerre au village de Fili, où le Maréchal Koutouzov prend la décision d'abandonner Moscou pour un repli stratégique. Cela portait donc à 13 le nombre total des tableaux. Mais cette seconde représentation n'eut jamais lieu; "pour des raisons indépendantes des événements, certaines personnes avaient jugé que la conception historique de la seconde partie de l'opéra était erronnée", écrivit par la suite Samuel Samosoud dans ses souvenirs sur Prokofiev. Guerre et Paix avait simplement déplu en haut lieu, pour des raisons auxquelles il ne faut guère chercher de fondements rationnels. On entrait dans les années tristement célèbres du "Jdanovisme", avec la répression culturelle et la chasse au "formalisme", ce terme désignant toute œuvre arbitrairement jugée contraire aux principes d'un "art pour le peuple".

    En automne 1948, une nouvelle tentative fut cependant faite pour redonner vie à Guerre et Paix, en réduisant la totalité de l'opéra à une seule soirée au moyen d'une série d'importantes coupures dont Prokofiev lui-même dressa la liste, bon gré mal gré. Ce n'était plus, en fait, que des "extraits" de Guerre et Paix, mais cette solution de fortune, elle non plus, ne fut pas réalisée. Entretemps, en 1946-1948, Prokofiev avait retravaillé sa partition, en conservant le plan définitif en treize tableaux, avec épigraphe choral et ouverture, mais en effectuant divers ajouts ou modifications. C'est là que fut écrit notamment le beau duo entre Natacha et Sonia au premier tableau. Au cours des cinq années qui lui restaient à vivre, il retoucha encore à plusieurs reprises tel ou tel détail, dont l'air de Koutouzov au dixième tableau. Mais il ne devait jamais voir son opéra représenté intégralement. Onze des treize tableaux furent représentés à Leningrad le 1er avril 1955, deux ans après sa mort. Le 8 novembre 1957, on joua à Moscou, au Théâtre Stanislavsky, les treize tableaux, mais passablement tronqués. Et c'est finalement le 15 décembre 1959 que fut représentée en une soirée au Théâtre Bolchoï la totalité de l'ouvrage, avec l'épigraphe choral, sous la direction de Mélik Pachaiev, avec Galina Vichnievskaïa dans le rôle de Natacha. Une des particularités de Guerre et Paix, qui constitue aussi une des grandes difficultés de son exécution, est de posséder un nombre de personnages jamais atteint dans un opéra : soixante-douze ! Il est vrai que la participation de certains est limitée à quelques mots, et qu'un certain nombre de rôles, disséminés entre les tableaux, peuvent être chantés par les mêmes interprètes.

    Schématiquement, la première partie de Guerre et Paix, c'est-à-dire les sept premiers tableaux, apparaît comme une chronique de la vie et des intrigues des personnages; la haute société russe du début du XIXe siècle, un cadre, des types humains, des rapports psychologiques, tels que Tchaikovsky aurait aimé les mettre en musique, avec naissance et évolution de sentiments sur fond de valses.

    La seconde partie, au contraire, est une chronique des événements où certains de ces mêmes personnages, emportés par le tourbillon du drame collectif, réapparaissent se détachant sur le fond d'une vaste mosaïque. Par le souffle, le patriotisme, le rôle des chœurs, le caractère des thèmes, Prokofiev rejoint là les grands opéras nationaux du Groupe des Cinq, dont le reflet a déterminé l'esthétique d'Alexandre Nevsky et d'Ivan le Terrible. A travers tout Guerre et Paix, Prokofiev reste, dans une plus on moins grande mesure, redevable à Moussorgsky par le style de l'écriture des dialogues, par l'art de passer du récitatif à l'arioso, ainsi que par les portraits musicaux de certains personnages, dont l'un des plus hauts en couleurs est le cocher Balaga, au cinquième tableau.

    II est arrivé assez fréquemment à Prokofiev d'avoir recours à des auto-emprunts. Guerre et Paix réutilise des fragments de musique repris dans la Musique de scène pour Eugène Onéguine écrite en 1936 : l'introduction du premier tableau, la valse en sol mineur du quatrième tableau pendant l'explication entre Natacha et Anatole Kouraguine, l'arioso de Pierre Bezoukhov au sixième tableau, chez Akhrossimova. Un autre emprunt à la musique pour le film Lermontov (1941), est encore une Valse, celle qu'Hélène Bezoukhov danse avec Rostov au quatrième tableau. Enfin, Prokofiev a repris à sa musique pour Ivan le Terrible une des plus belles mélodies de Guerre et Paix, celle de l'air de Koutouzov au dixième tableau ("Moscou, mère de toutes les villes") qui était, dans le film, le chœur "Vaste steppe". Cette large et noble cantilène, reprise à la fin du treizième tableau par le chœur du peuple, suffirait, à elle seule, à confirmer Guerre et Paix dans la prestigieuse lignée des opéras nationaux et populaires russes.

    --------------------------------------------------------------------

  15. #35
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    Mais c'est fort intéressant tout ça... connaissez vous la version de Valery Guerguiev ? On m'en a dit le plus grand bien...
    A vrai dire je connais fort mal les opéras de Prokofiev, sinon l'Amour des trois oranges... Pas écouté depuis des siècles...

    Thierry

  16. #36
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    Thierry , je n'ai entendu à ce jour de Guerre et Paix que la version Rostropovitch que j'ai montrée (et que j'ai achetée dès sa parution).

    Moi aussi je ne connais pas beaucoup les opéras de Prokofiev, et j'avoue n'avoir écouté qu'une fois Guerre et Paix de bout en bout. On y trouve de magnifiques choses, mais ça dure quand même plus de quatre heures et ça peut paraître un tout petit peu "longuet" (compliqué aussi, vu l'intrigue et soixante-douze personnages différents).

    Jacques

  17. #37
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    Citation Envoyé par thierry h Voir le message
    Jacques!

    il y a bien longtemps que je n'ai pas écouté ces disques...
    On peut je pense ajouter à ces deux enregistrements celui de Karel Ancerl, volume 36 de l'édition Gold! Vera Sukupova y est extraordinaire!
    Cet enregistrement est couplée avec une oeuvre qui ne me fait pas relever la nuit : la Symphonie concertante pour violoncelle! Mais c'est le grand André Navarra qui s'y colle!

    Pour mémoire : Dans l'édition timbrée, Nevsky était couplé avec le Sacre!

    thierry

    Pour ma part, je ne trouve absolument pas que Soukupova soit extraordinaire. C'est même le maillon faible de l'enregistrement d'Ancerl. Irina Arkhipova et Larissa Avdeeva (enregistrement Svetlanov) sont bien supérieures. Ancerl tire Alexandre Nevski vers Mahler. Je ne pense pas que ce soit correct stylistiquement. Je retrouve le film d'Eisenstein avec la direction très contrastée, voire cinglante de Svetlanov. Un cran au dessus d'Ancerl et Chailly. Un des grands disques de Svetlanov.

    Quant à l'enregistrement de Muti de l'oratorio tiré d'Ivan le terrible, son choeur n'est pas à la hauteur et il tire cette oeuvre vers l'opéra ce qu'elle n'est pas (Muti nous fait du Moussorgsky et çà cafouille dans les premier tableaux. Arkhipova très bien par contre). L'enregistrement intégra paru chez melodya, dirigé par Stassevitch, est bien préférable

  18. #38
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    Merci pour le tuyau Sophie car je ne connais pas du tout l'enregistrement de Svetlanov mais je ne doute qu'il soit, disons, plus idiomatique que celui d'Ancerl dans lequel je suis tombé tout petit...
    Concernant la filiation mahlérienne ça ne m'a jamais sauté aux oreilles...

    thierry

  19. #39
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    Au rayon symphonique on ne doit pas pouvoir aligner une quantité astronomique d'intégrales... a mon goût il y en a de fort bonnes : Celle de Rozhdestvensky que Melodiya rééditera bien un jour, Celle de Jean Martinon chez Vox, ou celle de Jarvi que j'aime assez malgré une prise de son un peu pâteuse. Je ne connais ni Ozawa ni Rostro! D'accord pour la 5ème de Karajan, c'est l'un des rares disques de lui que j'écoute encore ( avec la 10ème de Chosta... hé oui! )
    En tout cas il est bien dommage que seules les 1ère et 5ème se soient véritablement imposées! J'avoue ne pas écouter souvent les 4ème ( je préfère et de loin la seconde version ) et 7ème ( beau final tout de même ) mais les seconde et sixième sont pour moi extraordinaires.

    thierry

  20. #40
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    J'ai l'intégrale de Rozhdestvensky ... idéal pour le scrabble ce gazier ... bon ... j'écoute jamais ... je l'ai passée une fois en jouant aux cartes ... ça a renaudé vilain ... pffff ....
    Dernière modification par Dominique ; 28/10/2008 à 17h43.
    Dominique

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